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11/06/1993 | FRANCE | N°67259

France | France, Conseil d'État, 3 / 5 ssr, 11 juin 1993, 67259


Vu la requête, enregistrée le 28 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Jane X..., demeurant ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 décembre 1984, en tant que ce jugement a rejeté les conclusions de sa demande tendant d'une part à l'annulation des décisions des 12 et 20 octobre 1979 du ministre de la défense fixant les sommes dues à l'intéressée à la suite de son licenciement de l'école des pupilles de l'Air pour suppression d'emploi et d'autre part à ce que l'E

tat soit condamné à lui verser, en outre, des dommages-intérêts ;
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Vu la requête, enregistrée le 28 mars 1985 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour Mme Jane X..., demeurant ... ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
1° annule le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 décembre 1984, en tant que ce jugement a rejeté les conclusions de sa demande tendant d'une part à l'annulation des décisions des 12 et 20 octobre 1979 du ministre de la défense fixant les sommes dues à l'intéressée à la suite de son licenciement de l'école des pupilles de l'Air pour suppression d'emploi et d'autre part à ce que l'Etat soit condamné à lui verser, en outre, des dommages-intérêts ;
2° condamne l'Etat à lui payer, d'une part, la somme de 46 426 F au titre des allocations pour perte d'emploi et allocations supplémentaires d'attente et, d'autre part, la somme de 167 288 F pour réparer les préjudices matériel et moral qu'elle a subis du fait de l'administration ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 67-580 du 13 juillet 1967 relative à certaines mesures applicables en cas de licenciement ;
Vu le décret n° 72-512 du 22 juin 1972 modifié relatif au licenciement des agents civils non fonctionnaires des administrations de l'Etat ;
Vu le décret n° 68-1130 du 16 décembre 1968 fixant, en ce qui concerne les agents mentionnés au premier alinéa de l'article 21 de l'ordonnance n° 67-580 du 13 juillet 1967, les conditions d'attribution et de calcul de l'allocation pour perte d'emploi ;
Vu le décret n° 75-246 du 14 avril 1975 relatif à l'allocation supplémentaire d'attente complétant l'allocation pour perte d'emploi prévue par le décret n° 68-1130 du 16 décembre 1968 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Labarre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme Jane X...,
- les conclusions de M. Pochard, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions relatives à l'allocation pour perte d'emploi :
Considérant qu'en vertu de l'article L. 351-18 du code du travail issu de l'article 21 de l'ordonnance n° 67-580 du 13 juillet 1967 relative aux garanties de ressources des travailleurs privés d'emploi, "les agents civils non fonctionnaires de l'Etat ... ont droit, en cas de licenciement et à condition d'avoir été employés de manière permanente à une allocation" ... qui est dite "allocation pour perte d'emploi" par l'article R. 351-38 du même code issu du décret du 16 décembre 1968 qui détermine les conditions d'attribution et de calcul de cette allocation ; qu'il ressort des dispositions combinées des articles R. 351-42 et R. 351-43 du code du travail que le droit à l'attribution de l'allocation pour perte d'emploi est ouvert aux travailleurs privés d'emploi à dater de leur inscription comme demandeurs d'emploi et, au plus tôt, le lendemain du jour de leur licenciement, et que les titulaires de ce droit bénéficient de 365 allocations journalières avec un supplément de 244 allocations journalières s'ils sont âgés d'au moins cinquante ans à la date de leur licenciement ;
Considérant que Mme X... qui était agent civil non-fonctionnaire de l'Etat depuis 1960 a été licenciée au 1er janvier 1978 alors qu'elle avait dépassé l'âge de 50 ans et a, pour cette perte d'emploi, bénéficié de 321 allocations journalières qui lui ont été payées à partir du 1er juillet 1979 à l'issue d'un stage de formation professionnelle qu'elle a suivi du 3 janvier 1978 au 30 juin 1979 ; que Mme X... soutient qu'en tenant compte de son droit à une nouvelle période d'indemnisation qui se serait ouverte à la fin de son stage assimilable à un nouveau licenciement, il lui était dû depuis son licenciement du 1er janvier 1978 un total de 912 allocations journalières qui devaient lui être payées pour les trois premiers mois de la période d'indemnisation, au taux majoré de 15 % prévu par un arrêté interministériel du 16 décembre 1968 ; qu'elle demande que l'Etat soit condamné à lui verser les sommes correspondant au montant des allocations journalières dont elle aurait été illégalement privée ;
En ce qui concerne le nombre d'allocations journalières :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 351-56 du code du travail applicable aux agents civils non-fonctionnaires de l'Etat : "En cas de versement d'une indemnité de licenciement supérieure au triple du minimum prévu à l'article R. 122-1 du présent code, la somme des montants mensuels de cette indemnité de licenciement et de l'allocation pour perte d'emploi ne peut dépasser le montant de la rémunération brute perçue au cours du dernier mois civil précédant le licenciement. Le cas échéant, l'allocation pour perte d'emploi est réduite à dûe concurrence ..." ; que d'après l'article R. 122-1 du même code : "L'indemnité minimum de licenciement ... ne peut être inférieure à une somme calculée, par année de service dans l'entreprise, sur la base de ... un dixième de mois pour les travailleurs rémunérés au mois. Le salaire servant de base au calcul de l'indemnité est le salaire moyen des trois derniers mois" ;
Considérant que par application des dispositions du décret du 22 juin 1972 relatif au licenciement des agents civils non-fonctionnaires des administrations de l'Etat, Mme X... a bénéficié d'une indemnité de licenciement d'un montant total non contesté de 53 597,38 F qui lui a été payée, conformément aux dispositions de l'article 8 de ce décret, par mensualités pour la période du 1er janvier 1978 au 15 octobre 1978 ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'indemnité de licenciement minimum à laquelle Mme X... aurait pu prétendre, si cette indemnité avait été calculée, ainsi qu'il est prévu à l'article R. 122-1 ci-dessus rappelé du code du travail, sur la base du salaire moyen de l'intéressée des trois derniers mois précédant son licenciement et en tenant compte du nombre d'années de services qu'elle a accomplies, s'élève à 13 930,92 F ; que Mme X... à qui il a été ainsi versé une indemnité de licenciement supérieure au triple de l'indemnité minimale prévue à l'article R. 122-1 du code du travail, ne conteste pas que le montant mensuel de son indemnité de licenciement était égal à sa rémunération brute du mois civil précédant son licenciement ; qu'il suit de là que c'est par une exacte application de la disposition ci-dessus rappelée de l'article R. 351-56 que son administration lui a refusé le paiement des allocations journalières pour perte d'emploi pour la période comprise entre le licenciement et le 15 octobre 1978 pendant laquelle elle a bénéficié de l'indemnité de licenciement ;

