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31/01/1992 | FRANCE | N°58053

France | France, Conseil d'État, 2 / 6 ssr, 31 janvier 1992, 58053


Vu 1°, sous le n° 58 053, la requête enregistrée le 30 mars 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, dont le siège est à Route du Port Bloqué B.P. 16 à Ploemeur (56270), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du tribunal administratif de Rennes du 2 février 1984 en tant qu'il l'a condamnée à indemniser la commune de Scaer (Finistère) à proportion de 40 % de la somme de 191 853,93 F représentant le coût de réfectio

n du vitrage périphérique de la piscine municipale, à proportion de 60 % de ...

Vu 1°, sous le n° 58 053, la requête enregistrée le 30 mars 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, dont le siège est à Route du Port Bloqué B.P. 16 à Ploemeur (56270), représentée par son président-directeur général en exercice ; la société demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du tribunal administratif de Rennes du 2 février 1984 en tant qu'il l'a condamnée à indemniser la commune de Scaer (Finistère) à proportion de 40 % de la somme de 191 853,93 F représentant le coût de réfection du vitrage périphérique de la piscine municipale, à proportion de 60 % de la somme de 39 195,57 F correspondant à la remise en état des installations de chauffage et de circulation d'eau, à proportion de 60 % de la somme de 20 000 F pour troubles de jouissance, avec intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 1977, et à supporter 60 % des frais d'expertise ;
- la décharge lesdites indemnisations et réduise les frais d'expertise à sa charge en fonction de sa seule part de responsabilité dans les désordres affectant les pieds des poteaux ;
Vu 2°, sous le n° 58 483, le recours enregistré le 16 avril 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présenté par le MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du 2 février 1984 du tribunal administratif de Rennes en tant qu'il a déclaré l'Etat responsable à raison de 20 % des désordres affectant les pieds des poteaux de la piscine municipale de Scaer (Finistère) et l'a condamné à indemniser ladite commune à raison de 30 % de la somme de 191 853,93 F représentant le coût de remplacement du vitrage périphérique de la piscine, de 20 % de la somme de 39 195,57 F correspondant à la remise en état des installations de chauffage et de circulation d'eau et de 20 % de la somme de 20 000 F accordée à la commune de Scaer pour troubles de jouissance avec intérêt au taux légal à compter du 31 janvier 1977 ;
- décharge l'Etat desdites condamnations ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ; ;
Vu les articles 1792 et 2270 du code civil ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Chauvaux, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Rouvière, Lepitre, Boutet, avocat de la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST (S.G.C.O.), de la S.C.P. Le Bret, Laugier, avocat de la commune de Scaer et de Me Roger, avocat de la société Gauthier,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que la requête de la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST (SGCO) et le recours du MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEENT tendent à la réformation du même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que le moyen tiré de ce que le jugement attaqué ne comporterait pas l'analyse des moyens présentés par la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST manque en fait ;
Sur la recevabilité de la demande présentée en première instance par la commune de Scaer (Finistère) en tant qu'elle est dirigée contre l'Etat :
Considérant que par délibération du 5 décembre 1968, le conseil municipal de la commune de Scaer a demandé à l'Etat de prêter le concours de la direction départementale de l'équipement pour l'étude du projet de construction de la piscine municipale et pour la surveillance des travaux correspondants ; que par cette même délibération, le conseil municipal a déclaré renoncer à exercer à l'encontre de l'Etat l'action en responsabilité décennale fondée sur les articles 1792 et 2270 du code civil ; que par un contrat en date du 5 décembre 1968, approuvé le 20 février 1969, la commune a confié à M. X..., architecte, la mission de collaborer avec la direction départementale de l'équipement pour l'établissement du projet définitif et l'ensemble des opérations de passation des marchés, ainsi que pour la coordination et la surveillance des travaux ; que le projet dont s'agit, l'Etat ayant accordé son concours, a fait l'objet d'un marché approuvé le 8 mai 1970 et passé avec l'entreprise SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST ; qu'après la réception provisoire intervenue le 12 mai 1971 et la réception définitive intervenue seulement le 6 juin 1975 en raison des désordres affectant les peintures extérieures, des signes de pourrissement des pieds des portiques et poteaux de bardage en bois de la charpente sont apparus, ainsi que des cassures affectant les vitrages périphériques de la piscine ; que le MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT a opposé à l'action engagée par la commune à son encontre, pour la réparation de ces désordres, la clause de renonciation susmentionnée ;

