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08/01/1992 | FRANCE | N°85439

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 08 janvier 1992, 85439


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 février 1987, présentée par LE PREFET, COMMISSAIRE DE LA REPUBLIQUE DU DEPARTEMENT DES YVELINES ; M. le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 1986 du tribunal administratif de Versailles en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif, après avoir annulé sur son déféré la délibération du 4 décembre 1985 du conseil municipal de la ville de Trappes autorisant la passation d'un marché négocié avec la société Bouygues, a omis de statuer sur ses

conclusions tendant à l'annulation dudit marché, conclu le 5 décembre 1...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 27 février 1987, présentée par LE PREFET, COMMISSAIRE DE LA REPUBLIQUE DU DEPARTEMENT DES YVELINES ; M. le préfet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 28 novembre 1986 du tribunal administratif de Versailles en tant que, par ledit jugement, le tribunal administratif, après avoir annulé sur son déféré la délibération du 4 décembre 1985 du conseil municipal de la ville de Trappes autorisant la passation d'un marché négocié avec la société Bouygues, a omis de statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation dudit marché, conclu le 5 décembre 1985 ;
2°) d'annuler ce marché ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Marc Guillaume, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de la société Bouygues,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par délibération du 4 décembre 1985, le conseil municipal de la ville de Trappes a autorisé son maire à conclure un marché négocié avec la société Bouygues pour la réalisation de la "maison des familles" ; que ce marché a été conclu le 5 décembre 1985, pour un montant de 3,1 millions de francs hors taxes ;
Considérant qu'il résulte de son examen que le déféré du commissaire de la République des Yvelines contenait des conclusions tendant, d'une part, à l'annulation de la délibération précitée du 4 décembre 1985 et, d'autre part, à l'annulation du marché en cause ; que le tribunal, qui a le pouvoir d'annuler un tel marché lorsqu'il est saisi, au titre du contrôle de légalité des actes des collectivités territoriales, d'un déféré tendant à cette fin, était tenu de répondre à l'ensemble desdites conclusions ; que, par suite, le jugement du 28 novembre 1986 du tribunal administratif de Versailles doit être annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à l'annulation du marché ;
Considérant qu'il y a lieu de statuer immédiatement tant sur les conclusions sur lesquelles le tribunal administratif a ainsi omis de statuer que sur les autres conclusions de la requête et du recours incident de la société Bouygues dont le Conseil d'Etat se trouve directement saisi par l'effet dévolutif de l'appel ;
Considérant qu'aux termes de l'article 309 du code des marchés publics : "Les collectivités locales et leurs établissements publics peuvent conclure des marchés négociés pour les travaux, fournitures ou services dont la valeur n'excède pas, pour le montant total de l'opération, des seuils fixés, pour chaque catégorie, pa arrêté conjoint du ministre de l'économie et des finances et des ministres intéressés." ;

Considérant que le seuil fixé, pour un tel marché, à la date de sa conclusion, par l'arrêté du 7 janvier 1982 pris pour l'application de l'article 309 précité était de 350 000 F ; que le prix fixé pour ce marché excédait ledit seuil ;
Considérant que la société Bouygues se fonde, en premier lieu, pour justifier le recours à la procédure du marché négocié, sur les dispositions de l'article 312 du code des marchés publics, en vertu desquelles il peut être passé un marché négocié sans limitation de montant : "4° Pour l'exécution des travaux, fournitures ou services, dans les cas d'urgence impérieuse motivée par des circonstances imprévisibles ne permettant pas de respecter les délais prévus aux sections I et III du présent chapitre" ;
Considérant que la ville de Trappes ne pouvait légalement recourir à la procédure du marché négocié sur le fondement des dispositions susrappelées, dès lors que l'exécution des travaux nécessaires à la réalisation d'une "maison des familles" comprenant des salles de réunion et de réception à l'usage des administrés, ne présentait pas un caractère d'urgence impérieuse motivée par des circonstances imprévisibles ;
Considérant que la société justifie le choix de la procédure du marché négocié en se fondant, en second lieu, sur les dispositions de l'article 312 bis du code des marchés publics, en vertu desquelles : "Il peut être passé des marchés négociés sans mise en concurrence préalable lorsque l'exécution ne peut être réalisée que par un entrepreneur ou un fournisseur déterminé. Il en est ainsi dans les cas suivants : ... 2° Lorsque les besoins ne peuvent être satisfaits que par une prestation qui, à cause de nécessités techniques, d'investissements préalables importants, d'installations spéciales ou de savoir-faire, ne peut être confiée qu'à un entrepreneur ou un fournisseur déterminé" ;

Considérant, toutefois, que la circonstance invoquée par la société et tirée de ce que la réalisation de la "maison des familles" serait complémentaire de l'opération de réhabilitation du square Jean Macé dont le marché lui avait été précédemment confié, et qu'il était souhaitable de préserver l'homogénéité de l'ensemble des travaux, ne suffit pas à établir qu'elle était la seule société à laquelle la commune pouvait demander la réalisation des travaux en cause ; qu'ainsi, les conditions prescrites par les dispositions susrappelées de l'article 312 bis du code des marchés publics n'étaient pas non plus réunies en l'espèce ; que, dès lors, la ville de Trappes ne pouvait légalement recourir à la procédure du marché négocié ; qu'ainsi le marché conclu le 5 décembre 1985 entre la ville de Trappes et la société Bouygues doit être annulé ;
Article 1er : Le jugement du 28 décembre 1986 du tribunal administratif de Versailles est annulé en tant qu'il n'a pas statué sur les conclusions présentées par le commissaire de la République des Yvelines tendant à l'annulation du marché conclu le 8 décembre 1985 entre la ville de Trappes et la société Bouygues.
Article 2 : Le marché conclu le 5 décembre 1985 entre la ville de Trappes et la société Bouygues est annulé.
Article 3 : L'appel incident de la société Bouygues est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DES YVELINES, à la société Bouygues, à la ville de Trappes et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 85439
Date de la décision : 08/01/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMMUNE - FINANCES - BIENS - CONTRATS ET MARCHES - CONTRATS ET MARCHES - REGLEMENTATION.

MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - MODE DE PASSATION DES CONTRATS - MARCHE NEGOCIE.


Références :

Code des marchés publics 309, 312, 312 bis


Publications
Proposition de citation : CE, 08 jan. 1992, n° 85439
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Marc Guillaume
Rapporteur public ?: Pochard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:85439.19920108
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