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29/05/1992 | FRANCE | N°109749

France | France, Conseil d'État, 4 / 1 ssr, 29 mai 1992, 109749


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 août 1989 et 8 décembre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un jugement en date du 15 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 30 avril 1987 par laquelle le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé la décision du 8 décembre 1986 de l'inspecteur du travail de la Gironde refusant d'autoriser la société G

AN-vie à le licencier ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 août 1989 et 8 décembre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Philippe X..., demeurant ... ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler un jugement en date du 15 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre la décision du 30 avril 1987 par laquelle le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé la décision du 8 décembre 1986 de l'inspecteur du travail de la Gironde refusant d'autoriser la société GAN-vie à le licencier ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi du 20 juillet 1988 portant amnistie ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Hirsch, Auditeur,
- les observations de la SCP Coutard, Mayer, avocat de M. Philippe X... et de Me Baraduc-Bénabent, avocat de la compagnie d'assurances GAN-Vie,
- les conclusions de M. Kessler, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant que l'intervention de la loi d'amnistie du 20 juillet 1988 est sans influence sur la légalité de la décision du ministre du travail en date du 30 avril 1987 annulant la décision de l'inspecteur du travail refusant le licenciement de M. X... ;
Considérant que cette décision du 30 avril 1987 a été prise sur un recours hiérarchique formé par l'entreprise GAN-vie lequel a été reçu par le ministre du travail le 31 décembre 1986 ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que ette décision aurait été prise après l'intervention d'une décision implicite de rejet du recours hiérarchique manque en fait ;

Considérant que le ministre, saisi d'un recours hiérarchique contre la décision de l'inspecteur du travail, n'était pas tenu de procéder à une enquête contradictoire ; que le moyen tiré de la violation de l'article L. 122-41 du code du travail est inopérant à l'encontre d'une décision prise sur le fondement de l'article L. 122-14 dudit code ; que, par suite, et en tout état de cause, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision du ministre du travail serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière ;
Considérant toutefois que pour autoriser le licenciement de M. X... par la société GAN-vie, le ministre des affaires sociales et de l'emploi s'est fondé sur la violation par ce salarié des dispositions d'un accord d'entreprise du 27 juin 1983 concernant l'exercice du droit syndical dans cette entreprise ; que, lorsqu'une contestation sérieuse s'élève sur la validité des stipulations d'un tel accord, la juridiction administrative compétemment saisie d'un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative autorisant le licenciement d'un salarié protégé, est tenue, eu égard au caractère de droit privé que présente l'accord d'entreprise, de renvoyer à l'autorité judiciaire l'examen de cette question préjudicielle ;
Considérant que le requérant soutient que les stipulations de l'article 9 de l'accord d'entreprise du 27 juin 1983 qui, en contrepartie de mesures plus favorables que celles du code du travail, limitent à la moitié de leur temps de travail les crédits d'heures dont peuvent bénéficier les salariés investis de fonctions représentatives au titre de leurs mandats sont notamment contraires aux dispositions de l'article L. 132-4 du code du travail ; que ce moyen, qui commande la solution du litige soumis au Conseil d'Etat, soulève une contestation sérieuse ; qu'il y a lieu, dès lors, pour le Conseil d'Etat, de surseoir à statuer sur la requête jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la validité des stipulations susmentionnées ;
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M.MARTINIE dirigée contre le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 15 décembre 1988 jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur la légalité de l'article 9 de l'accord d'entreprise en date du 27 juin 1983 concernant l'exercice du droit syndical au GAN-vie et au GAN incendie accidents. M. X... devra justifier dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, de sa diligence à saisir de cette question la juridiction compétente.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... , àla société GAN-vie et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 4 / 1 ssr
Numéro d'arrêt : 109749
Date de la décision : 29/05/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

COMPETENCE - COMPETENCES CONCURRENTES DES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - CONTENTIEUX DE L'INTERPRETATION - CAS OU UNE QUESTION PREJUDICIELLE S'IMPOSE.

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - QUESTION PREJUDICIELLE POSEE PAR LE JUGE ADMINISTRATIF.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR FAUTE.


Références :

Code du travail L122-41, L122-14, L132-4
Loi 88-828 du 20 juillet 1988


Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 1992, n° 109749
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Hirsch
Rapporteur public ?: Kessler

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:109749.19920529
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