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15/05/1992 | FRANCE | N°111258

France | France, Conseil d'État, 6 ss, 15 mai 1992, 111258


Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.), ayant son siège ..., représenté par son président en exercice régulièrement mandaté ; le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.) demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 août 1989 par lequel le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement a autorisé la capture de 400 000 alouettes des champs au moyen de pantes et de matoles dans le département des

Landes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 79-...

Vu la requête, enregistrée le 31 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.), ayant son siège ..., représenté par son président en exercice régulièrement mandaté ; le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.) demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 31 août 1989 par lequel le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre, chargé de l'environnement a autorisé la capture de 400 000 alouettes des champs au moyen de pantes et de matoles dans le département des Landes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la directive n° 79-409 du conseil de la Communauté Economique Européenne ;
Vu la convention de Paris du 19 mars 1902 ;
Vu la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 ;
Vu le code rural et notamment ses articles 373 et 376 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Touraine-Reveyrand, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs,
- les conclusions de Mme de Saint-Pulgent, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'intervention de l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs :
Considérant que l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs a intérêt au maintien de l'arrêté attaqué ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité de l'arrêté attaqué :
Considérant que la convention internationale du 19 mars 1902 a pour objet la protection des oiseaux utiles à l'agriculture, dont elle fixe la liste dans une annexe ; que cette liste ne comporte aucune des espèces d'oiseaux qui font l'objet de chasses traditionnelles et ne comporte notamment pas les alouettes dont la chasse est réglementée par l'arrêté attaqué ; qu'ainsi et, en tout état de cause, cette convention est inapplicable en l'espèce ;
Considérant que si l'association requérante soutient que l'arrêté attaqué aurait été pris en contradiction avec la directive de la communauté européenne, en date du 2 avril 1979, relative à la conservation des oiseaux sauvages, il résulte de l'arrêt de la cour de justice des communautés européennes en date du 27 avril 1988 que la réglementation française qui autorise la chasse de l'alouette au moyen de pantes ou de matoles constitue une dérogation à l'article 8 de la directive, régulièrement notifiée à la commission en application de l'article 9, paragraphe 4, et justifiée au regard des dispositions de l'article 9, paragraphe 1 c), de ladite directive ; qu'ainsi ce moyen ne saurait être accueilli ;
Considérant que les alouettes ne figurent pas sur la liste des espèces animales devant bénéficier d'une protection intégrale, dressée par l'arrêté du ministre de l'environnement en date du 17 avril 1981, pris pour l'application de l loi du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature ; que l'arrêté attaqué a été pris en application des arrêtés du 17 août 1989 relatifs à la chasse à l'alouette des champs au moyen de pantes ou de matoles dans certains départements, dont le département des Landes, qui disposent que "tout gibier autre que l'alouette des champs capturé accidentellement est relaché immédiatement" ; qu'il s'en suit que la chasse susmentionnée présente un caractère sélectif ; qu'ainsi les dispositions de l'article 3 de la loi précitée n'ont pas été méconnues ;

Considérant qu'aux termes de l'article 373 du code rural, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, "dans le temps où la chasse est ouverte, le permis donne à celui qui l'a obtenu le droit de chasser de jour, soit à tir, soit à courre, à cor et à cri, soit au vol, suivant les distinctions établies par des arrêtés du ministre de l'agriculture, sur ses propres terres et sur les terres d'autrui avec le consentement de celui à qui le droit de chasse appartient. Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la chasse de certains oiseaux de passage en petites quantités, le ministre chargé de la chasse autorise, dans les conditions qu'il détermine, l'utilisation des modes et moyens de chasse consacrés par les usages traditionnels, dérogatoires à ceux autorisés par l'alinéa précédent" ; qu'aux termes de l'article 376 du code rural : "Seront punis d'une amende ... et pourront, en outre, l'être d'un emprisonnement ... 3°) ceux qui seront détenteurs ou ceux qui seront trouvés munis ou porteurs, hors de leur domicile, de filets, engins ou autres instruments de chasse prohibés" ;
Considérant, premièrement, qu'il ressort des pièces du dossier que la chasse à l'alouette des champs au moyen tant de pantes que de matoles constitue dans le département des Landes un moyen de chasse consacré par les usages traditionnels ;
Considérant, deuxièmement, que l'usage de filets n'est pas, en tant que tel incompatible avec une capture globale portant sur de petites quantités ; que l'arrêté fixe à 400 000 oiseaux le nombre maximum d'alouettes dont la capture est autorisée pendant la période de chasse considérée ; qu'il n'est pas contesté que ce chiffre ne représente qu'un faible pourcentage de la population concernée ; qu'ainsi le ministre n'a pas méconnu l'obligation de n'autoriser la chasse que pour de petites quantités ;

