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12/02/1992 | FRANCE | N°68864

France | France, Conseil d'État, 8 / 7 ssr, 12 février 1992, 68864


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 23 mai 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 24 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a déchargé M. X... des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1975 et 1976 dans les rôles de la commune de Jusix ;
2°) rétablisse M. X... au rôle de l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle au titre respectivement,

des années 1975 et 1976 et de l'année 1975 à raison de l'intégralité ...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré le 23 mai 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 24 janvier 1985 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a déchargé M. X... des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu qui lui ont été assignées au titre des années 1975 et 1976 dans les rôles de la commune de Jusix ;
2°) rétablisse M. X... au rôle de l'impôt sur le revenu et de la majoration exceptionnelle au titre respectivement, des années 1975 et 1976 et de l'année 1975 à raison de l'intégralité des droits qui lui avaient été assignés ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Meyerhoeffer, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vertu de l'article 69 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions des années 1974 à 1976, les exploitants agricoles dont les recettes annuelles de deux années consécutives dépassent 500 000 F pour l'ensemble de leurs exploitations sont obligatoirement imposés d'après leur bénéfice réel, à compter de la deuxième de ces années ;
Considérant que M. X..., agriculteur à Jusix, qui était imposé à l'impôt sur le revenu au titre des années 1974 à 1976 sous le régime du forfait agricole collectif, a déclaré au titre de la taxe sur la valeur ajoutée pour les années 1974 et 1975 un chiffre d'affaires d'un montant respectif de 556 416 F et 472 351 F ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, le vérificateur a estimé que M. X... avait volontairement repoussé au début du mois de janvier 1976 des encaissements de recettes concernant l'exercice précédent, a arrêté à 561 202 F le total desdites recettes et, estimant que M. X... ne relevait plus du régime du forfait, l'a taxé d'office pour défaut de la déclaration afférente au régime réel, au titre de 1975 sur un bénéfice fixé à 150 000 F ;
Considérant que l'administration prouve, en premier lieu, que la coopérative d'Albret et du Marmandais a établi, pour des livraisons de maïs et de légumes intervenues au mois d'octobre 1975, les bordereaux de livraisons correspondants, d'un montant total de 33 738,56 F et crédité aussitôt le compte courant ouvert au nom de M. X... dans ses écritures et que c'est à la demande de l'intéressé que cette écriture a été annulée pour être reportée dans les comptes de l'exercice ouvert le 1er anvier 1976 ; qu'elle prouve, en second lieu, que les établissements "Lescourgues" ont également établi le 6 novembre 1975, pour des achats de maïs-semences intervenus au mois d'octobre, le chèque correspondant, d'un montant de 42 524,28 F, à l'ordre de M. X... et que c'est à la demande expresse de ce dernier que l'envoi de ce chèque a été retardé pour être reporté au début du mois de janvier 1976 ; que, contrairement à ce que soutient M. X..., aucun litige n'existait entre lui et ses deux clients sur les opérations en cause ; que, par suite, ces deux sommes devaient être rattachées aux résultats de l'exercice clos le 31 décembre 1975 ;

Considérant qu'il suit de là que les recettes de M. X... se sont élevées en 1975, pour la deuxième année consécutive, à un montant supérieur à 500 000 F, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Bordeaux ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif et en appel ;
En ce qui concerne l'année 1975 :
Considérant qu'aux termes de l'article 3-II de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977 : "Les bases ou les éléments servant au calcul des impositions d'office sont portées à la connaissance du contribuable, trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions, au moyen d'une notification qui précise les modalités de leur détermination" ; que ces dispositions sont applicables aux impositions contestées, mises en recouvrement après le 1er janvier 1978 ;
Considérant que la notification de redressement adressée à M. X... le 21 décembre 1979 mentionnait seulement le texte appliqué et le montant du bénéfice imposable au titre de l'exercice clos le 31 décembre 1975 sans préciser les éléments ayant servi au calcul de ces bases d'imposition ni les modalités de leur détermination ; qu'ainsi le requérant est fondé à soutenir que les cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et la majoration exceptionnelle qui lui ont été assignées au titre de l'année 1975, ont été établies à la suite d'une procédure irrégulière ;
En ce qui concerne l'année 1976 :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que si M. X... a fait l'objet de deux vérifications, la première, consécutive à l'avis de vérification en date du 7 décembre 1979, a porté sur les exercices clos les 31 décembre 1975 et 1976 et la seconde, consécutive à l'avis de vérification en date du 7 août 1980, a porté sur les exercices clos les 31 décembre 1977, 1978 et 1979 ; que la circonstance que les redressements concernant l'exercice clos le 31 décembre 1976 n'ont été portés à la connaissance du contribuable que par une notification en date du 27 octobre 1980, en même temps que les redressements afférents aux exercices postérieurs, n'implique pas, par elle-même, que le vérificateur ait procédé à une double vérification pour la même imposition et le même exercice ; que M. X... n'est donc pas fondé à soutenir que le vérificateur a méconnu les dispositions susrappelées de l'article 1649 septies B du code général des impôts ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1649 septies A du code général des impôts, alors en vigueur : "Lorsque des redressements sont envisagés à l'issue d'une vérification de comptabilité, l'administration doit indiquer aux contribuables qui en font la demande les conséquences de leur acceptation éventuelle sur l'ensemble des droits et taxes dont ils sont ou pourraient devenir débiteurs." ; que ces dispositions ne sont applicables que dans le cas où le contribuable doit être invité à faire connaître s'il accepte les redressements envisagés et non lorsque, étant en situation d'imposition d'office, il doit seulement, en vertu des dispositions du II de l'article 3 de la loi n° 77-1453 du 29 décembre 1977, avoir connaissance des bases ou des éléments servant au calcul des impositions d'office ; que, dès lors, M. X... n'était pas en droit, à la suite de la notification de ses bases d'imposition au titre de l'année 1976, de demander à l'administration de lui fournir les indications prévues à l'article 1649 septies A précité ;

Considérant, enfin, que les pénalités afférentes à l'impôt sur le revenu établi au titre de 1976 n'étaient pas mentionnées dans la notification adressée au requérant le 27 octobre 1980 et n'ont donné lieu à aucun acte interruptif de prescription avant le 31 décembre 1980 ; que par suite M. X... est fondé à en demander la décharge ; que toutefois il y a lieu, dans la limite du montant desdites pénalités, d'y substituer les intérêts de retard ;
Considérant que le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, le tribunal administratif de Bordeaux a déchargé M. X... de l'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu mise à sa charge au titre de l'année 1976 ;
Article 1er : L'imposition supplémentaire à l'impôt sur le revenu assignée à M. X... au titre de 1976 est remise à sa charge. Elle sera assortie, dans la limite du montant des pénalités primitivement assignées, des intérêts de retard.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 24 janvier 1985 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre délégué au budget et à M. X....


Synthèse
Formation : 8 / 7 ssr
Numéro d'arrêt : 68864
Date de la décision : 12/02/1992
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES PROPRES AUX DIVERS IMPOTS - IMPOT SUR LE REVENU


Références :

CGI 69 A, 1649 septies B, 1649 septies A
Loi 77-1453 du 29 décembre 1977 art. 3


Publications
Proposition de citation : CE, 12 fév. 1992, n° 68864
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Meyerhoeffer
Rapporteur public ?: Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:68864.19920212
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