Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 26 juin et 25 octobre 1985, présentés par MM. Paul-Albert Y..., Jean-Charles Y... et X... Morvan, avocats, demeurant ... ; ils demandent que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 2 mai 1985 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté comme irrecevable leur demande tendant à l'annulation des articles 2 à 4 de l'arrêté en date du 5 janvier 1984 du préfet de Loire-Atlantique subordonnant l'autorisation de changement d'affectation d'un immeuble à usage d'habitation au paiement d'une compensation au profit de l'office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Nantes ;
2°) annule les articles 2 à 4 de l'arrêté préfectoral du 5 janvier 1984 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la construction ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Pineau, Auditeur,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.631-7 du code de la construction : "Dans les communes définies à l'article 10-7 de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948 modifiée : 1°- Les locaux à usage d'habitation ne peuvent être, ni affectés à un autre usage, ni transformés en meublés, hôtels, pensions de famille ou autres établissements similaires. Il ne peut être dérogé à ces interdictions que par autorisation administrative préalable et motivée, après avis du maire" ;
Considérant que, par un arrêté en date du 5 janvier 1984, le commissaire de la République du département de la Loire-Atlantique a autorisé MM. Paul-Albert et Jean-Charles Y... et M. X... Morvan, avocats à Nantes, à modifier l'affectation d'un appartement à usage d'habitation dont ils étaient locataires dans cette ville afin d'y installer leur cabinet ; que les articles 2, 3 et 4 de cet arrêté ont subordonné l'octroi de cette autorisation au paiement d'une compensation d'un montant de 95 166 F versée à l'office public d'habitations à loyer modéré de la ville de Nantes sous la forme d'un prêt sans intérêt d'une durée de quinze ans ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté comme irrecevable la demande dirigée par MM. Y... et Z... contre ces dispositions au motif qu'elles ne constituaient pas une décision détachable de l'autorisation elle-même et susceptible de faire l'objet d'un recours ;
Considérant que les dispositions des articles 2 à 4 de l'arrêté attaqué qui imposent les obligations financières ci-dessus analysées aux bénéficiaires de l'autorisation d'affecter à un autre usage des locaux à usage d'habitation, accordée sur le fondement des dispositions de l'article L.631-7 du cde de la construction, ne constituent pas avec cette autorisation un ensemble indivisible ; qu'elles sont par suite susceptibles de faire l'objet d'un recours contentieux indépendamment des autres dispositions de cette autorisation ; que, dès lors, le jugement entrepris encourt l'annulation ;
Considérant que, dans les circonstances de l'affaire, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de MM. Y... et de M. Z... ;
Considérant qu'aucune disposition de l'article L.631-7 précité du code de la construction ni aucune autre disposition législative alors en vigueur ne conférait à l'autorité administrative le pouvoir de subordonner l'autorisation prévue par ledit article au versement d'une compensation financière ; que, dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, MM. Y... et Z... sont fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir des articles 2 à 4 de l'arrêté attaqué ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 2 mai 1985 est annulé.
Article 2 : Les articles 2 à 4 de l'arrêté du préfet, commissaire de la République du département de la Loire-Atlantique, en date du 5 janvier 1984, sont annulés.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à MM. Paul-Albert et Jean-Charles Y..., à M. X... Morvan et au ministre de l'équipement, du logement, des transports et de l'espace.