Considérant, troisièmement, que l'usage d'appelants, l'utilisation de filets aux mailles de dimensions adaptées, l'obligation enfin de relâcher tout gibier autre que l'alouette des champs capturé accidentellement, confèrent à ce mode de chasse un caractère sélectif ;
Considérant, quatrièmement, que d'une part, l'arrêté attaqué prévoit que le préfet est chargé de son exécution et d'autre part fixe le nombre de pantes par installation et le nombre de matoles par exploitation ; qu'il détermine aussi les conditions dans lesquelles une modification dans l'implantation des pantes peut intervenir ; que ces mesures, combinées à celle précedemment mentionnée qui fixe le nombre maximum de prises autorisées et à celles de l'article 9 de l'arrêté du 17 août 1989 relatif à la capture de l'alouette des champs au moyen de matoles dans les départements des Landes, du Lot-et-Garonne et du Tarn-et-Garonne ainsi qu'à celles de l'article 10 de l'arrêté du 17 août 1987 relatif à la capture de l'alouette des champs au moyen de pantes dans les départements de la Gironde, des Landes, du Lot-et-Garonne et des Pyrénées-Atlantiques, permettent un contrôle strict des modes de chasse autorisés ; que si l'association requérante allègue que l'administration ne serait pas en mesure d'exercer un contrôle sur l'application de ces dispositions, cette circonstance, à la supposer établie, serait sans influence sur la légalité desdites dispositions ; qu'ainsi, l'arrêté attaqué ne méconnaît pas les dispositions de l'article 373, alinéa 2, précité du code rural ;

Considérant que, de tout ce qui précède il résulte que le RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.) n'est pas fondé à demander, l'annulation de l'arrêté ministériel du 31 août 1989 relatif à la capture de l'alouette des champs au moyen de pantes et de matoles pendant la campagne 1989-1990 dans le département des Landes ;
Article 1er : L'intervention de l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs est admise.
Article 2 : La requête du RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.) est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au RASSEMBLEMENT DES OPPOSANTS A LA CHASSE (R.O.C.), à l'union nationale des fédérations départementales de chasseurs et au ministre de l'environnement.


Synthèse
Formation : 6 ss
Numéro d'arrêt : 111258
Date de la décision : 15/05/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

AGRICULTURE - CHASSE - REGLEMENTATION.

COMMUNAUTES EUROPEENNES - APPLICATION PAR LE JUGE ADMINISTRATIF FRANCAIS DES REGLES DE DROIT COMMUNAUTAIRES - PRISE EN COMPTE DES DECISIONS DE LA COUR DE JUSTICE - INTERPRETATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE.


Références :

CEE Directive 409-79 du 02 avril 1979 Conseil conservation oiseaux sauvages art. 7 par. 4
Code rural 373, 376
Loi 76-629 du 10 juillet 1976 art. 3


Publications
Proposition de citation : CE, 15 mai. 1992, n° 111258
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Touraine-Reveyrand
Rapporteur public ?: Mme de Saint-Pulgent

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:111258.19920515
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