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05/03/1993 | FRANCE | N°84527

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 05 mars 1993, 84527


Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 janvier 1987, présentée pour Mme C..., demeurant ..., M. Z..., demeurant ..., Mme Y..., demeurant à Montreuil (93100) et Mme A..., demeurant ... ; ils demandent l'annulation pour excès de pouvoir des décisions implicites de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre des affaires sociales et de l'emploi, le ministre de l'économie et des finances, le ministre de l'agriculture, le ministre de l'industrie, des PTT et du tourisme et le secrétaire d'Etat aux anciens combatta

nts sur les demandes qu'ils leur ont adressées et tendant à...

Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 20 janvier 1987, présentée pour Mme C..., demeurant ..., M. Z..., demeurant ..., Mme Y..., demeurant à Montreuil (93100) et Mme A..., demeurant ... ; ils demandent l'annulation pour excès de pouvoir des décisions implicites de rejet résultant du silence gardé pendant plus de quatre mois par le ministre des affaires sociales et de l'emploi, le ministre de l'économie et des finances, le ministre de l'agriculture, le ministre de l'industrie, des PTT et du tourisme et le secrétaire d'Etat aux anciens combattants sur les demandes qu'ils leur ont adressées et tendant à l'abrogation de deux arrêtés interministériels du 30 décembre 1985 fixant, respectivement, les conditions d'installation et d'équipement des fournisseurs de petit appareillage d'orthopédie pour l'un et les critères de compétence nécessaires à l'obtention de l'agrément des fournisseurs d'articles de petit appareillage d'orthopédie aux bénéficiaires des régimes de protection sociale pour l'autre ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le décret n° 45-179 du 29 décembre 1945, modifié, relatif à l'application des dispositions du livre III du code de la sécurité sociale ;
Vu le décret n° 81-460 du 8 mai 1981 et les arrêtés interministériels du 30 décembre 1985 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Salesse, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Lesourd, Baudin, avocat de Mme ROY X..., de M. Jean-Claude Z..., de Mme Y... et de Mme A...,
- les conclusions de M. B.... Martin, Commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que l'autorité compétente, saisie d'une demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal, est tenue d'y déférer, soit que ce règlement ait été illégal dès la date de sa signature, soit que l'illégalité résulte de circonstances de droit ou de fait postérieures à cette date ; qu'en se fondant sur les dispositions du décret du 28 novembre 1983, concernant les relations entre l'administration et les usagers, qui s'inspirent de ce principe, Mme C..., M. Z..., Mme Y... et Mme A..., pharmaciens, ont demandé le 15 mai 1986 aux ministres de l'économie et des finances, des affaires sociales et de l'emploi, de l'agriculture, de l'industrie, des P. et T. et du tourisme et au secrétaire d'Etat aux anciens combattants d'abroger les deux arrêtés du 30 décembre 1985 par lesquels ils ont respectivement fixé les conditions d'installation et d'équipement des fournisseurs de petit appareillage 'orthopédie et les critères de compétence nécessaires à l'obtention de l'agrément des fournisseurs de petit appareillage d'orthopédie aux bénéficiaires des régimes de protection sociale ; que les ministres n'ayant pas répondu à cette demande dans le délai de quatre mois, il en est résulté des décisions implicites de rejet que Mme C... et autres ont contestées pour excès de pouvoir dans le délai du recours contentieux ;
Considérant que les articles 14, 19 et 20 du décret n° 81-460 du 8 mai 1981, portant simplification des procédures et des conditions de prise en charge de fournitures et d'appareils au titre des prestations sanitaires, ultérieurement repris aux articles R. 165-14, R. 165-19 et R. 165-20 du code de la sécurité sociale, disposent, le premier, que les "dispositions complémentaires relatives à certains appareils de prothèse et d'orthèse", qui forment le chapitre II de ce décret, "s'appliquent aux prothèses oculaires, aux chaussures orthopédiques et aux fournitures de gros appareillage de prothèse et d'orthèse", le deuxième, inséré dans le même chapitre, que "la prise en charge des appareils énumérés à l'article 14 est subordonnée : 1° à l'agrément du fournisseur par les organismes de sécurité sociale et par le ministre chargé des anciens combattants ...", le troisième, qui figure aussi au chapitre II du décret, que "Ne peut être agréé que le fournisseur qui possède, ou dont le responsable technique possède l'un des diplômes dont la liste est fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale ou qui, à défaut, justifie d'une compétence professionnelle établie" ; qu'il résulte de ces dispositions que la prise en charge du petit appareillage d'orthopédie n'est pas subordonnée à un agrément des fournisseurs ; que, par suite, les deux arrêtés interministériels du 30 décembre 1985 sont, au regard desdites dispositions, dépourvus de base légale ;

