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14/12/1992 | FRANCE | N°111476

France | France, Conseil d'État, 7 /10 ssr, 14 décembre 1992, 111476


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 novembre 1989 et 13 mars 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme X..., demeurant ... ; M. et Mme X... demandent que le Conseil d'Etat annule la décision du 6 septembre 1989 par laquelle la cour administrative d'appel de Nantes :
1°) a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 17 décembre 1985 de la commission du contentieux de l'indemnisation d'Orléans pour perte de matériel agricole en Algérie ;
2°) a annulé la décision du 3 octobre 1985 d

e ladite commission relative à l'indemnisation de biens agricoles et de ...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 novembre 1989 et 13 mars 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme X..., demeurant ... ; M. et Mme X... demandent que le Conseil d'Etat annule la décision du 6 septembre 1989 par laquelle la cour administrative d'appel de Nantes :
1°) a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 17 décembre 1985 de la commission du contentieux de l'indemnisation d'Orléans pour perte de matériel agricole en Algérie ;
2°) a annulé la décision du 3 octobre 1985 de ladite commission relative à l'indemnisation de biens agricoles et de récolte ;
3°) a rejeté la demande de M. X... devant la commission du contentieux de l'indemnisation d'Orléans en vue d'être indemnisé de la perte de biens agricoles et immobiliers dépendant de la propriété de Mme Z... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu la loi n° 70-632 du 15 juillet 1970 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu :
- le rapport de Mme Pineau, Maître des requêtes,
- les observations de Me Spinosi, avocat de M. et Mme X...,
- les conclusions de M. Lasvignes, Commissaire du gouvernement ;

Sur l'indemnisation de la perte d'un appartement :
Considérant que Mme Y... étant, à la date de la dépossession prononcée par une ordonnance du 6 mai 1966 du gouvernement algérien, usufruitière d'un appartement situé à Fort-de-l'Eau (Algérie) dont elle avait fait donation en nue-propriété, à sa fille, Mme X..., par un acte du 25 août 1960 ; que l'ANIFOM a versé aux héritiers de Mme Y..., décédée le 9 mai 1967, la part de l'indemnisation dudit immeuble correspondant à un montant de 2/10° de la valeur de l'appartement ;
Considérant que du fait et à la date de la dépossession, Mme Y... était privée du droit à l'usufruit qu'elle détenait depuis le 25 août 1960 sur l'appartement sis à Fort de l'Eau ; qu'en vertu des dispositions de la loi du 15 juillet 1970, cette privation lui a ouvert droit à être indemnisée ; que Mme X... ne contestant pas le montant de la part d'indemnisation attribuée par la commission aux héritiers de Mme Y..., n'est pas fondée à soutenir que la cour aurait commis une erreur de droit en rejetant ses conclusions tendant à bénéficier de l'intégralité de l'indemnisation accordée par l'ANIFOM pour la dépossession de l'appartement en cause ;
Sur l'indemnisation de bâtiments, équipements, cheptel vif et plantations :
Considérant que pour annuler la décision du 3 octobre 1986 en tant que la commission du contentieux de l'indemnisation d'Orléans a, par ladite décision, reconnu à M. X... un droit à l'indemnisation, en plus du matériel d'exploitation, de bâtiments, d'équipements et de plantations dépendant d'une propriété agricole dont l'intéressé était locataire à Affreville (Algérie), la cour administrative d'appel de Nantes s'est fondée sur l'insuffisance des preuves apportées par M. X... des droits qu'il prétendait détenir sur les biens en litige ; que cette appréciation des pièces du dossier, qui n'est entachée d'aucune dénaturation, ne saurait être discutée devant le juge de cassation ;

