Vu la requête, enregistrée le 12 juillet 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par la LIGUE FRANCAISE POUR LA PROTECTION DES OISEAUX, dont le siège social est à la Corderie Royale ..., représentée par son président en exercice ; la LIGUE FRANCAISE POUR LA PROTECTION DES OISEAUX demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêté du 23 juin 1989 par lequel le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre chargé de l'environnement et de la préventions des risques technologiques et naturels majeurs a ouvert la chasse au gibier d'eau dans la zone de chasse maritime, à l'exception de portions de littoral, le 15 juillet 1989 à douze heures pour la campagne 1989-1990 dans le département de la Charente-Maritime,
2°) décide qu'il sera sursis à l'exécution de cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le traité du 25 mars 1957 ;
Vu la directive n° 79-409 du 2 avril 1979 du conseil des communautés européennes ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Lerche, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. de Chaisemartin, Courjon, avocat de la Fédération Départementale des Chasseurs de la Charente-Maritime et de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'Union Nationale des Fédérations Départementales des Chasseurs,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Sur l'intervention de l'Union des Fédérations départementales de chasseurs :
Considérant que l'Union des Fédérations départementales de chasseurs a intérêt au maintien de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ;
Sur la légalité de la décision contestée :
Considérant qu'il ressort clairement des stipulations de l'article 189 du traité du 25 mars 1957 que les directives du conseil des communautés économiques européennes lient les Etats membres "quant au résultat à atteindre" ; que si, pour atteindre le résultat qu'elles définissent, les autorités nationales, qui sont tenues d'adapter la législation et la réglementation des Etats membres aux directives qui leur sont destinées, restent seules compétentes pour décider de la forme à donner à l'exécution de ces directives et pour fixer elles-mêmes, sous le contrôle des juridictions nationales, les moyens propres à leur faire produire leurs effets en droit interne, ces autorités ne peuvent légalement édicter des dispositions réglementaires qui seraient contraires aux objectifs définis par les directives dont s'agit ;
Considérant que, selon les dispositions de l'article 7 paragraphe 4, de la directive du conseil n° 79-409 du 2 avril 1979 concernant la conservation des oiseaux sauvages publiées au Journal Officiel des communautés européennes du 25 avril 1979, les Etats membres veillent à ce que les espèces auxquelles s'appliqe la législation de la chasse ne soient pas chassées pendant la période nidicole ni pendant les différents stades de reproduction et de dépendance. Lorsqu'il s'agit d'espèces migratrices, ils veillent en particulier à ce que les espèces auxquelles s'applique la législation de la chasse ne seront pas chassées pendant leur période de reproduction et pendant leur trajet de retour vers leur lieu de nidification ;
Considérant que par l'arrêté du 23 juin 1989 contesté, le secrétaire d'Etat auprès du Premier ministre chargé de l'environnement et de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs a ouvert la chasse au gibier d'eau dans la zone de chasse maritime, à l'exception de portions du littoral le 15 juillet à douze heures pour la campagne 1989-1990 dans le département de la Charente-Maritime ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment du rapport établi conjointement en mars 1989 par le Muséum national d'histoire naturelle et l'office national de la chasse que cette ouverture de la chasse intervenait en une période ou certaines des espèces concernées n'avaient pas achevé leur période de reproduction ; que si elle était autorisée en une zone qui n'était pas utilisée à la date de la décision attaquée, comme site de reproduction par les gibiers d'eau, ladite zone était toutefois fréquentée à cette date par des oiseaux en période de reproduction ou de dépendance ; qu'en conséquence les dispositions réglementaires concernées ont été prises en méconnaissance des objectifs définis par la directive ci-dessus mentionnée et encourent dès lors l'annulation ;
Article 1er : L'intervention de l'Union des Fédérations départementales de chasseurs est admise.
Article 2 : L'arrêté susvisé en date du 23 juin 1989 est annulé.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la LIGUE FRANCAISE POUR LA PROTECTION DES OISEAUX, à l'Union des Fédérations départementales de chasseurs et au ministre de l'environnement.