Considérant, d'autre part, que l'article R. 351-55 du code du travail applicable aux agents civils non-fonctionnaires de l'Etat prévoit dans son dernier alinéa que le montant des allocations pour perte d'emploi, perçues au cours d'un même mois, doit être réduit du montant de l'indemnité éventuellement perçue au titre d'un stage de formation professionnelle ou de perfectionnement professionnel dans un centre agréé par l'Etat ; qu'il n'est pas contesté que pour la période du 15 octobre 1978 au 30 juin 1979 pendant laquelle elle suivait son stage de formation professionnelle dans un centre agréé par l'Etat, Mme X... a perçu une indemnité de stage dont le montant égal, à celui de son salaire avant le licenciement, excédait le montant mensuel de l'allocation pour perte d'emploi à laquelle elle aurait pu prétendre ; que, c'est dès lors, par une exacte application de la disposition ci-dessus rappelée de l'article R. 351-55 du code du travail que son administration lui a refusé le paiement des allocations journalières pour perte d'emploi pour la période du 15 octobre 1978 au 30 juin 1979 ;
Considérant, enfin, qu'à l'expiration du stage de formation professionnelle qu'elle a suivi comme il a été dit précédemment du 3 janvier 1978 au 30 juin 1979, Mme X... ne peut être regardée, même si elle a perçu une indemnité de stage équivalente à sa rémunération avant le licenciement du 1er janvier 1978, comme ayant fait l'objet d'un nouveau licenciement lui ouvrant droit au bénéfice de l'article R. 351-44 du code du travail d'après lequel "les intéressés qui ont retrouvé un emploi sont réadmis au bénéfice de l'allocation s'ils sont licenciés et réunissent à nouveau les conditions prévues aux articles R. 351-39 et R. 351-40" ; que la requérante ne peut utilement se prévaloir à l'appui de ses prétentions, de la disposition de l'article R. 351-46 issue de l'article 9 du décret du 16 décembre 1968 qui se borne à fixer le taux applicable aux allocations qui sont dues en cas de réadmission au bénéfice de l'allocation pour perte d'emploi ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à soutenir qu'elle avait droit à un nombre d'allocations journalières pour perte d'emploi supérieur à celui dont elle a bénéficié ;
En ce qui concerne le droit de Mme X... à des allocations journalières calculées d'après un taux majoré :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 351-51 du code du travail "le taux de l'allocation journalière est fixé par arrêté du secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique, du ministre de l'intérieur, du ministre de l'économie et des finances, du ministre chargé du travail" ; que l'arrêté interministériel du 16 décembre 1968 qui a été pris pour l'application de cette disposition prévoit en son article 1er : "l'allocation journalière ... est égale à 35 % du salaire journalier moyen de référence. Toutefois les allocations journalières servies pendant les trois premiers mois d'une même période d'indemnisation sont majorées de 15 %" ; qu'il résulte de cette disposition que Mme X... ne peut prétendre à la majoration de 15 % dès lors que pour les trois premiers mois de la période d'indemnisation qui s'est ouverte, en vertu de l'article R. 351-42 du code du travail, à dater de son inscription comme demandeur d'emploi, elle n'avait pas droit, ainsi qu'il a été dit précédemment, au versement des allocations journalières pour perte d'emploi ;
Sur les conclusions relatives à l'allocation supplémentaire d'attente :
Considérant qu'en vertu de l'article 1er du décret du 14 avril 1975, "l'allocation pour perte d'emploi ... peut être complétée par une allocation supplémentaire d'attente ..." et que d'après l'article 4 du même décret "l'intéressé peut bénéficier au maximum de 365 allocations journalières" ; qu'il résulte de ces dispositions que Mme X... n'est pas fondée à soutenir que c'est illégalement qu'elle a été privée du bénéfice de l'allocation supplémentaire d'attente pour la période comprise entre son licenciement et le 15 octobre 1978 pendant laquelle elle n'avait pas droit au versement des allocations journalières pour perte d'emploi ; qu'en l'absence de toute disposition le prévoyant, Mme X... ne peut prétendre à une revalorisation des allocations journalières qu'elle a perçues au titre de l'allocation supplémentaire d'attente ;
Sur les autres conclusions de la requête :

