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09/12/1992 | FRANCE | N°135967

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 09 décembre 1992, 135967


Vu, 1°) sous le n° 135 967, la protestation enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er avril 1992, présentée pour M. Jean-Marie Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
- annule l'élection de M. Jean-Jacques X... au conseil régional de la région Limousin qui s'est déroulée le 22 mars 1992 dans le département de la Haute-Vienne ;
- proclame M. Philippe Z... élu ;
- annule par voie de conséquence l'élection de M. Robert Savy à la présidence du conseil régional de la région Limousin qui s'est déroulée le 27 mars 1992 ;<

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Vu, 1°) sous le n° 135 967, la protestation enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er avril 1992, présentée pour M. Jean-Marie Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
- annule l'élection de M. Jean-Jacques X... au conseil régional de la région Limousin qui s'est déroulée le 22 mars 1992 dans le département de la Haute-Vienne ;
- proclame M. Philippe Z... élu ;
- annule par voie de conséquence l'élection de M. Robert Savy à la présidence du conseil régional de la région Limousin qui s'est déroulée le 27 mars 1992 ;
Vu, 2°) sous le n° 135 968, la protestation enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 1er avril 1992, présentée pour M. Jean-Marie Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat annule l'élection de M. Robert A... à la présidence du conseil régional qui s'est déroulée le 27 mars 1992 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la loi n° 91-641 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code électoral ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Bachelier, Maître des requêtes,
- les observations de Me Cossa, avocat de M. Jean-Marie Y... et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Robert A...,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les protestations de M. Y... sont dirigées contre l'élection de M. X... au conseil régional de la région Limousin le 22 mars 1992 et, par voie de conséquence, contre l'élection de M. A... à la présidence de ce conseil régional le 27 mars suivant ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'élection de M. X... :
Sur les griefs relatifs à la composition des bureaux de vote et au déroulement des opérations électorales :
Considérant, d'une part, que, contrairement à ce que soutient M. Y..., le nom du président du bureau n° 81 est porté sur le procès-verbal ; que, d' les dispositions des articles R. 42 à R. 44 du code électoral ont été méconnues dans le bureau n° 349 aux motifs que le secrétaire était un employé municipal, que le bureau a été tenu entre 12 h et 14 h par une personne qui n'en était pas membre et que les assesseurs désignés par la liste qu'il conduisait dans le département de la Haute-Vienne en ont été exclus, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ses allégations dont le procès-verbal ne fait d'ailleurs pas mention ;
Sur les griefs relatifs aux feuilles de pointage :
Considérant que l'inobservation des dispositions des articles L. 65 et R. 65 à R. 66-1 du code éléctral relative aux opérations de dépouillement et notamment aux modalités d'établissement des feuilles de pointage n'est de nature à justifier l'annulation de l'élection que si elle a eu pour but ou pour conséquence de porter atteinte à la sincérité des résultats ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les irrégularités alléguées par M. Y..., qui n'ont fait l'objet ni d'observations aux procès-verbaux des bureaux de vote ni de réclamations à la commission de recensement des votes, auraient eu pour objet de favoriser une fraude ou pour effet, en raison de leur nombre, d'altérer les résultats du scrutin dans le département de la Haute-Vienne ;
Sur les griefs relatifs aux procès-verbaux :

