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05/05/1993 | FRANCE | N°96676;97011

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 05 mai 1993, 96676 et 97011


Vu 1°) sous le n° 96 676, le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistré le 1er avril 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 12 janvier 1988 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'INTEGRATION en date du 14 juin 1986 en tant qu'elle concerne l'article II-1, alinéas 1, 2, 3 et 5 du règlement intérieur de la société anonyme de télécommunications (SAT) ;
Vu 2°) sous le n° 97 011, la requête sommaire e

t le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 avril 1988 et 16 a...

Vu 1°) sous le n° 96 676, le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI enregistré le 1er avril 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat annule le jugement en date du 12 janvier 1988 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'INTEGRATION en date du 14 juin 1986 en tant qu'elle concerne l'article II-1, alinéas 1, 2, 3 et 5 du règlement intérieur de la société anonyme de télécommunications (SAT) ;
Vu 2°) sous le n° 97 011, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 avril 1988 et 16 août 1988, au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat présentés pour la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS dont le siège social est ..., représentée par ses dirigeants légaux en exercice domiciliés en cette qualité audit siège ; ladite société demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 12 janvier 1988, en tant qu'il rejette le surplus des conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre des affaires sociales en date du 14 juin 1986 rejetant un recours hiérarchique dirigé contre la décision du directeur régional du travail et de l'emploi de la région Aquitaine en date du 16 décembre 1985, relative au règlement intérieur de l'établissement de Bayonne de la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS ;
- annule pour excès de pouvoir ces décisions ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Roul, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Vier, Barthélémy, avocat de la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI et la requête de la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS sont relatifs à la légalité des décisions administratives concernant le même règlement intérieur ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Considérant que le recours du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI est signé par M. X... qui avait été régulièrement habilité à signer un tel acte par arrêté du ministre en date du 21 septembre 1987 ; que la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS n'est donc pas fondée à contester la qualité du signataire dudit recours ;
Considérant qu'en vertu de l'article L. 122-33 du code du travail : "L'établissement d'un rèlement intérieur est obligatoire dans les entreprises ou établissements industriels, commerciaux ou agricoles ... où sont employés habituellement au moins vingt salariés. Des dispositions spéciales peuvent être établies pour une catégorie de personnel ou une division de l'entreprise ou de l'établissement" ; qu'aux termes de l'article L. 122-34 du même code : "Le règlement intérieur est un document écrit par lequel l'employeur fixe exclusivement : - Les mesures d'application de la réglementation en matière d'hygiène et de sécurité dans l'entreprise ou l'établissement ; - les règles générales et permanentes relatives à la discipline, et notamment la nature et l'échelle des sanctions que peut prendre l'employeur ..." ; qu'aux termes de l'article L. 122-35 : "Le règlement intérieur ne peut contenir de clause contraire aux lois et règlements ainsi qu'aux dispositions des conventions et accords collectifs de travail applicables dans l'entreprise ou l'établissement ..." ; qu'aux termes de l'article L. 122-36 : "Le règlement intérieur ne peut être introduit qu'après avoir été soumis à l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, à l'avis des délégués du personnel ainsi que, pour les matières relevant de sa compétence, à l'avis du comité d'hygiène et de sécurité ... Le règlement intérieur, accompagné de l'avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et, le cas échéant, du comité d'hygiène et de sécurité est communiqué à l'inspecteur du travail" ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 122-37 : "L'inspecteur du travail peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L. 122-34 et L. 122-35", et que, selon l'article L. 122-38, "La décision de l'inspecteur du travail ... peut faire l'objet dans les deux mois d'un recours auprès du directeur régional du travail et de l'emploi ..." ;

