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19/06/1992 | FRANCE | N°76455

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 19 juin 1992, 76455


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 mars 1986 et 8 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN, dont le siège social est ..., représentée par ses dirigeants en exercice ; la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 décembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme X..., la décision du 6 août 1984 de l'inspecteur du travail du 8ème arrondissement de Paris ayant autorisé son lic

enciement pour motif économique ;
2°) rejette la demande présentée ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 mars 1986 et 8 juillet 1986 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN, dont le siège social est ..., représentée par ses dirigeants en exercice ; la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 10 décembre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé, à la demande de Mme X..., la décision du 6 août 1984 de l'inspecteur du travail du 8ème arrondissement de Paris ayant autorisé son licenciement pour motif économique ;
2°) rejette la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris,
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Piveteau, Auditeur,
- les observations de Me Vuitton, avocat de la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN,
- les conclusions de M. Lamy, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité de la demande de première instance :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article R.436-4 dernier alinéa du code du travail dans sa rédaction issue du décret du 8 juin 1983, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement d'un délégué du personnel est notifiée à l'employeur et au salarié par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ;
Considérant que si, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 14 août 1984, la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN a informé Mme X... de son licenciement pour motif économique, cette lettre ne faisait que se référer à la décision d'autorisation délivrée le 6 août 1984 par l'inspecteur du travail ; qu'elle ne fournissait pas les éléments suffisants sur le contenu de l'acte attaqué, notamment sa motivation, pour en constituer la notification complète et régulière ; qu'ainsi cette lettre n'a pas eu pour effet, de faire courir, à l'encontre du salarié, les délais de recours contentieux ; que, dès lors, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que le recours de Mme X... déposé devant le tribunal administratif de Paris le 11 janvier 1985 aurait été irrecevable ;
Au fond :
Considérant qu'aux termes de l'article L.425-1 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi du 28 octobre 1982 : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un délégué du personnel titulaire ou suppléant ... ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ;
Considérant qu'en vertu de ces dispositions les salariés légalement investis d'un mandat de délégué du personnel bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de cessalariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme X..., employée par la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN en qualité de comptable depuis 1965, exerçait son activité au ... (8ème) ; qu'une restructuration du service comptable de la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN et son regroupement avec d'autres services situés à Nanterre étaient envisagés ; que son employeur a alors demandé à Mme X... par lettre du 29 mai 1984 d'exercer dorénavant son activité à Nanterre ; que l'intéressée, élue déléguée du personnel le 19 avril 1984, a refusé cette mutation ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN a alors demandé l'autorisation de licencier Mme X... pour un motif de caractère exclusivement économique ; qu'il résulte de l'instruction que l'autorisation, délivrée le 6 août 1984 par l'inspecteur du travail de la section n° 8 A de Paris, était fondée sur l'existence d'une faute personnelle, sans qu'il ait été procédé au contrôle de la réalité du motif économique ni à l'analyse de la procédure de reclassement suivie par la société ; que dès lors, l'inspecteur du travail a commis une erreur de droit en autorisant le licenciement de Mme X... ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN n'est pas fondée à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé la décision autorisant le licenciement de Mme X... ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE S.C.A.R.P. PARFUMS CARVEN, à Mme X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 76455
Date de la décision : 19/06/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR DE DROIT - EXISTENCE.

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE.


Références :

Code du travail R436-4, L425-1
Décret 83-470 du 08 juin 1983
Loi 82-915 du 28 octobre 1982


Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 1992, n° 76455
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Piveteau
Rapporteur public ?: Lamy

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:76455.19920619
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