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15/01/1992 | FRANCE | N°110457

France | France, Conseil d'État, 7 / 8 ssr, 15 janvier 1992, 110457


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 18 septembre 1989 et 17 janvier 1990, présentés pour M. Alain X..., demeurant ... et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 5 juillet 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, réformant le jugement du 4 décembre 1986 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a accordé au requérant décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au

titre de l'année 1980 dans les rôles de la commune de Saint-Pierre-des...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 18 septembre 1989 et 17 janvier 1990, présentés pour M. Alain X..., demeurant ... et tendant à ce que le Conseil d'Etat annule l'arrêt en date du 5 juillet 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, réformant le jugement du 4 décembre 1986 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a accordé au requérant décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1980 dans les rôles de la commune de Saint-Pierre-des-Corps, a rétabli M. X... au rôle dudit impôt, au titre de l'année 1980 à raison de l'intégralité de la somme de 262 800 F initialement assignée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 et le décret n° 63-706 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Turquet de Beauregard, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. de Chaisemartin, avocat de M. Alain X...,
- les conclusions de Mme Hagelsteen, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'examen de l'arrêt attaqué que, pour rétablir M. X... au rôle de l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1980 à raison de l'intégralité de la somme 262 800 F qui lui avait été assignée, la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir retenu que les faits de l'espèce revêtaient un abus de droit de la part du requérant, a néanmoins ordonné le rétablissement de l'imposition sur le fondement de l'article 38-2 du code général des impôts en estimant que l'opération s'analysait comme une réévaluation libre qui avait dégagé des plus-values professionnelles taxables ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a entaché sa décision d'une contradiction de motifs ; qu'il y a lieu dès lors d'annuler l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'en vertu de l'article II de la loi susvisée du 31 décembre 1987, le Conseil d'Etat, s'il prononce l'annulation d'une décision d'une juridiction contentieuse statuant en dernier ressort peut régler l'affaire au fond si l'intérêt d'une bonne administration de la justice le justifie ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1649 quinquiès B du code général des impôts applicable aux ipositions contestées : "Les actes dissimulant la portée véritable d'un contrat ou d'une convention sous l'apparence de stipulations déguisant soit une réalisation soit un transfert de bénéfices ou de revenus ... ne sont pas opposables à l'administration, laquelle supporte la charge de la preuve du caractère réel de ces actes devant le juge de l'impôt lorsque, pour restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse, elle s'est abstenue de prendre l'avis du comité consultatif ..." ; qu'il résulte de cette disposition que pour pouvoir écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, l'administration doit établir que ces actes ont un caractère fictif ou, à défaut, n'ont pu être inspirés par aucun motif autre que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, s'il n'avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées eu égard à sa situation et à ses activités réelles ;

Considérant qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X... a, conformément aux dispositions de l'article 39 octodecies I du code général des impôts, formulé une première option pour le régime simplifié et pratiqué une première réévaluation de ses fonds à la fin de l'année 1970 alors qu'il était exploitant direct ; qu'il a ensuite acquis la qualité de loueur de biens en créant le 1er octobre 1979 une société à responsabilité limitée composée de son épouse et de lui-même à laquelle il a loué ses fonds ; qu'ayant alors de nouveau opté pour le réel simplifié en sa nouvelle qualité de loueur de fonds à compter du 1er janvier 1980, il a réévalué les éléments d'actif de ses fonds ; qu'il a dissout la société à responsabilité limitée le 31 mai 1980 après avoir procédé à la vente desdits fonds ;
Considérant qu'il résulte de ces constatations de fait que l'administration a pu, à bon droit, écarter la création de la société à responsabilité limitée des Etablissements
X...
, la mise en gérance du fonds de commerce et l'option pour le régime réel simplifié comme lui étant inopposables et, rétablissant le véritable caractère des opérations, taxer le requérant sur une plus-value de cession de fonds de commerce d'un montant de 584 000 F ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement en date du 4 décembre 1986, le tribunal administratif d'Orléans a accordé au requérant décharge de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur le revenu ainsi que des pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1980 ;
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes en date du 5 juillet 1989 est annulé.
Article 2 : L'impôt sur le revenu et les pénalités y afférentes auxquels M. X... a été assujetti au titre de l'année 1980 sont remis à sa charge à raison de l'intégralité de la somme de 262 800 F initialement assignée.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 4 décembre 1986 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre délégué au budget.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 38 par. 2, 39 octodecies par. I, 1649 quinquies B
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 11


Publications
Proposition de citation: CE, 15 jan. 1992, n° 110457
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Turquet de Beauregard
Rapporteur public ?: Mme Hagelsteen

Origine de la décision
Formation : 7 / 8 ssr
Date de la décision : 15/01/1992
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 110457
Numéro NOR : CETATEXT000007632424 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1992-01-15;110457 ?
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