Considérant qu'aux termes de l'article L.316-2 du code des communes "sont illégales les décisions et délibérations par lesquelles les collectivités locales renoncent, soit directement, soit par une clause contractuelle, à exercer toute action en responsabilité à l'égard de toute personne physique ou morale qu'elles rémunèrent sous quelque forme que ce soit" ; que ces dispositions édictées par la loi de finances du 23 décembre 1972 et modifiées par la loi du 2 mars 1982, sont d'application immédiate et visent les délibérations des conseils municipaux qui sont intervenues avant leur publication ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que l'illégalité édictée à l'article L.316-2 précité du code des communes s'appliquait à la renonciation à exercer l'action en garantie décennale contre l'Etat, décidée par la délibération du conseil municipal de Scaer en date du 5 décembre 1968, et que celle-ci ne pouvait ainsi faire obstacle à la recevabilité de la demande de la commune dirigée contre l'Etat ;
Au fond :
En ce qui concerne les désordres affectant la charpente de la piscine municipale de Scaer :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert commis par les premiers juges que le pourrissement affectant les pieds des poteaux de bardage et portiques en bois de la charpente a eu pour origine la fixation de ces éléments sur le béton brut, le carrelage de la piscine formant autour d'eux une cuvette dans laquelle s'écoulaient les eaux de lavage et de ruissellement ; que ce vice de construction résulte de l'installation de la charpente préalablement à l'exécution des formes de pente et de carrelage, et révèle une faute dans la coordination et la surveillance des travaux ; que les désordres ont été aggravés par la mise en place, autour des poteaux, à l'initiative de la direction départementale de l'équipement, de plinthes en aluminium ; que, par suite, le MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a déclaré l'Etat responsable de ces désordres et l'a condamné à supporter à hauteur de 20 %, le coût des réparations nécesssaires ;
En ce qui concerne les vitrages périphériques de la piscine :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, si les cassures affectant les vitrages périphériques de la piscine ne résultent pas d'un défaut de pose, elles ont pour origine l'insuffisante résistance mécanique du matériau utilisé ; que la responsabilité des dommages incombe par suite à la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, entreprise générale, qui a proposé ce type de vitrage, et aux maîtres d'oeuvre qui l'ont accepté sans étudier les contraintes auxquelles il serait soumis ; que toutefois, une part de responsabilité doit rester à la charge de la commune qui a accepté ce matériau en raison de la modicité de son coût ; que par suite, ni la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, ni le MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT, ni la commune de Scaer par la voie de l'appel incident, ne sont fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes les a condamnés à supporter les dépenses de remplacement des vitrages périphériques, à raison respectivement de 40 %, 30 % et 10 %, 20 % restant à la charge de l'architecte ;
Sur le préjudice :
Considérant que la piscine municipale de Scaer a été fermée du 15 décembre 1980 au 6 juillet 1982, en raison du danger que faisaient courir aux usagers les désordres affectant la charpente ; que la durée de cette interruption de fonctionnement a contraint la commune à faire procéder à une remise en état des installations de chauffage et de circulation d'eau ainsi qu'au remplacement de certains appareils ; que la commune de Scaer doit être indemnisée des dépenses afférentes à ces travaux ; qu'eu égard au faible délai qui s'est écoulé entre la réception définitive et la survenance des désordres ayant donné lieu au présent litige, il n'y a pas lieu d'appliquer aux dépenses exposées par le maître de l'ouvrage un abattement pour vétusté ; que, par suite, ni la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, ni le MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT ne sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a accordé à la commune de Scaer une indemnité de 39 195,57 F calculée sans application d'un abattement de vétusté ;

Considérant que les premiers juges n'ont pas fait une inexacte appréciation du trouble de jouissance subi par la commune de Scaer du fait de la fermeture de la piscine municipale pendant 18 mois, en fixant à 20 000 F l'indemnité qu'il lui est accordée de ce chef ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, le recours du MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT et le recours incident de la commune de Scaer sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DE GENIE CIVIL DE L'OUEST, au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace, à la commune de Scaer et aux héritiers de M. X....


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