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17/02/1992 | FRANCE | N°50359

France | France, Conseil d'État, 10/ 3 ssr, 17 février 1992, 50359


Vu la décision en date du 13 février 1985, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur la requête de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES SAINRAPT ET BRICE (SGETPI), tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 22 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Limoges à lui verser la somme de 7 588 128 F correspondant à des sujétions imprévues survenues dans l'exécution du marché passé en vue de la construction du barrage de Mazeaud ; 2°) lui accorde les indemnités réclamé

es en première instance ; 3°) subsidiairement, ordonne une expert...

Vu la décision en date du 13 février 1985, par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur la requête de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES SAINRAPT ET BRICE (SGETPI), tendant à ce que le Conseil d'Etat : 1°) annule le jugement du 22 mars 1983 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la ville de Limoges à lui verser la somme de 7 588 128 F correspondant à des sujétions imprévues survenues dans l'exécution du marché passé en vue de la construction du barrage de Mazeaud ; 2°) lui accorde les indemnités réclamées en première instance ; 3°) subsidiairement, ordonne une expertise à l'effet de vérifier le montant des indemnités réclamées ; 4°) ordonne la capitalisation des intérêts échus à la date du dépôt du présent recours et courus depuis la requête introductive d'instance ; 5°) condamne la ville de Limoges en tous les dépens y compris les frais d'expertise éventuels, ordonné une expertise en vue de déterminer le volume exact des fouilles en terrain rocheux exécutées par la société pour la réalisation des travaux prévus au marché, les causes de la différence entre ce volume et celui qui était prévu par le devis estimatif, enfin les conséquences éventuelles de cette différence de volume sur le déroulement des travaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Pineau, Auditeur,
- les observations de Me Boulloche, avocat de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES SAINRAPT ET BRICE et de Me Boullez, avocat de la ville de Limoges,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;

Sur les sujétions imprévues :
Considérant qu'il ressort du rapport de l'expert désigné en exécution de la décision avant-dire-droit du Conseil d'Etat statuant au contentieux en date du 13 février 1985 que le volume des fouilles en terrain rocheux exécutées par la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES SAINRAPT ET BRICE pour la construction d'un barrage sur la Couze au lieudit "Le Mazeau" effectuée dans le cadre d'un marché sur série de prix passé par elle avec la commune de Limoges a été plus de cinq fois supérieur à celui qui était prévu par les pièces du marché ; que la différence de volume ainsi constatée, que les documents et études communiqués aux entreprises soumissionnaires, bien qu'ils aient été établis à partir de sondages géologiques en nombre suffisant, ne permettaient pas de déceler, doit être regardée, eu égard à la nature et à la disposition des éléments rocheux du sous-sol rencontré, comme ayant été imprévisible pour l'entreprise dans les circonstances de l'espèce ; que, par suite, la société SOGEA, qui vient aux droits de la SOCIETE GENERALE D'ENTREPRISES SAINRAPT ET BRICE et qui a repris l'instance engagée par celle-ci, est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges lui a refusé tout droit à indemnité au titre de cette sujétion imprévue ;
Sur l'indemnité due à l'entreprise :
Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que l'entreprise ne saurait prétendre à indemnité en ce qui concerne le volume de terrassements effectués en terrain rocheux, le dressement des parois rocheuses et le nettoyage des surfaces rocheuses avant bétonnage qui ont été rémunérés par application du prix unitaire du marché aux quantités réellement exécutées ; qu'aucune indemnité ne saurait non plus être allouée à l'entreprise pour la modification des installations de chantier, le déplacement de la centrale à béton et l'importance des arrivées d'eau, qui n'ont pas été affectés par la sujétion imprévue qu'elle a rencontrée dans l'exécution de ses travaux ; qu'en revanche, bien, que le "plan-cible" établi par l'entreprise prévoyant la construction du barrage en 13 mois soit dépourvu de valeur contractuelle et bien que l'entreprise ait terminé ses travaux trois mois avant l'expiration du délai de 24 mois fixé par le marché, l'accroissement imprévisible, dans les conditions susrappelées, du volume des terrassements en terrain rocheux a eu directement pour conséquence la prolongation de l'immobilisation des installations de chantier et du maintien sur le site du barrage en construction d'un personnel d'encadrement ; que, dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation de l'indemnité à laquelle l'entreprise peut prétendre à ce titre en condamnant la ville de Limoges à lui verser une indemnité complémentaire de 500 000 F ;
Sur les intérêts :

Considérant que la SOGEA a droit aux intérêts de la somme de 500 000 F, dans les conditions fixées par le marché, à compter de la date de l'enregistrement de sa demande au greffe du tribunal administratif de Limoges ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 4 mai 1983, 10 février 1989 et 18 juin 1990 ; qu'à ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que dès lors et conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit auxdites demandes de capitalisation ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu de mettre les frais d'expertise à la charge de la ville de Limoges ;
Article 1er : Le jugement en date du 22 mars 1983 du tribunal administratif de Limoges est annulé.
Article 2 : La ville de Limoges est condamnée à verser à la société SOGEA une somme de 500 000 F.
Article 3 : Cette somme portera intérêts à compter de la date de l'enregistrement de la demande au greffe du tribunal administratif de Limoges.
Article 4 : Les intérêts échus les 4 mai 1983, 10 février 1989 et 18 juin 1990 seront capitalisés à ces dates pour porter eux-mêmes intérêts.
Article 5 : Les frais d'expertise exposés devant le Conseil d'Etat sont mis à la charge de la ville de Limoges.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à la SOGEA, au bureau Coyne et Bellier, à la ville de Limoges et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace.


Synthèse
Formation : 10/ 3 ssr
Numéro d'arrêt : 50359
Date de la décision : 17/02/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-03-03-02 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION TECHNIQUE DU CONTRAT - ALEAS DU CONTRAT - IMPREVISION


Références :

Code civil 1154


Publications
Proposition de citation : CE, 17 fév. 1992, n° 50359
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pineau
Rapporteur public ?: Scanvic

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:50359.19920217
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