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27/01/1993 | FRANCE | N°112513

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 27 janvier 1993, 112513


Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST, dont le siège est 1, Terrasse Bellini à Puteaux (92800) ; la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 17 juin 1985 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, en tant que cet arrêté fixe à 60 pour 100 la participation de l'assuré pour les spécialités "Torental", pr

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Vu la requête, enregistrée le 29 décembre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST, dont le siège est 1, Terrasse Bellini à Puteaux (92800) ; la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 17 juin 1985 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, en tant que cet arrêté fixe à 60 pour 100 la participation de l'assuré pour les spécialités "Torental", présentées en comprimés dragéifiés et en soluté injectable, et pour la spécialité "Torental 400", présentée en comprimés dragéifiés ;
2°) annule la décision de rejet née du silence gardé par le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale sur le recours gracieux formé par la société le 31 juillet 1985 contre les dispositions de l'arrêté du 17 juin 1985 relatives aux spécialités "Torental" et "Torental 400" ;
3°) annule la décision de rejet née du silence gardé par le ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale sur la demande présentée par la société le 9 juin 1988 et tendant à l'abrogation des mêmes dispositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le décret n° 67-441 du 5 juin 1967 ;
Vu le décret n° 67-925 du 19 octobre 1967 ;
Vu le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Marie-Laure Denis, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lemaitre, Monod, avocat de la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un arrêté du 17 juin 1985 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables aux assurés sociaux, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a fixé à 60 % la participation de l'assuré pour les spécialités "Torental", présentées en comprimés dragéifiés et en soluté injectable, et pour la spécialité "Torental 400", présentée en comprimés dragéifiés ; que la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST a formé le 31 juillet 1985 un recours gracieux à l'encontre de ces dispositions, puis a demandé au ministre des affaires sociales et de l'emploi le 9 juin 1988 d'abroger lesdites dispositions ; que l'autorité ministérielle a gardé le silence tant sur ce recours gracieux que sur cette demande ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté du 17 juin 1985 et contre la décision rejetant le recours gracieux formé par la société requérante :
Considérant qu'aux termes de l'article 5 du décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l'administration et les usagers : "Les délais opposables à l'auteur d'une demande adressée à l'administration courent de la date de la transmission, à l'auteur de cette demande, d'un accusé de réception ..." ; qu'un recours administratif gracieux ou hiérarchique ne présente pas le caractère d'une "demande adressée à l'administration" au sens de ces dispositions ; que, par suite, si l'autorité administrative n'a pas accusé réception, dans les conditions prévues à l'article 5 du décret du 28 novembre 1983, du recours gracieux formé par la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST, cette circonstance n'a pu faire obstacle à ce que le délai du recours contentieux commençât à courir au terme d'une période de quatre mois à compter de la réception du recours gracieux ;

Considérant que la requête de la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST a été enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 29 décembre 1989, soit après l'expiration du délai du recours contentieux déterminé dans les conditions indiquées ci-dessus ; que, dès lors, les conclusions de cette requête dirigées contre les dispositions de l'arrêté du 17 juin 1985 relatives aux spécialités "Torental" et "Torental 400", d'une part, et contre la décision de rejet née du silence gardé par le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale sur le recours gracieux formé par la société requérante le 31 juillet 1985, d'autre part, ne sont pas recevables ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision rejetant la demande d'abrogation présentée par la société requérante :
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :
Considérant qu'en vertu du principe dont s'inspirent les dispositions de l'article 3 du décret du 28 novembre 1983, l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ;
Considérant qu'aux termes de l'article L.286 du code de la sécurité sociale en vigueur à la date de l'arrêté du 17 juin 1985, "la participation de l'assuré aux tarifs servant de base au calcul des prestations prévues à l'article L.283-a est fixée par un décret en Conseil d'Etat" ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 19 octobre 1967, modifié par les décrets des 10 juin 1977 et 28 décembre 1984, alors en vigueur, "la participation de l'assuré prévue à l'article L.286 du code de la sécurité sociale est fixée ainsi qu'il suit : ... V - 60 % pour les médicaments principalement destinés au traitement des troubles ou affections sans caractère habituel de gravité, figurant sur une liste établie par arrêté du ministre de la santé et de la sécurité sociale ... VI - 30 % pour tous les autres frais ..." ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que les spécialités "Torental" et "Torental 400" sont principalement destinées au traitement de l'artériopathie des membres inférieurs ; que, si cette affection recouvre des situations pathologiques différentes, elle a néanmoins des conséquences qui perturbent gravement la vie des personnes qui en sont atteintes ; qu'ainsi, les spécialités "Torental" et "Torental 400" doivent être regardées comme des médicaments principalement destinés au traitement de troubles ou affections présentant un caractère habituel de gravité ; que, par suite, en portant de 30 à 60 % pour ces spécialités le taux de participation de l'assuré prévue par les prescriptions de l'article L.286 du code de la sécurité sociale, le ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale a commis une erreur manifeste d'appréciation ; que, les dispositions de l'arrêté du 17 juin 1985 relatives aux spécialités "Torental" et "Torental 400" étant ainsi entachées d'une illégalité dès la signature de cet acte, la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST est fondée à demander l'annulation de la décision du ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale refusant d'abroger ces dispositions ;
Article 1er : Est annulée la décision de rejet née du silence gardé par le ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale sur la demande de la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST, présentée le 9 juin 1988, tendant à l'abrogation des dispositions de l'arrêté du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale en date du 17 juin 1985 fixant à 60 % la participation de l'assuré pour les spécialités "Torental", présentéesen comprimés dragéifiés et en soluté injectable, et pour la spécialité "Torental 400", présentée en comprimés dragéifiés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE DES LABORATOIRES HOECHST et au ministre des affaires sociales et de l'intégration.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 112513
Date de la décision : 27/01/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - ERREUR MANIFESTE - EXISTENCE.

SANTE PUBLIQUE - PHARMACIE - PRODUITS PHARMACEUTIQUES.

SECURITE SOCIALE - PRESTATIONS - PRESTATIONS D'ASSURANCE MALADIE.


Références :

Arrêté du 17 juin 1985
Code de la sécurité sociale L286
Décret 67-925 du 19 octobre 1967 art. 1
Décret 77-593 du 10 juin 1977
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983 art. 5, art. 3
Décret 84-1199 du 28 décembre 1984


Publications
Proposition de citation : CE, 27 jan. 1993, n° 112513
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie-Laure Denis
Rapporteur public ?: Bonichot

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:112513.19930127
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