Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 8 mars 1990 et 22 juin 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Luc X..., pharmacien, demeurant Centre Commercial Cora à Bruay-Labuissière (62700) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°/ d'annuler le jugement du 26 décembre 1989 du tribunal administratif de Lille annulant la décision implicite par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a rejeté la demande, présentée par Mme Christine Z...
Y..., de retrait d'octroi d'une licence d'ouverture d'une officine de pharmacie au profit de M. X... et l'arrêté du 28 juin 1988 du préfet du Pas-de-Calais accordant à M. X... une licence d'exploitation d'une officine de pharmacie ;
2°/ de rejeter la demande présentée par Mme Lenfant Y... devant le tribunal administratif de Lille ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique, notamment son article L. 575 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Aguila, Auditeur,
- les observations de Me Parmentier, avocat de M. Jean-Luc X...,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Sur la recevabilité des conclusions de première instance :
Considérant que le recours gracieux présenté par Mme Lenfant Y... auprès du préfet du Pas-de-Calais contre l'arrêté préfectoral du 28 juin 1988 a été formé le 25 août 1988, soit dans le délai de recours contentieux ; que l'absence de réponse de l'autorité administrative sur ce recours gracieux a fait naître le 25 décembre 1988 une décision implicite de rejet que Mme Lenfant Y... pouvait déférer à la juridiction administrative dans le délai de deux mois ; qu'ainsi, la demande enregistrée le 22 février 1989 au tribunal administratif de Lille était recevable ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 575 du code de la santé publique : "Le pharmacien doit être propriétaire de l'officine dont il est titulaire ... (il) ne peut être propriétaire ou copropriétaire que d'une seule officine", et qu'en vertu de l'article L. 570 du même code : " ... Sauf le cas de force majeure constaté par le ministre de la santé publique et de la population sur avis du préfet et du conseil supérieur de la pharmacie, une officine ne peut être cédée avant l'expiration d'un délai de cinq ans, qui court à partir du jour de son ouverture ..." ; qu'il résulte nécessairement de la combinaison de ces dispositions que le pharmacien qui a ouvert depuis moins de cinq ans une officine de pharmacie ne peut légalement obtenir la délivrance d'une licence pour la création d'une autre officine s'il n'a pas, au préalable, fait constater par le ministre chargé de la santé l'existenc d'un cas de force majeure lui permettant de céder son officine avant l'expiration du délai de cinq ans susmentionné ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X... avait ouvert le 4 septembre 1985 une officine de pharmacie à Carvin, rue Florent Evrard, et que lorsqu'il a sollicité le 12 novembre 1987 une licence pour l'ouverture d'une officine de pharmacie au centre commercial Cora à Bruay-Labuissière, il n'était pas titulaire d'une décision du ministre de la santé constatant l'existence d'un cas de force majeure l'autorisant à céder son officine de Carvin avant l'expiration du délai de cinq ans à compter du jour de son ouverture ; qu'il n'était pas davantage titulaire d'une telle décision le 28 juin 1988, date à laquelle le préfet du Pas-de-Calais lui a délivré l'autorisation demandée ; que dès lors, cette autorisation a été délivrée en méconnaissance des dispositions précitées du code de la santé publique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a, d'une part, annulé l'arrêté du préfet du Pas-de-Calais du 28 juin 1988 accordant une licence pour l'ouverture d'une pharmacie au centre commercial Cora à Bruay-Labuissière à M. X..., et d'autre part, annulé la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par Mme Lenfant Y... le 25 août 1988 ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X..., à Mme Lenfant Y..., au préfet du Pas-de-Calais et au ministre de la santé et de l'action humanitaire.