Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 7 avril 1986 et 7 août 1986, présentés pour M. Mendel X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 7 février 1986 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre des années 1978 à 1980 ;
2°) prononce la décharge de ces impositions et des pénalités dont elles ont été assorties ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963 modifié par le décret n° 81-29 du 16 janvier 1981 et par le décret n° 84-819 du 29 août 1984 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Loloum, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de M. Mendel X...,
- les conclusions de M. Fouquet, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que si la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ne contenait l'exposé d'aucun fait ni l'énoncé d'aucun moyen, elle était accompagnée d'une copie de la réclamation adressée au directeur dans laquelle étaient exposés les faits et moyens que l'intéressé entendait invoquer et à laquelle il doit être regardé comme s'étant référé ; que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif a rejeté comme non motivée la demande de M. X... ; qu'ainsi le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 7 février 1986 doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant qu'aux termes de l'article 168 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition : "1. En cas de disproportion marquée entre le train de vie d'un contribuable et les revenus qu'il déclare, la base d'imposition à l'impôt sur le revenu est portée à une somme forfaitaire déterminée en appliquant à certains éléments de ce train de vie le barème ci-après ..." ;
Considérant, en premier lieu, que si, pour contester l'application qui lui a été faite des dispositions précitées de l'article 168, M. X... se prévaut, sur le fondement de l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales de ce qu'une circulaire ministérielle du 9 avril 1959 a indiqué qu'il y avait lieu pour l'administration de s'abstenir de faire application des dispositions précitées de l'article 168 du code général des impôts dans le cas des contribuables âgés dont ls ressources ont diminué, ladite circulaire se borne à recommander la bienveillance aux services dans certaines situations particulières, et, par suite, ne constitue pas une interprétation formelle de la loi fiscale au sens de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;
Considérant, en second lieu, que M. X... se prévaut également, sur le fondement dudit article, de l'interprétation formelle de la loi fiscale contenue dans l'instruction du 3 mai 1973, en ce qu'elle indique "qu'il convient de ne pas faire application des dispositions de l'article 168 du code général des impôts lorsque l'écart constaté entre le revenu net global déclaré et la base forfaitaire d'imposition au cours de la deuxième année de la période de référence servant à l'appréciation de la disproportion marquée, tient seulement à la déduction de dépenses d'amélioration foncière de caractère non répétitif. Les dépenses à prendre en considération pour l'application de ces dispositions sont ... les dépenses d'amélioration afférentes aux locaux d'habitation ... Ces dépenses seront considérées comme ayant un caractère répétitif ... si elles sont exposées au cours de la deuxième année de la période de référence servant à l'appréciation de la disproportion marquée et au cours de l'une des quatre années antérieures" ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le contribuable a engagé des dépenses d'amélioration en 1978 pour transformer des chambres d'un hôtel pour partie en des appartements et une loge de concierge et en 1979 et 1980 pour remettre en état un immeuble à usage d'habitation ; que, dès lors, ces dépenses revêtaient en 1979 et 1980 un caractère répétitif au sens défini par l'instruction précitée du 7 mai 1973 ; qu'ainsi, M. X... n'est pas fondé à se prévaloir de cette instruction pour contester les impositions mises à sa charge au titre des années 1979 et 1980 ;
Considérant, en revanche, que ni l'existence, alléguée par l'administration sans autre précision, de déficits fonciers au cours des années antérieures ni celle de faibles dépenses d'entretien en 1977 ne permettent de regarder comme ayant eu un caractère répétitif les dépenses d'amélioration exposées en 1978 ; que le montant de ces dépenses, s'élevant à 150 000 F, est supérieur à la différence entre la base forfaitaire d'imposition et le revenu net déclaré ; que, dès lors, M. X... est fondé à invoquer l'instruction précitée et, par suite, à demander la décharge du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre de 1978 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Paris en date du 7 février 1986 est annulé.
Article 2 : M. X... est déchargé du complément d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquels il a été assujetti au titre de l'année 1978.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande de M. X... devant le tribunal administratif et de sa requête est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme Esther X..., à M. Serge X..., M. Isaac X..., héritiers de M. Mendel X... et au ministre du budget.