Considérant que, contrairement à ce que soutient le ministre des affaires sociales, l'article 10 du décret du 8 mai 1981, dont les dispositions, insérées au chapitre 1er de ce décret, intitulé : "Dispositions générales relatives aux fournitures et appareils pris en charge au titre des prestations sanitaires", instituent une commission consultative des prestations sanitaires ayant, notamment, pour mission de "proposer des conditions d'agrément des fournisseurs et de donner avis sur les recours contre les décisions prises dans ce domaine", ne peuvent être regardées comme étendant le champ de l'agrément prévu par les articles 14 et 19 précités du décret à d'autres fournitures et appareils que ceux qui sont énumérés limitativement par l'article 14 ;
Considérant que le ministre n'est pas davantage fondé à soutenir qu'une telle extension résulterait de ce que l'article 2 du décret du 8 mai 1981, en prévoyant que "Ne peuvent être pris en charge ... les fournitures et appareils ... 3° qui ne satisfont pas à la réglementation en vigueur ...", se réfèrerait ainsi aux dispositions de l'article 17, quatrième et cinquième alinéas, du règlement intérieur modèle provisoire des caisses régionales de sécurité sociale pour l'assurance invalidité, annexé à l'arrêté interministériel du 19 juin 1947, modifié, selon lesquelles : "La délivrance" des "appareils de prothèse et d'orthopédie, des bandages et des lunettes dont le remboursement est dispensé de la formalité d'entente préalable", "est effectuée par le fournisseur choisi par l'assuré sur la liste des fournisseurs agréés par la caisse ou par les centres d'appareillage reconnus par le ministre, ou par les fournisseurs agréés par ces centres ...", dès lors, en tout état de cause, que ces dispositions, identiques, par leur contenu, à celles qui figuraient à l'article 12, 4 du décret n° 45-179 du 29 décembre 1945 avant d'être abrogées par le I de l'article 28 du décret du 8 mai 1981, ont elles-mêmes été implicitement, mais nécessairement abrogées par cet article ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les arrêtés interministériels du 30 décembre 1985, dont les dispositions relatives à l'agrément des fournisseurs de chaussures orthopédiques et de petit appareillage de prothèse et d'orthèse sont indivisibles, sont illégaux ; que, par suite, Mme C... et autres sont fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir des décisions implicites qui ont refusé d'en prononcer l'abrogation ;
Article 1er : Les décisions implicites par lesquelles les ministres signataires de l'arrêté du 30 décembre 1985 fixant les conditions d'installation et d'équipement des fournisseurs de petit appareillage d'orthopédie et de l'arrêté, du même jour, fixant les critères de compétence nécessaires à l'obtention de l'agrément des fournisseurs d'articles de petit appareillage d'orthopédie aux bénéficiaires des régimes de protection sociale, ont refusé d'abroger ces arrêtés, sont annulées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme C..., à M. Z..., à Mme Y..., à Mme A..., au ministre de l'économie et des finances, au ministre du budget, au ministre des affaires sociales et de l'intégration, au ministre de l'agriculture et du développement rural, au ministre de l'industrie et du commerce extérieur et au secrétaire d'Etat aux anciens combattants et victimes de guerre.


Type d'affaire : Administrative

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - PRINCIPES INTERESSANT L'ACTION ADMINISTRATIVE - OBLIGATION D'ABROGER UN REGLEMENT ILLEGAL.

SECURITE SOCIALE - PRESTATIONS - PRESTATIONS D'ASSURANCES ACCIDENTS DU TRAVAIL ET MALADIES PROFESSIONNELLES - APPAREILLAGE.


Références :

Arrêté du 19 juin 1947 annexe
Arrêté du 30 décembre 1985
Code de la sécurité sociale R165-14, R165-19, R165-20
Décret 45-179 du 29 décembre 1945
Décret 81-460 du 08 mai 1981 art. 14, art. 19, art. 20, art. 10, art. 2, art. 28, art. 17, art. 12
Décret 83-1025 du 28 novembre 1983


Publications
Proposition de citation: CE, 05 mar. 1993, n° 84527
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Salesse
Rapporteur public ?: Ph. Martin

Origine de la décision
Formation : 9 / 8 ssr
Date de la décision : 05/03/1993
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 84527
Numéro NOR : CETATEXT000007821855 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1993-03-05;84527 ?
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