Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 20 avril 1988 et 17 août 1988, présentés pour M. Robert Z..., demeurant 228, H.L.M. Laurentine Y... à Château-du-Loir (72500) et M. Michel X..., demeurant "Bel Air" Luceau à Château-du-Loir (72500) ; M. Z... et M. X... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 31 décembre 1987 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande dirigée contre les décisions du 17 novembre 1986 par lesquelles le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé les décisions de l'inspecteur du travail en date du 7 juillet 1986 et a autorisé le licenciement pour motif économique des intéressés, salariés protégés ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. de la Ménardière, Maître des requêtes,
- les observations de Me Luc-Thaler, avocat de M. Robert Z... et de M. Michel X...,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :
Considérant qu'en vertu des dispositions des articles L.425-1 et L.436-1 du code du travail, les salariés légalement investis des mandats de délégué du personnel et de membre du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ;
Considérant que l'inspecteur du travail ayant le 7 juillet 1986 refusé d'autoriser le licenciement de M. Z... délégué du personnel, représentant syndical au comité central d'entreprise et délégué syndical et de M. X... délégué du personnel, le ministre des affaires sociales et de l'emploi a sur recours hiérarchique de la société Promecam-Sisson-Lehmann, autorisé par deux décisions du 17 novembre 1986 lesdits licenciements ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'après la suppression de la section outillage de son établissement de Château du Loir, la société a pu reclasser plusieurs salariés de cette section dans d'autres services, alors qu'elle n'établit pas avoir proposé ni même recherché un poste de reclassement pour M. Z... et M. X..., et qu'elle n'établit pas non plus que la qualification professionnelle des intéressés faisait obstacle à leur reclssement ; que dès lors, M. Z... et M. X... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à l'annulation des décisions du 17 novembre 1986 par lesquelles le ministre des affaires sociales et de l'emploi a annulé les décisions de l'inspecteur du travail en date du 7 juillet 1986 refusant le licenciement de M. Z... et de M. X... et a autorisé la société Promecam-Sisson-Lehmann à licencier les requérants, salariés protégés ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 31 décembre 1987 est annulé.
Article 2 : Les décisions du ministre des affaires sociales et de l'emploi en date du 17 novembre 1986 sont annulées en tant qu'elles autorisent la société Promecam-Sisson-Lehmann à licencier M. Z... et M. X....
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Z..., à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.