Considérant, d'une part que Mme X... ne tenait d'aucune disposition le droit de percevoir une pré-retraite ;
Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que les conclusions de Mme X... tendant à ce que l'Etat soit condamné à l'indemniser pour les préjudices que lui aurait causés son administration en lui refusant l'intégralité de ses droits à l'allocation pour perte d'emploi et à l'allocation supplémentaire d'attente, doivent être rejetées sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre de la défense ;
Considérant, enfin que Mme X... n'apporte aucune précision pour justifier la demande d'indemnité qu'elle fonde sur la faute qu'aurait commise son administration en ne facilitant pas son reclassement ou sa reconversion dans un nouvel emploi ;
Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme X... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : La requête de Mme X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme X... et au ministre d'Etat, ministre de la défense.


Synthèse
Formation : 3 / 5 ssr
Numéro d'arrêt : 67259
Date de la décision : 11/06/1993
Type d'affaire : Administrative

Analyses

ARMEES - PERSONNELS DES ARMEES - PERSONNELS CIVILS DES ARMEES.

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CESSATION DE FONCTIONS - LICENCIEMENT - ALLOCATION POUR PERTE D'EMPLOI.

TRAVAIL ET EMPLOI - POLITIQUES DE L'EMPLOI - INDEMNISATION DES TRAVAILLEURS PRIVES D'EMPLOI.


Références :

Arrêté du 16 décembre 1968 art. 1
Code du travail L351-18, R351-38, R351-42, R351-43, R351-56, R122-1, R351-55, R351-44, R351-51
Décret 68-1130 du 16 décembre 1968 art. 9
Décret 72-512 du 22 juin 1972
Décret 75-246 du 14 avril 1975 art. 1, art. 4
Ordonnance 67-580 du 13 juillet 1967 art. 21


Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 1993, n° 67259
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Labarre
Rapporteur public ?: Pochard

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:67259.19930611
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