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28/07/1993 | FRANCE | N°76560

France | France, Conseil d'État, 9 / 8 ssr, 28 juillet 1993, 76560


Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 13 mars 1986 ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 2 octobre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit aux conclusions en réduction des cotisations de taxe professionnelle mises à la charge de la société "Samadoc" au titre des années 1980, 1981 et 1982, à raison du centre commercial de "Rosny II" qu'elle exploite à Rosny-sous-Bois ;
2°) décide que la société Samadoc sera ré

tablie au rôle de la taxe professionnelle au titre des années 1980, 1...

Vu le recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET enregistré au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 13 mars 1986 ; le ministre demande que le Conseil d'Etat :
1°) réforme le jugement du 2 octobre 1985 par lequel le tribunal administratif de Paris a partiellement fait droit aux conclusions en réduction des cotisations de taxe professionnelle mises à la charge de la société "Samadoc" au titre des années 1980, 1981 et 1982, à raison du centre commercial de "Rosny II" qu'elle exploite à Rosny-sous-Bois ;
2°) décide que la société Samadoc sera rétablie au rôle de la taxe professionnelle au titre des années 1980, 1981 et 1982 compte tenu d'une valeur locative au m2 pondéré de 184 F en ce qui concerne le magasin, majorée de la quote-part de la valeur locative des locaux communs et que les frais d'expertise seront mis à la charge de la société à concurrence de 75 % de leur montant ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Fabre, Conseiller d'Etat,
- les observations de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la société "Samadoc",
- les conclusions de M. Loloum, Commissaire du gouvernement ;

Sur les bases d'imposition contestées :
Considérant, en premier lieu, que selon l'article 1467 du code général des impôts : "La taxe professionnelle a pour base la valeur locative des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle ..." ;
Considérant que, si la société "Samadoc" qui exploite dans le centre commercial "Rosny II" dans la commune de Rosny-sous-Bois un magasin de 16 235 m2 à l'enseigne de la Samaritaine est locataire des locaux communs du centre et est tenue, par une clause de son bail, de payer une quote-part des frais d'entretien de ces locaux, elle ne peut être regardée comme disposant, à titre privatif, de ceux-ci pour les besoins de son activité professionnelle, dès lors que l'accès du public à ces mêmes locaux n'est aucunement subordonné à la fréquentation des immeubles commerciaux installés dans le centre ; que le ministre n'est donc pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a retranché des bases de la taxe professionnelle due, au titre des années 1980 à 1982, par la société "Samadoc", la quote-part de valeur locative des locaux communs du centre commercial "Rosny II" qui y avait été incluse ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1498 pour les biens qui ne sont pas loués à des conditions de prix normales, ".. la valeur locative est déterminée par comparaison. Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ... La valeur locative est arrêtée ... par comparaison avec des immeubles similaires ... et qui faisaient l'objet ... de locations consenties à des conditions normales" (à la date du 1er janvier 1970) ;

Considérant que le magasin exploité à "Rosny II" par la société "Samadoc", occupé en vertu d'un contrat de crédit bail, n'était pas loué à des conditions de prix normales ; que, pour fixer à 147,65 F par m2 la valeur locative dudit magasin, les premiers juges, se fondant sur les résultats d'une expertise, ont retenu la moyenne des valeurs de 158,30 F et de 137 F, correspondant aux valeurs locatives moyennes, d'une part, d'autres grands magasins de la région parisienne, d'autre part, d'autres locaux commerciaux du centre de Rosny II ; qu'il résulte, cependant, de l'instruction que plusieurs de ces grands magasins n'étaient pas loués à des conditions normales et que lesdits locaux commerciaux du centre de Rosny II ne pouvaient être regardés comme similaires au grand magasin qu'y exploitait la société "Samadoc" ; que le ministre propose de substituer à la valeur locative de 147,65 F celle de 184 F, correspondant, après application d'un abattement de 5 %, à la valeur locative de 194 F par m2 pondéré, ressortant du loyer consenti à des conditions normales, à la date du 1er janvier 1970, à la société "Bazar de l'hôtel de ville" pour le magasin de 9 720 m2 qu'elle exploitait rue de Flandre, à Paris ;
Mais considérant qu'eu égard aux particularités de tous ordres, tenant notamment aux différences de conditions économiques à Paris et à Rosny-sous-Bois, qui distinguent le magasin exploité par la société "Samadoc" à Rosny de l'immeuble commercial de la rue de Flandre à Paris, l'abattement de 5 % proposé par le ministre sur la valeur locative de ce dernier immeuble doit être regardé comme insuffisant ; qu'il ne sera pas fait une appréciation exagérée de ces caractères distinctifs en portant cet abattement à 15 % et en retenant en conséquence, pour le magasin de la société "Samadoc" à Rosny, la valeur locative de 165 F par m2 pondéré ;
Sur les frais d'expertise exposés en première instance :

Considérant qu'aux termes du 2ème alinéa de l'article R.207-1 du livre des procédures fiscales : "Les frais d'expertise sont supportés par la partie qui n'obtient pas satisfaction. Le contribuable qui obtient partiellement gain de cause participe aux frais en proportion de la part de sa demande qui a été rejetée et compte tenu de l'état du litige au début de l'expertise" ;
Considérant que la valeur locative du magasin de la société "Samadoc" ne pouvait être connue avec précision ; que cette dernière a pu, dans ces conditions, s'abstenir d'indiquer le montant de la réduction à laquelle elle estimait avoir droit ; que, par suite, elle ne peut être réputée n'avoir pas même partiellement obtenu satisfaction, au sens de l'article R.207-1 précité ; que le ministre n'est, dès lors, pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a mis à la charge de l'Etat une fraction, égale à 75 %, des frais d'expertise ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a seulement lieu de réformer le jugement en cause en tant qu'il a fixé à 147,65 F et non à 165 F par m2 pondéré, la valeur locative du magasin exploité à Rosny II par la société "Samadoc" ;
Sur les conclusions de la société "Samadoc" qui tendent à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat à verser à la société "Samadoc" la somme de 15 000 F ;
Article 1er : Pour la détermination des bases de la taxe professionnelle assignée à la société "Samadoc" dans les rôles de la commune de Rosny-sous-Bois, au titre des années 1980, 1981 et 1982, la valeur locative au m2 pondéré du magasin exploité par cette société dans le centre commercial de "Rosny II" est fixée à 165 F.
Article 2 : La société "Samadoc" est rétablie au rôle de la taxe professionnelle au titre des années 1980, 1981 et 1982 sur les bases de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 2 octobre 1985 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.
Article 4 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DEL'ECONOMIE, DES FINANCES ET DU BUDGET est rejeté.
Article 5 : L'Etat paiera à la société "Samadoc" la somme de 15 000 F, au titre de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 6 : La présente décision sera notifiée au ministre du budget et à la société "Samadoc".


Synthèse
Formation : 9 / 8 ssr
Numéro d'arrêt : 76560
Date de la décision : 28/07/1993
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-03-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - TAXE PROFESSIONNELLE


Références :

CGI 1467, 1498
CGI Livre des procédures fiscales R207-1
Loi 91-647 du 10 juillet 1991


Publications
Proposition de citation : CE, 28 jui. 1993, n° 76560
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Fabre
Rapporteur public ?: Loloum

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:76560.19930728
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