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11/12/1992 | FRANCE | N°113891

France | France, Conseil d'État, 7 /10 ssr, 11 décembre 1992, 113891


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 janvier et 29 mai 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mohand Z...
Y... et M. Mohand Salah Y..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat d'annuler un arrêt du 28 novembre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, à la demande de l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer, d'une part, annulé la décision du 2 octobre 1987 par laquelle la commission du Contentieux de l'indemnisation de Paris avait annulé les décisions du 4 avril

1986 du directeur de l'ANIFOM fixant la valeur d'indemnisation d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 29 janvier et 29 mai 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Mohand Z...
Y... et M. Mohand Salah Y..., demeurant ... ; ils demandent au Conseil d'Etat d'annuler un arrêt du 28 novembre 1989 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, à la demande de l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer, d'une part, annulé la décision du 2 octobre 1987 par laquelle la commission du Contentieux de l'indemnisation de Paris avait annulé les décisions du 4 avril 1986 du directeur de l'ANIFOM fixant la valeur d'indemnisation des biens que possédait en Algérie M. Mohand X...
Y... et, d'autre part, rejeté les demandes présentées par les requérants devant la commission du contentieux de l'indemnisation de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi modifiée du 15 juillet 1970 ;
Vu la loi du 29 décembre 1976 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de M. Vigouroux, Maître des requêtes,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de M. Mohand Z...
Y...,
- les conclusions de M. Lasvignes, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er 2ème alinéa de la loi du 15 juillet 1970 relative à une contribution nationale à l'indemnisation de Français dépossédés de biens situés dans un territoire anciennement placé sous la souveraineté, le protectorat ou la tutelle de la France, "cette contribution a le caractère d'une avance sur les créances détenues à l'encontre des Etats étrangers ou des bénéficiaires de la dépossession" ; qu'aux termes de l'article 4 de ladite loi modifiée, les droits à indemnisation sont "incessibles sauf aux ascendants, descendants, conjoints, frères ou soeurs du bénéficiaire ; ils sont transmissibles selon les règles successorales de droit commun ; chaque ayant-droit peut prétendre à la fraction de l'indemnité due à la personne dépossédée correspondant à sa vocation héréditaire ou testamentaire" ;
Considérant qu'il résulte du dossier soumis aux juges du fond que M. Mohand X...
Y..., de nationalité française, est décédé le 3 octobre 1968 à Bordeaux ; que MM. Mohand Z...
Y... et Mohand Salah Y..., ses frères, également de nationalité française, ont demandé à être indemnisés de la part revenant à chacun d'eux des droits que M. Mohand X...
Y... détenait en indivision avec eux sur deux immeubles sis en Algérie et dont il n'est pas contesté qu'ils en ont été dépossédés en 1963-1964 sans qu'une indemnité ait été au préalable fixée ou versée par les autorités algériennes ;
Considérant que pour demander l'annulation de l'arrêt susvisé du 28 novembre 1989, M. Mohand Z...
Y... et M. Mohand Salah Y... soutiennent que la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit en décidant qu'en dépit de l'existence d'un testament haboussal dressé par leur père en 1912 et réservant, selon le droit local, à la descendance mâle en ligne directe du constituant la dévolution de ses biens, ils n'étaient pas seuls, en raison de l'application de la loi française, à détenir des droits sur les créances issues de la dépossession sans indemnité des immeubles litigieux ;

Considérant qu'il ressort de la chronologie des événements susrappelés tels qu'ils ont été exposés à la cour administrative d'appel, que M. Mohand X...
Y... a été dépossédé sans indemnité de ses droits sur les immeubles litigieux du fait de l'intervention en 1964 de décisions prises par les autorités algériennes ; qu'il détenait donc à cette époque des droits de créance ; que la dévolution successorale de ces droits de créance, qui constituaient un bien meuble, devait être faite conformément à la loi applicable au lieu de son domicile au jour de son décès en 1968, c'est-à-dire selon la loi française, et, par suite, bénéficier à l'ensemble de ses héritiers et non aux seuls requérants ; que M. Mohand X...
Y... remplissant au jour de son décès les conditions requises pour bénéficier de la contribution nationale instituée par la loi du 15 juillet 1970, chacun de ses héritiers avait droit à la fraction de l'indemnité due au défunt, correspondant à sa vocation héréditaire, conformément aux dispositions précitées de l'article 4 de cette loi ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Paris n'a commis aucune erreur de droit en accueillant la requête de l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer tendant à l'annulation de la décision du 2 octobre 1987 de la commission du Contentieux de l'indemnisation de Paris ;
Article 1er : Les pourvois de MM. Mohand Z...
Y... etMohand Salah Y... sont rejetés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM. Mohand Z...
Y... et Mohand Salah Y..., au délégué général de l'ANIFOM et au ministre du budget.


Synthèse
Formation : 7 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 113891
Date de la décision : 11/12/1992
Type d'affaire : Administrative

Analyses

46-06-01-02,RJ1,RJ2 OUTRE-MER - INDEMNISATION DES FRANCAIS DEPOSSEDES - CONDITIONS GENERALES DE L'INDEMNISATION - CONDITIONS RELATIVES AUX PERSONNES -Transmission par voie successorale du droit à indemnisation (1) - Règles successorales applicables - Règles en vigueur au lieu d'ouverture de la succession (2).

46-06-01-02 En vertu de l'article 4 modifié de la loi du 15 juillet 1970, les droits à indemnisation sont transmissibles selon les règles successorales de droit commun. Il en résulte que le droit à indemnisation, qui s'analyse en une créance sur l'Etat français et a donc le caractère d'un bien meuble, est transmis selon la loi du lieu de décès de son bénéficiaire, alors m^eme que le droit de propriété dont la perte est indemnisée avait été déterminé selon les dispositions du droit local algérien. Le droit à indemnisation d'une personne décédée en 1968 en France, est, par suite, transmis à ses héritiers conformément aux lois successorales françaises et non selon les dispositions testamentaires établies selon le droit local avant l'indépendance de l'Algérie.


Références :

Loi 70-632 du 15 juillet 1970 art. 1, art. 4

1.

Cf. 1977-11-04, A.N.I.F.O.M. c/ Henri, p. 904 ;

CAA de Paris, Plén., 1989-11-28, A.N.I.F.O.M. c/ Consorts Ourabah, p. 349. 2. Comp. 1984-12-07, Sehrani, T. p. 685 ;

Cf. CAA de Paris, Plén., 1989-11-28, A.N.I.F.O.M. c/ Consorts Ourabah, p. 349.


Publications
Proposition de citation : CE, 11 déc. 1992, n° 113891
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Vigouroux
Rapporteur public ?: Lasvignes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:113891.19921211
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