Vu le recours du MINISTRE DELEGUE AU BUDGET enregistré le 11 mars 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre demande que le Conseil d'Etat annule le jugement, en date du 14 novembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 22 mars 1989 par laquelle le sous-directeur chargé du service de la législation fiscale au ministre de l'économie, des finances et du budget a refusé à la société anonyme "Finance Y..." le bénéfice de l'agrément prévu à l'article 220 quater du code général des impôts ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code général des impôts ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Vulpillières, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 220 quater du code général des impôts : "I. Lorsque des membres du personnel d'une entreprise industrielle ou commerciale y exerçant un emploi salarié créent une société pour assurer la continuité de l'entreprise par le rachat d'une fraction de son capital, ladite société bénéficie d'un crédit d'impôt égal au montant de l'impôt sur les sociétés dû par la société rachetée au titre de l'exercice précédent, dans la proportion des droits sociaux qu'elle détient dans la société rachetée ... Ce régime est accordé sur agrément du ministre de l'économie, des finances et du budget. II. Le bénéfice des dispositions du I est subordonné aux conditions suivantes : 1°) Les membres du personnel de l'entreprise rachetée visés au premier alinéa du I doivent détenir plus de 50 % des droits de vote attachés aux parts, actions ou certificats de droit de vote de la société créée ; 2°) la société créée doit détenir plus de 50 % des droits de vote de la société rachetée ; 3°) Lors de la fusion des deux sociétés les membres du personnel visés au premier alinéa du I doivent détenir plus de 50 % des droits de vote de la société résultant de la fusion ..." ;
Considérant que pour refuser à la société anonyme "Finance Y..." la délivrance de l'agrément prévu par l'article 220 quater du code général des impôts, le ministre de l'économie, des finances et du budget s'est fondé sur le fait que ladite société, créée pour réaliser le rachat d'une fraction du capital de la société anonyme "Pierre Y...", était contrôlée par un seul salarié de cette dernière société , M. Michel X..., et ne comportait, à une seule exception près, que des membres de la famille de celui-ci et qu'ainsi l'opération de reprise en cause n'avait pas pour objet d'assurer la continuité de la société anonyme "Pierre Y..." mais correspondait en réalité à une transmission familiale de celle-ci ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 220 quater que celles-ci n'excluent pas, pour permettre de bénéficier du régime fiscal qu'elles prévoient, que la société opérant le rachat comporte un actionnaire détenant seul ou avec des membres de sa famille le contrôle de ladite société et qu'elles n'exigent pas non plus que les actionnaires de cette société n'aient pas entre eux des liens de parenté ;
Considérant, en second lieu, que la circonstance que M. Michel X... était le neveu de M. et Mme Y... propriétaires, avant l'opération de rachat, de 95 % du capital de la société "Pierre Y...", qu'il exerçait dans celle-ci les fonctions de président-directeur général depuis le 1er janvier 1985, et que l'acquisition des parts détenues par M. et Mme Pierre Y... aurait été opérée à un prix élevé et grâce exclusivement à un emprunt pour lequel était demandé l'octroi du régime prévu à l'article 83 bis du code général des impôts ne permet pas d'affirmer que le but poursuivi à l'occasion de l'opération susanalysée n'ait pas été d'assurer la continuité de la société "Pierre Y..." conformément à l'objectif prévu par les dispositions précitées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les motifs de la décision de refus d'agrément opposée à la société anonyme "Finance Y..." n'étant pas de nature à justifier celle-ci, le ministre de l'économie, des finances et du budget n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé ladite décision ;
Article 1er : Le recours du ministre de l'économie, des finances et du budget est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme "Finance Y..." et au ministre du budget .