Considérant, en premier lieu, que la circonstance que les procès-verbaux de plusieurs bureaux de vote ne mentionnent pas le nom ou le nombre de scrutateurs ou ne fassent état que d'un nombre de ces derniers insuffisant au regard des dispositions de l'article L. 65 du code électoral n'est pas de nature en l'espèce à vicier le résultat du scrutin dans ces bureaux ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. Y... soutient que dans 39 bureaux, les procès-verbaux auraient été rédigés par plusieurs personnes et non par le secrétaire du bureau ainsi que le prévoit l'article R. 67 du code électoral, il n'est pas établi ni même allégué que des manoeuvres ou des fraudes auraient été commises et seraient de nature à altérer la sincérité du scrutin ;
Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, les procès-verbaux des bureaux 181 et 218 sont signés par le président, les assesseurs et les membres du bureau ;
Considérant, en quatrième lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne fait obligation au bureau électoral de réunir les bulletins nuls dans une enveloppe de récapitulation pour la joindre au procès-verbal ;
Considérant, en cinquième lieu, que s'il est soutenu que les procès-verbaux sont mal rédigés dans 20 bureaux, ce grief est insuffisamment précisé pour permettre au juge d'en apprécier la portée ;
Considérant, en sixième lieu, qu'il résulte de l'instruction que les corrections apportées à plusieurs procès-verbaux, qui n'ont au demeurant donné lieu à aucune observation sur ces documents, sont relatives à la rectification de simples erreurs matérielles et n'ont eu, en raison de leur nature et en l'absence de toute manoeuvre, aucune incidence sur les résultats du scrutin ;

Considérant, enfin, qu'à la supposer établie, la circonstance que les procès-verbaux des différents bureaux de vote de la ville de Limoges auraient été transmis tardivement au bureau centralisateur de cette ville puis à la préfecture de la Haute-Vienne n'est pas de nature à elle seule à faire douter de l'authenticité des résultats dans ces bureaux ; que M. Y... n'établit ni que la centralisation des résultats de la ville de Limoges aurait été opérée en dehors des membres du bureau et de tout témoin extérieur ni que les procès-verbaux seraient restés plusieurs heures à la mairie "sans surveillance" ;
Sur les griefs relatifs aux bulletins annnulés :
Considérant, en premier lieu, que si dans la plupart des bureaux de vote de la Haute-Vienne, chacun des bulletins annexés aux procès-verbaux ne porte pas mention des causes de l'annexion et si les procès-verbaux de 90 bureaux de vote ne décrivent pas les causes de nullité des bulletins dont ils mentionnent l'existence, l'inobservation des dispositions de l'article L. 66 du code électoral, pour regrettable qu'elle soit, n'est pas de nature à modifier les résultats du scrutin dès lors que la nullité de ces bulletins qui ont été annexés aux procès-verbaux peut être vérifiée par le juge de l'élection ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. Y... fait valoir que dans 7 bureaux de vote, les causes d'annulation des bulletins annexés ne sont pas conformes à celles recensées par le procès-verbal ; qu'il résulte cependant de l'instruction que les bulletins ont été à bon droit regardés comme nuls ; que, par suite, ces discordances sont sans influence sur les résultats du scrutin ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance regrettable que les bulletins annexés aux procès-verbaux de 8 bureaux de vote ne sont pas signés par tous les membres de chacun de ces bureaux n'est pas de nature, alors qu'aucune observation n'a été portée sur ces procès-verbaux et qu'aucune manoeuvre n'est établie ni même alléguée, à faire douter de l'authenticité de ces bulletins ;
Considérant, en quatrième lieu, que si le procès-verbal du bureau n° 150 mentionne l'existence de 5 bulletins nuls, lesdits bulletins ne sont pas annexés au procès-verbal des opérations de vote ; que, cependant, cette violation des dispositions de l'article L. 66 du code électoral n'est pas à elle seule de nature à entraîner la rectification des résultats dès lors que, d'une part, M. Y... n'invoque aucun élément de nature à établir que ces bulletins, dont l'existence est attestée par la feuille de pointage signée par tous les scrutateurs, auraient été annulés à tort et que, d'autre part, il ne résulte pas de l'instruction que l'absence d'annexion ait eu pour but et pour conséquence de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de l'instruction que le grief tiré de l'absence de l'annexion de 20 bulletins nuls au bureau n° 279 et de 3 bulletins annulés au bureau n° 311 manque en fait ;
Considérant, en sixième lieu, que si dans les bureaux n° 300 et 310 les enveloppes ayant contenu des bulletins nuls ne sont pas jointes aux procès-verbaux, cette circonstance est sans incidence sur les résultats du scrutin dès lors que les enveloppes vides et les bulletins regardés comme nuls sont tous annexés aux procès-verbaux ;

