Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 31 mai 1990 et 1er octobre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'association "LA VACHE A LAIT QUI REFUSE DE SE LAISSER TRAIRE", dont le siège social est ... et M. Jean-Bernard X..., demeurant ... ; l'association et M. X... demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 30 mars 1990 fixant le taux des cotisations dues par les employeurs et travailleurs indépendants au titre des prestations familiales ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 89-18 du 13 janvier 1989, et notamment son article 7 ;
Vu le décret n° 89-48 du 27 janvier 1989 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Charzat, ,
- les observations de la SCP Defrenois, Levis, avocat de l'association "LA VACHE A LAIT QUI REFUSE DE SE LAISSER TRAIRE" et de M. X...,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes du IV de l'article 7 de la loi du 13 janvier 1989 portant diverses mesures d'ordre social : "Par dérogation aux articles L. 241-6 et L. 242-11 du code de la sécurité sociale, les cotisations d'allocations familiales dues par les employeurs et travailleurs indépendants non salariés non agricoles sont assises pour partie sur l'intégralité de leur revenu professionnel et pour partie dans la limite d'un plafond. Ce plafond et les taux applicables sont fixés par décret" ; que le décret attaqué du 30 mars 1990, qui détermine les taux des cotisations d'allocations familiales dues au titre de l'année 1990 par les employeurs et travailleurs indépendants est intervenu sur le fondement des dispositions législatives précitées ; que, dès lors, le moyen de la requête tiré de ce que ces cotisations auraient le caractère d'un prélèvement de nature fiscale et de ce que, par suite, leur taux n'aurait pu, en vertu de l'article 34 de la Constitution, être légalement fixé par voie réglementaire, ne saurait, en tout état de cause, étre accueilli ;
Considérant que si les requérants soutiennent que le décret attaqué aurait dû être pris après consultation des organismes de sécurité sociale des travailleurs non salariés non agricoles, ils n'invoquent au soutien de cette allégation la méconnaissance d'aucune disposition ;
Considérant que si l'article 33 de la 6ème directive n° 77/338 du 17 mai 1977 des communautés européennes interdit aux Etats d'introduire dans leur législation des taxes ou impôts ayant le caractère d'une taxe sur le chiffre d'affaires, les cotisations dont les taux sont fixé par le décret attaqué sont assises sur les revenus et non sur le chiffre d'affaires des professionnels intéressés ; qu'ainsi les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les objectifs de cette directive auraient été méconnus ;
Considérant que si les requérants invoquent l'incompatibilité avec le marché commun des cotisations d'allocations familiales instituées par le décret du 30 mars 1990, les stipulations de l'article 92 du Traité du 25 mars 1957 instituant la communauté économique européenne ne créent pas pour les particuliers de droits dont ceux-ci puissent se prévaloir devant une juridiction nationale ;
Considérant qu'il résulte clairement de l'article 93 du Traité instituant la communauté économique européenne que la fixation des taux de cotisations personnelles d'allocations familiales concernant les employeurs et travailleurs indépendants ne constitue pas l'une des "aides" visées par cet article ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de ces stipulations ne peuvent être accueillis ;
Considérant qu'alors même qu'il aurait pour effet d'alourdir les charges pesant sur certains travailleurs indépendants et d'alléger les charges d'autres entreprises, le décret attaqué, pris pour l'application des mesures de "déplafonnement" de l'assiette des cotisations d'allocations familiales prévues par l'article 7 de la loi du 13 janvier 1989, n'est pas entaché d'une méconnaissance illégale du principe d'égalité ;
Considérant qu'en application de l'article L. 242-11 du code de la sécurité sociale les cotisations d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants des professions non agricoles sont assises sur le revenu professionnel annuel ; qu'elles sont calculées chaque année, à titre provisionnel, en fonction des revenus de l'avant-dernière année et font ensuite l'objet d'une régularisation lorsque le revenu professionnel est définitivement connu ; qu'ainsi le décret attaqué du 30 mars 1990 qui fixe les taux des cotisations dues " au titre de l'année 1990" n'est entaché d'aucune rétroactivité ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret du 30 mars 1990 ;
Article 1er : La requête de l'association "LA VACHE A LAIT QUI REFUSE DE SE LAISSER TRAIRE" est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association "LA VACHE A LAIT QUI REFUSE DE SE LAISSER TRAIRE", à M. X..., au Premier ministre et au ministre des affaires sociales et de l'intégration.