Vu la requête, enregistrée le 19 juin 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES, dont le siège social est ..., représentée par son directeur en exercice ; la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 21 mars 1989 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande contre la décision du 12 juillet 1988 de l'inspecteur du travail des Hautes-Pyrénées par intérim, qui lui a refusé l'autorisation de licencier M. Joseph Y..., délégué du personnel suppléant, de son emploi de conducteur d'installation,
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Laroque, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Blondel, avocat de la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES,
- les conclusions de M. Kessler, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.425-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel, titulaire ou suppléant, est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement. Lorsqu'il n'existe pas de comité d'entreprise dans l'établissement, l'inspecteur du travail est saisi directement ..." ;
Considérant qu'en vertu des dispositions susvisées, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêts général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive e soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Sur la légalité externe :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que par une décision du 10 janvier 1985, publiée au recueil des actes administratifs du département des Hautes-Pyrénées, M. X... qui avait la qualité d'inspecteur du travail, a été régulièrement habilité à assurer l'intérim de l'inspecteur du travail, chef du service départemental de l'inspection du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole, en cas d'absence ou d'empêchement de ce dernier ; qu'il suit de là que la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES, qui n'établit pas que le chef du service départemental du travail, de l'emploi et de la politique sociale agricole n'aurait pas été en situation d'absence ou d'empêchement, n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée en date du 12 juillet 1988 refusant d'autoriser le licenciement de M. Y... était entachée d'incompétence ;
Sur la légalité interne :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Y... a pris quatre jours de congés payés du 24 mai au 28 mai 1988, puis deux jours de congés de récupération les 30 et 31 mai 1988 ; que ces congés n'avaient pas été autorisés selon les formes prévues par une note de service du 21 octobre 1976 et une circulaire du 2 octobre 1981, l'intéressé n'ayant reçu qu'un accord verbal de son chef de centre ; que si ces faits étaient constitutifs d'une faute professionnelle, celle-ci n'était pas d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de l'intéressé ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 12 juillet 1988 susvisée ;
Article 1er : La requête de la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la COOPERATIVE AGRICOLE DEPARTEMENTALE DES HAUTES-PYRENEES et au ministre de l'agriculture et de la forêt.