Sur l'indemnisation de la perte de matériel agricole :
Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la loi du 15 juillet 1970 : "Pour prétendre à indemnisation de biens agricoles, le demandeur doit apporter la justification à la date de la dépossession : 3° De la superficie et de la nature des cultures et activités. A défaut de cette justification, les terres productives sont estimées sur la base de la valeur minimale prévue aux barèmes mentionnés à l'article 17" ; qu'aux termes de l'article 17 de la même loi : "La valeur d'indemnisation des biens agricoles couvre exclusivement la valeur de la terre, des plantations, des bâtiments d'habitation et d'exploitation, du matériel, du cheptel vif et de l'équipement, ou des parts des coopératives qui et lieu" ; qu'aux termes de l'article 18 de la même loi : "La valeur forfaitaire d'indemnisation est, le cas échéant, répartie entre le propriétaires droits qu'ils détenaient ..." ; qu'aux termes de l'article 4 du décret du 4 août 1970 : "L'exploitant agricole non propriétaire doit justifier du contrat dont il tenait ses droits. A défaut, et lorsque le propriétaire du bien répond également aux conditions fixées par les articles 2 et 3 de la loi susvisée du 15 juillet 1970, l'exploitant peut produire une déclaration du propriétaire précisant leurs conventions" ;
Considérant que M. X..., qui était locataire de deux exploitations agricoles situées sur le territoire de la commune de Lavarande (Algérie), s'il reconnaissait que la valeur du matériel agricole prise en compte pour la détermination de ses droits à indemnisation avait bien été établie sur la base de la superficie totale de ces deux propriétés, soit 159 ha 70, soutenait devant les juges du fond que l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer ne lui avait, à tort, versé que le montant de la valeur dudit matériel calculé sur une superficie de 111 ha au motif que l'une des propriétés aurait fait l'objet d'une co-location avec un autre exploitant ; qu'en se bornant à constater que la totalité de la superficie des deux propriétés avait été prise en compte pour le calcul de la valeur de l'ensemble du matériel sans se prononcer sur le bien-fondé de l'abattement effectué par l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer pour la détermination du montant dû à M. X..., la cour n'a pas répondu au moyen de M. X... tendant à démontrer qu'il avait droit à la totalité de l'indemnité ; qu'ainsi la cour administrative d'appel de Nantes a insuffisamment motivé sa décision de rejet des conclusions du requérant sur ce chef d'indemnisation ; qu'il y a lieu, sur ces conclusions, de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nantes ;
Article 1er : L'article 1er de l'arrêt du 6 septembre 1989 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions visant l'indemnisation de la perte de matériel agricole.
Article 2 : Le jugement des conclusions mentionnées à l'article 1er est renvoyé à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X... est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme X..., au directeur de l'agence nationale pour l'indemnisation des Français d'outre-mer et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 7 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 111476
Date de la décision : 14/12/1992
Sens de l'arrêt : Annulation partielle renvoi
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

46-06-01-02 OUTRE-MER - INDEMNISATION DES FRANCAIS DEPOSSEDES - CONDITIONS GENERALES DE L'INDEMNISATION - CONDITIONS RELATIVES AUX PERSONNES -Indemnisation d'un usufruitier - Modalités - Droit à une part de la valeur du bien ayant fait l'objet de la dépossession.

46-06-01-02 Mme M. étant, à la date de la dépossession prononcée par une ordonnance du gouvernement algérien, usufruitière d'un appartement situé à Fort-de-l'Eau (Algérie) dont elle avait fait donation en nue-propriété à sa fille, Mme C., l'ANIFOM a versé aux héritiers de Mme M. la part de l'indemnisation dudit immeuble correspondant à un montant de 2/10° de la valeur de l'appartement. Du fait et à la date de la dépossession, Mme M. était privée du droit à l'usufruit qu'elle détenait sur l'appartement sis à Fort de l'Eau. En vertu des dispositions de la loi du 15 juillet 1970, cette privation lui a ouvert droit à être indemnisée. Mme C., ne contestant pas le montant de la part d'indemnisation attribuée par la commission aux héritiers de Mme M., n'est pas fondée à soutenir que la cour administrative d'appel aurait commis une erreur de droit en rejetant ses conclusions tendant à bénéficier de l'intégralité de l'indemnisation accordée par l'ANIFOM pour la dépossession de l'appartement en cause.


Références :

Décret 70-700 du 04 août 1970 art. 4
Loi 70-632 du 15 juillet 1970 art. 16, art. 17, art. 18


Publications
Proposition de citation : CE, 14 déc. 1992, n° 111476
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: Mme Pineau
Rapporteur public ?: M. Lasvignes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1992:111476.19921214
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