Considérant, enfin, que si les bulletins nuls des deux bureaux de vote de la commune de Saint-Priest-Taurion ont été mis dans une même enveloppe, cette erreur, certes regrettable, n'affecte pas, en l'absence de manoeuvre, les résultats du scrutin dans la mesure où ni le nombre de bulletins nuls dans chacun des bureaux de la commune ni l'annulation de ces bulletins, qui était d'ailleurs justifiée, ne sont contestés ;
Sur le décompte des voix :
Considérant, en premier lieu, que M. Y... n'est pas recevable à soulever après l'expiration du délai de dix jours fixé par l'article L. 361 du code électoral pour contester les résultats des élections au conseil régional le grief tiré des discordances, révélant l'existence d'un écart de 25 voix au total dans 16 bureaux de vote, entre le nombre des enveloppes trouvées dans les urnes et le nombre des émargements ;
Considérant, en deuxième lieu, que si M. Y... soutient que de nombreuses erreurs ont été commises dans le décompte des voix dans les bureaux n os 9, 15, 22, 29, 31, 61, 72, 96, 102, 104, 108, 111, 118, 120, 151, 153, 170, 172, 176, 192, 205, 206, 207, 255, 268, 336, 337, 343 et 349, il résulte de l'instruction que ce grief n'est pas fondé ;
Considérant, en revanche, que le requérant est fondé à soutenir que c'est à tort que dans le bureau n° 161, les deux bulletins de la liste qu'il conduisait trouvés sous une même enveloppe n'ont pas été regardés comme un suffrage valablement exprimé ; qu'il résulte de l'instruction que dans le même bureau, deux bulletins de la liste conduite par M. A... insérés dans une même enveloppe ont été également regardés à tort par le bureau électoral comme un suffrage irrégulier ; que, par suite, il y a lieu d'ajouter une voix à chacune de ces listes ;

Considérant, enfin, que le procès-verbal du bureau n° 351 attribue 164 voix à la liste de M. A... alors que la feuille de pointage ne recense que 154 suffrages ; que compte tenu de cette discordance, il y a lieu de retirer 10 voix à cette liste ;
Considérant qu'à la suite de ces rectifications, la liste conduite par M. Y... obtient 57 810 voix et le total des suffrages de la liste dirigée par M. A... s'élève à 50 853 voix tandis que le nombre des suffrages exprimés s'établit à 183 274 voix ; que ces modifications ne sont pas de nature à modifier l'attribution à la plus forte moyenne à la liste dirigée par M. A... du 21ème et dernier siège de conseiller régional à pourvoir dans le département de la Haute-Vienne et à entraîner l'annulation de l'élection de M. X... à ce siège ;
En ce qui concerne les conclusions tendant à l'annulation de l'élection du président du conseil régional du Limousin :
Considérant que M. Y... demande l'annulation de cette élection par voie de conséquence de l'annulation de l'élection de M. Besse au conseil régional ; qu'à la suite du rejet de sa protestation dirigée contre l'élection de M. X..., cette conclusion doit, en tout état de cause, être rejetée ;
Sur les conclusions de M. A... tendant à l'octroi des frais visés par l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions et de condamner M. Y... à payer à M. A... les sommes qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : Les protestations susvisées de M. Y... sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions de M. A... tendant à l'application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Jean-Marie Y..., à M. Jean-Jacques X..., à M. Robert A... et au ministre de l'intérieur et de la sécurité publique.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

28-025-03 ELECTIONS - ELECTIONS AU CONSEIL REGIONAL - OPERATIONS ELECTORALES


Références :

Code électoral R42 à R44, L65, R65 à R66-1, R67, L66, L361
Loi 91-641 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 09 déc. 1992, n° 135967
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Bachelier
Rapporteur public ?: Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Formation : 8 / 9 ssr
Date de la décision : 09/12/1992
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 135967
Numéro NOR : CETATEXT000007823519 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1992-12-09;135967 ?
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