La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

17/02/1993 | FRANCE | N°59080

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 17 février 1993, 59080


Vu le recours du MINISTRE DE l'URBANISME ET DU LOGEMENT, enregistré le 9 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêt du 4 avril 1981 par lequel le commissaire de la République de la Gironde a refusé à la société civile immobilière de Tallaris le permis de construire un ensemble immobilier de 11 hameaux comprenant ensemble 1 351 habitations individuelles ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société

civile immobilière de Tallaris devant le tribunal administratif de Bo...

Vu le recours du MINISTRE DE l'URBANISME ET DU LOGEMENT, enregistré le 9 mai 1984 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 15 décembre 1983 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêt du 4 avril 1981 par lequel le commissaire de la République de la Gironde a refusé à la société civile immobilière de Tallaris le permis de construire un ensemble immobilier de 11 hameaux comprenant ensemble 1 351 habitations individuelles ;
2°) de rejeter la demande présentée par la société civile immobilière de Tallaris devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Aguila, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société civile immobilière de Tallaris,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la société civile immobilière de Tallaris :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué en date du 15 décembre 1983 n'a été notifié ni au MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT, ni à une autre personne susceptible de représenter l'Etat au cours de l'instance d'appel ; que la notification dudit jugement au seul préfet de la Gironde n'a pu faire courir contre l'Etat le délai d'appel ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté du recours du MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT doit être rejetée ;
Sur le recours du MINISTRE :
Considérant que, par un arrêté en date du 4 avril 1981, le préfet de la Gironde a refusé à la société civile immobilière de Tallaris le permis de construire un ensemble immobilier de 11 hameaux comprenant ensemble 1 351 habitations individuelles au motif, d'une part, qu'une partie de l'opération envisagée ne pouvait être autorisée en application de l'article 2-2 de la directive d'aménagement et de protection du littoral approuvée par décret du 25 août 1979, et, d'autre part, qu'une autre partie des constructions projetées ne pouvait être autorisée en application de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R.111-15 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales lorsque, par leur importance, leur situation et leur affectation, des constructions contrarieraient l'action d'aménagement du territoire et d'urbanisme telle qu'elle résulte de directives d'aménaement national approuvées par décret" ; que l'article R.111-27, qui a été inséré dans le code de l'urbanisme par le décret du 25 août 1979 approuvant la directive d'aménagement national relative à la protection et à l'aménagement du littoral, prévoit que, dans les communes du littoral figurant sur une liste annexée, "les dispositions du chapitre II de la directive ainsi approuvée sont opposables aux tiers conformément à l'article R.111-15 du code de l'urbanisme" ; qu'aux termes de l'article 2.2-a de la directive d'aménagement national susmentionnée : "Hors des zones actuellement urbanisées des agglomérations existantes, la construction est interdite dans les espaces naturels préservés ou à préserver en raison de leur destination agricole forestière ou aquacole, ou de la qualité des sites et paysages ..." ; qu'aux termes de l'article 6.1 de ladite directive : "La présente directive est applicable au littoral du Languedoc-Roussillon et de l'Aquitaine, en dehors des périmètres des opérations d'aménagement définis par les schémas propres à ces régions" ;

Considérant que si le projet litigieux se situe dans le périmètre de l'une des 9 "unités principales d'aménagement" définies par le schéma d'aménagement de la Côte d'Aquitaine, approuvé le 20 avril 1972, il n'est compris dans le périmètre d'aucune opération d'aménagement au sens de l'article 6-1 précité de la directive ; qu'ainsi, les constructions projetées n'étaient pas exclues du champ d'application de la directive d'aménagement national relative à la protection et à l'aménagement du littoral ; que, dès lors, le préfet pouvait se fonder sur les dispositions de cette directive pour refuser le permis de construire une partie des constructions projetées ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R.111-21 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales" ; que, compte tenu du caractère pittoresque du paysage dans cette partie classée des bords du lac de Lacanau, et eu égard notamment à la dimension du projet et à la densité des constructions envisagées, le préfet de la Gironde a fait une exacte application des dispositions précitées en refusant le permis de construire 1 351 habitations individuelles ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux s'est fondé sur le fait que les motifs retenus par le préfet n'étaient pas de nature à justifier le refus du permis demandé pour annuler l'arrêté du 4 avril 1981 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par la société civile immobilière de Tallaris devant le tribunal administratif de Bordeaux ;
Considérant que les dispositions de l'article R.421-39 du code de l'urbanisme qui fixent les conditions dans lesquelles les préfets sont autorisés à déléguer leur signature aux directeurs départementaux de l'équipement ne font pas obstacle à ce que le préfet de la Gironde délégue, ainsi qu'il l'a fait, sa signature au secrétaire général de la préfecture pour signer le refus de permis de construire attaqué ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le refus émanerait d'une autorité incompétente doit être rejeté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'URBANISME ET DU LOGEMENT est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté préfectoral du 4 avril 1981 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux en date du 15 décembre 1983 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la société civile immobilière de Tallaris devant le tribunal administratif de Bordeaux est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'équipement, du logement et des transports et à la société civile immobilière de Tallaris.


Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award