Considérant, d'une part, que les textes précités n'interdisent pas à une entreprise comportant plusieurs établissements où sont employés habituellement au moins vingt salariés d'établir un règlement intérieur unique pour l'ensemble de ces établissements dès lors que ceux-ci ne présentent pas, au regard des prescriptions des articles L. 122-34 et L. 122-35, de particularités exigeant l'édiction de dispositions propres à l'un ou plusieurs d'entre eux ;
Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article R. 45 du code des tribunaux administratifs, les litiges relatifs à la législation régissant la réglementation du travail relèvent, lorsque la décision attaquée n'a pas un caractère réglementaire, de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouve l'établissement dont l'activité est à l'origine du litige ; que, dans le cas où une entreprise a établi un règlement intérieur unique pour l'ensemble de ses établissements, le tribunal compétent pour connaître des litiges relatifs à ce règlement est celui dans le ressort duquel se trouve le siège de ladite entreprise ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS, dont le siège social est à Paris, et qui comporte plusieurs établissements occupant habituellement au moins vingt salariés, a élaboré pour l'ensemble de ses établissements un règlement intérieur unique ; que, dès lors, le tribunal administratif de Pau n'était pas territorialement compétent pour statuer sur les demandes de ladite société dirigées contre les décisions administratives relatives à ce règlement intérieur ; qu'il y a lieu, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du recours, d'annuler le jugement attaqué ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS devant le tribunal administratif de Pau ;
Sur la légalité de la décision du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI en date du 14 juin 1986 :
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant que dans le cas où un règlement intérieur unique peut être établi, seul l'inspecteur du travail dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise est compétent pour exercer le contrôle prévu par l'article L. 122-37 du code du travail ; que, par suite, si le ministre peut, sur recours hiérarchique, statuer sur des modifications exigées par cet inspecteur et confirmées par le directeur régional du travail et de l'emploi dont il dépend, il ne pouvait, sans porter atteinte au principe de l'unicité du règlement intérieur, se borner, comme il l'a fait, à se prononcer sur les modifications demandées par l'inspecteur du travail de Bayonne et par le directeur régional du travail et de l'emploi d'Aquitaine qui étaient incompétents ; qu'il a commis un excès de pouvoir en se prononçant, par sa décision du 14 juin 1986, sur les modifications demandées par ces autorités ; que la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS est donc fondée à demander l'annulation de ladite décision ;
Article 1er : Le jugement n° 9 553 en date du 12 janvier 1988 du tribunal administratif de Pau est annulé.
Article 2 : La décision du 14 juin 1986 du MINISTRE DES AFFAIRES SOCIALES ET DE L'EMPLOI est annulée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE ANONYME DE TELECOMMUNICATIONS et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - CONDITIONS DE TRAVAIL - REGLEMENT INTERIEUR - CONTROLE PAR L'INSPECTEUR DU TRAVAIL (1) Compétence territoriale - Règlement intérieur unique dans une entreprise comportant plusieurs établissements - Inspecteur du travail dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise - (2) Recours - Recours hiérarchique - Recours hiérarchique adressé au ministre - Etendue des pouvoirs du ministre - Unicité du règlement intérieur - Effets.

66-03-01-01(1) Dans le cas où, dans une entreprise comportant plusieurs établissements où sont employés habituellement au moins vingt salariés, un règlement intérieur unique peut être établi, seul l'inspecteur du travail dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise est compétent pour exercer le contrôle prévu par l'article L.122-37 du code du travail.

66-03-01-01(2) Dans le cas où un règlement intérieur unique peut être établi, seul l'inspecteur du travail dans le ressort duquel se trouve le siège social de l'entreprise est compétent pour exercer le contrôle prévu par l'article L.122-37 du code du travail. Sur recours hiérarchique, le ministre peut statuer sur des modifications exigées par cet inspecteur et confirmées par le directeur régional du travail et de l'emploi dont il dépend. Mais il ne peut, sans porter atteinte au principe de l'unicité du règlement intérieur, se borner à se prononcer sur les modifications demandées par un inspecteur du travail et un directeur régional du travail et de l'emploi territorialement incompétents.


Références :

Arrêté du 21 septembre 1987
Code des tribunaux administratifs R45
Code du travail L122-33, L122-34, L122-35, L122-36, L122-37, L122-38


Publications
Proposition de citation: CE, 05 mai. 1993, n° 96676;97011
Mentionné aux tables du recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: Mme Roul
Rapporteur public ?: M. Bonichot

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 05/05/1993
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 96676;97011
Numéro NOR : CETATEXT000007838777 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1993-05-05;96676 ?
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