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10/01/1992 | FRANCE | N°79918

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 10 janvier 1992, 79918


Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Frédéric Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1971 à 1978 dans les rôles de la commune de Montmorency et des majorations exceptionnelles y afférentes au titre des années 1973 à 1975,
2°) lui accorde la déc

harge, en droits et pénalités, des impositions contestées ;
Vu les autres p...

Vu la requête, enregistrée le 2 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Frédéric Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 20 mars 1986 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 1971 à 1978 dans les rôles de la commune de Montmorency et des majorations exceptionnelles y afférentes au titre des années 1973 à 1975,
2°) lui accorde la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Dulong, Maître des requêtes,
- les conclusions de M. Gaeremynck, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts, relatif aux revenus de capitaux mobiliers : "Sont notamment considérés comme revenus distribués : ... d. La fraction des rémunérations qui n'est pas déductible en vertu de l'article 39-1-1° ..." ; qu'aux termes de cette dernière disposition : "Les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu ..." ;
Sur la régularité de l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires du 18 juin 1979 :
Considérant que l'avis émis, le 18 juin 1979, par la commission départementale au sujet des rémunérations reçues de la société "Papeteries de Châteauneuf-la-Forêt" par M. Y..., son principal représentant, en 1971, 1972, 1973 et 1974, ne fait état d'aucune comparaison entre l'emploi de l'intéressé et des emplois similaires dans d'autres entreprises ; que M. Y... ne peut donc utilement prétendre qu'il n'a pas été mis à même de discuter des termes d'une telle comparaison ; que la remarque contenue dans l'avis de la commission, selon laquelle la rémunération de M. Y... l'assimilerait à un dirigeant de droit, est sans influence sur la régularité dudit avis ; qu'en se prononçant sur la prise en charge par la société des frais du bureau de représentation qu'elle avait ouvert à Neuilly-sur-Seine et sur le respect des clauses du contrat de travail liant M. Y... à la société, la commission départementale s'est bornée à des constatations de fait qui relevaient de sa compétence ; qu'ainsi, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que l'avis du 18 juin 1979 serait entaché d'irrégularité ;
Sur la charge de la preuve :

Considérant que M. X... soutient que les bases des impositions qui lui ont été assignées au titre des années 1971 à 1974 seraient supérieures à celles qui ont été retenues par la commission départementale dans son avis du 18 juin 1979 ; qu'il résulte, toutefois, de l'instruction que la commission a entériné les montants bruts de rémunération qui avaient été proposés par l'administration ; qu'il appartient, en conséquence, à M. Y..., comme l'a à juste titre déclaré le jugement attaqué, d'apporter la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition au titre des années 1971 à 1974 ; qu'en ce qui concerne l'année 1976, l'administration a suivi l'avis émis par la commission le 24 avril 1981 ; qu'ainsi, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, la charge de la preuve incombe, pour l'année 1976, à M. Y... ; qu'en revanche, en ce qui concerne les années 1975, 1977 et 1978, l'administration a établi les impositions de M. Y... sur des bases supérieures à celles qui avaient été indiquées dans l'avis de la commission du 24 avril 1981 ; que, pour ces trois années, il appartient donc à l'administration, contrairement à ce qu'elle soutient, d'apporter la preuve du bien-fondé des impositions en litige ;
Sur le bien-fondé des impositions :
En ce qui concerne les rémunérations perçues par M. Y... en 1971, 1972, 1973, 1975, 1976, 1977 et 1978 :
Considérant que M. Y..., qui exerçait alors les fonctions de représentant et de directeur des ventes dans un secteur géographique constitué par les départements de l'Oise, de Seine-et-Oise, de Seine-et-Marne, de Seine-Maritime, de l'Eure, d'Eure-et-Loir et par deux arrondissements de l'Orne, a perçu au titre de ces années les sommes respectives de 1 147 883 F, 996 469 F, 1 117 820 F, 1 531 716 F, 1 535 570 F, 1 457 051 F et 1 445 394 F ;

Considérant que le fait que ces rémunérations ont excédé le montant cumulé de celles qui ont été payées pendant la même période aux trois dirigeants de la société et que les autres représentants de la société ont bénéficié de taux de commission moins importants que ceux de M. Y... ne suffisent pas à établir que les sommes perçues par ce dernier seraient excessives, dès lors, en particulier, que pour commercialiser 40 % environ de la production de la société, ces autres représentants étaient au nombre de cinq et que leur activité était dirigée par un directeur des ventes, tandis que M. Y... a, à lui seul, commercialisé entre 1971 et 1973, de 60 % à 50 % de la production de la société ; que le fait que la clause du contrat de travail de M. Y... qui prévoyait le principe d'une réduction de sa commission au-delà d'un certain volume de ventes n'a pas été mise en oeuvre par les parties ne démontre pas davantage l'excès des rémunérations servies dès lors que, sans être contredit, l'intéressé fait valoir que les circonstances dans lesquelles le contrat de travail avait été conclu en 1961 ont entièrement changé ultérieurement ; que, dans ces conditions, M. Y... rapporte la preuve que ses rémunérations des années 1971, 1972, 1973 et 1976 n'ont pas été excessives et que l'administration n'établit par aucun argument pertinent que les rémunérations des années 1975, 1977 et 1978 l'ont été ; que M. Y... est donc fondé à demander la décharge des impositions supplémentaires correspondantes ;
En ce qui concerne l'imposition de la rémunération de 1974 :
Considérant que la rémunération de 1 759 773 F versée à M. Y... en 1974 a excédé de plus de 70 % celle de l'année 1973 ; que l'administration fait justement valoir que cette augmentation n'a correspondu à aucun accroissement de l'activité de M. Y... au sein de la société et que, pour un tonnage commercialisé inférieur à celui de 1973, les commissions de M. Y... au titre de 1974 se sont accrues de près de 60 % alors que le prix des emballages augmentait de 62 % ; que M. Y..., qui soutient, à tort, que ce moyen de défense serait inopérant, n'en établit pas davantage le mal-fondé ; que, dans ces conditions, la fraction de la rémunération de M. Y... qui n'a été due qu'à la hausse des prix, doit, en l'espèce, et par application des dispositions précitées de l'article 111 du code général des impôts, être imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'il sera fait une juste appréciation de cette fraction en la fixant à 650 000 F ; que cette somme étant supérieure à celle qui a été effectivement imposée dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, la requête de M. Y... ne peut qu'être rejetée, en ce qui concerne l'année 1974 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... n'est fondé qu'en ce qui concerne les années 1971 à 1973 et 1975 à 1978, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande en décharge des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti ;
Article 1er : M. Y... est déchargé, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1971, 1972, 1973, 1975, 1976, 1977 et 1978.
Article 2 : Le jugement du 20 mars 1986 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Y... et au ministre délégué au budget.


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 79918
Date de la décision : 10/01/1992
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 111


Publications
Proposition de citation : CE, 10 jan. 1992, n° 79918
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Dulong
Rapporteur public ?: Gaeremynck

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:79918.19920110
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