La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/03/1992 | FRANCE | N°100756

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 13 mars 1992, 100756


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 août 1988 et 5 décembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE, dont le siège est ... ; l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE demande que le Conseil d'Etat annule un jugement en date du 2 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 23 juin 1987 et du ministre du travail du 17 juillet 1987 ayant autorisé le licenciement de Mme X..., déléguée syndicale et déléguée du personnel sup

pléante ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travai...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 5 août 1988 et 5 décembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE, dont le siège est ... ; l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE demande que le Conseil d'Etat annule un jugement en date du 2 juin 1988 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision de l'inspecteur du travail du 23 juin 1987 et du ministre du travail du 17 juillet 1987 ayant autorisé le licenciement de Mme X..., déléguée syndicale et déléguée du personnel suppléante ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Aguila, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 425-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, ... ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ... ; qu'aux termes de l'article L. 412-18 du même code : "Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail ..." ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions syndicales de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur les absences répétées pour maladie du salarié, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les absences de l'intéressé sont d'une importance suffisante pour justifier le licenciement compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail et des conditions de fonctionnement de l'entreprise ; qu'au nombre des règles applicables audit contrat appartiennent, lorsqu'elles existent, les conventions collectives auxquelles le contrat de travail fait référence ;
Considérant qu'aux termes de l'article 09.02.2.4. de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif dans sa rédaction issue de l'avenant du 16 septembre 1983, "a) En règle générale, une absence de moins de six mois pour maladie ne pourra entraîner le licenciement de l'agent concerné. Il ne pourra en être autrement que dans le cas où, sous peine de compromettre le fonctionnement d'un établissement ou d'un service, il apparaîtra indispensable de remplacer effectivement un agent malade et impossible de recourir, en ce qui le concerne, à un remplacement provisoire. b) Il pourra être procédé au licenciement d'un agent absent pour maladie à partir du moment où son absence aura excédé une durée continue de six mois. Il en sera de même à partir du moment où ses absences répétées auront excédé, pendant une période de douze mois consécutifs, une durée de cent quatre-vingts jours. Toutefois, il ne sera, pour l'application des dispositions édictées aux deux alinéas ci-avant, tenu aucun compte des absences, pour maladie, des femmes enceintes" ; et qu'aux termes de l'article 09.02.2.5. de la même convention, dans sa rédaction issue du même avenant, "a) licenciement au cours des périodes de suspension. Au cours des périodes de suspension définies à l'article 09.01.2.1. ci-dessus, l'employeur ne peut résilier le contrat de travail que s'il justifie soit d'une faute grave de l'intéressé, soit de l'impossibilité où il se trouve, pour un motif non lié à l'accident ou à la maladie, de maintenir ledit contrat. b) Licenciement à l'issue des périodes de suspension. Si, à l'issue des périodes de suspension définies à l'article 09.01.2.1., le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu, s'il ne peut lui proposer un autre emploi, de lui faire connaître par écrit les motifs qui s'opposent à son reclassement. L'employeur ne peut prononcer le licenciement d'un tel salarié que s'il justifie soit de l'impossibilité où il se trouve de lui proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article 09.01.2.4 ci-dessus, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions" ;

Considérant qu'il résulte clairement des stipulations ci-dessus reproduites que les absences pour maladie des femmes enceintes ne peuvent être prises en compte dans le calcul du seuil au-dessus duquel les absences peuvent entraîner le licenciement du salarié, et que la durée des absences du salarié victime d'un accident du travail, auquel doit être assimilé un accident de trajet, ne constitue pas par elle-même un motif légal de licenciement ;
Considérant que si les absences de Mme X..., agent hospitalier de l'hôpital Belle-Isle à Metz, déléguée syndicale et déléguée du personnel, ont, dans la période de 12 mois précédant l'ouverture de la procédure de licenciement, excédé une durée de cent-quatre-vingts jours, il ressort des pièces du dossier que la majeure partie de ces absences a été due à un accident de trajet ; qu'en outre, durant cette période, Mme X... s'est trouvée enceinte, et qu'à la suite d'une interruption de grossesse pour raison médicale, différentes hospitalisations ont été nécessaires ; que le nombre de jours d'absence de Mme X... pour maladie étrangère à sa grossesse a été inférieur à 180 jours au cours de la période de douze mois ci-dessus mentionnée ; qu'au surplus l'hôpital n'établit pas qu'il aurait été cependant indispensable de remplacer cet agent conformément au deuxième alinéa du a de l'article 09.02.2.4. susreproduit ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a annulé la décision précitée du 23 juin 1987 par laquelle l'inspecteur du travail de la Moselle, faisant application à l'intéressée de la convention nationale mentionnée ci-dessus, a autorisé l'hôpital Belle-Isle à la licencier ;
Article 1er : La requête de l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'ASSOCIATION L'HOPITAL BELLE-ISLE, à Mme X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 1 / 4 ssr
Numéro d'arrêt : 100756
Date de la décision : 13/03/1992
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04,RJ1 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION -Motifs pouvant légalement servir de base à une autorisation de licenciement - Atteinte au fonctionnement normal de l'entreprise - Absences prolongées - Absences de longue durée clairement prévues par les stipulations d'une convention collective (1).

66-07-01-04 Il résulte clairement des stipulations de la convention collective nationale des établissements privés d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif dans sa rédaction issue de l'avenant du 16 septembre 1983, que les absences pour maladie des femmes enceintes ne peuvent être prises en compte dans le calcul du seuil au-dessus duquel les absences peuvent entraîner le licenciement du salarié, et que la durée des absences du salarié victime d'un accident du travail, auquel doit être assimilé un accident de trajet, ne constitue pas par elle-même un motif légal de licenciement. En conséquence, illégalité de l'autorisation de licenciement de Mme S., agent hospitalier de l'hôpital Belle-Isle à Metz, déléguée syndicale et déléguée du personnel, dont le nombre de jours d'absence pour maladie étrangère à sa grossesse a été inférieur à 180 jours pendant une période de douze mois consécutifs, durée qui aurait légalement fondé la décision.


Références :

Code du travail L425-1, L412-18

1.

Cf. 1987-03-06, Mme Deboos, p. 978


Publications
Proposition de citation : CE, 13 mar. 1992, n° 100756
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Aguila
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:100756.19920313
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award