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08/10/1993 | FRANCE | N°139665

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 08 octobre 1993, 139665


Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le PREFET DE LA SEINE-MARITIME demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du 20 juin 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision en date du 18 juin 1992 décidant la reconduite de M. Kémal X... à destination de la Turquie ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par M. X... devant

le tribunal administratif de Rouen, dirigées contre ladite décision ;
V...

Vu la requête, enregistrée le 24 juillet 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DE LA SEINE-MARITIME ; le PREFET DE LA SEINE-MARITIME demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'article 1er du jugement du 20 juin 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen a annulé sa décision en date du 18 juin 1992 décidant la reconduite de M. Kémal X... à destination de la Turquie ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Rouen, dirigées contre ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne l'arrêté du 18 juin 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X... :
Considérant que M. X..., dont la demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 9 avril 1990, devenue définitive, s'est maintenu au-delà d'un mois à compter de la notification, le 8 octobre 1990, de la décision du même jour du PREFET DE LA SEINE-MARITIME lui refusant le renouvellement de son autorisation provisoire de séjour et l'invitant à quitter le territoire dans le délai d'un mois ; que l'intéressé se trouvait donc dans le cas prévu par l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifié où le préfet peut décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME n'aurait pas examiné l'ensemble de la situation de M. X... avant de prendre à son encontre une mesure de reconduite à la frontière, ni qu'il ait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de ladite mesure sur la situation personnelle de M. X... ;
Considérant qu'il suit de là que M. X... n'est pas fondé à demander, par la voie du recours incident, l'annulation de l'article 2 du jugement susvisé qui a rejeté les conclusions de sa demande dirigées contre l'arrêté en date du 18 juin 1992 ordonnant sa reconduite à la frontière ;
En ce qui concerne la décision du PREFET DE LA SEINE-MARITIME décidant la reconduite à la frontière de M. X... vers son pays d'origine :

Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, la demande de M. X... tendant à ce que lui soit reconnue la qualité de réfugié politique a été rejetée par une décision de l'ofice français de protection des réfugiés et apatrides en date du 9 avril 1990 contre laquelle l'intéressé n'a pas formé de recours devant la commission des recours des réfugiés ; que si M. X... invoque la publicité faite sur sa participation à une grève de la faim, cette circonstance n'est pas par elle-même de nature à établir l'existence des risques allégués par l'intéressé en cas de retour dans son pays d'origine ; que si M. X... fait état par ailleurs de la situation actuelle en Turquie, de son appartenance ethnique et de son engagement politique, l'intéressé ne produit aucun élément relatif à sa situation personnelle permettant de regarder comme établies des circonstances de nature à faire légalement obstacle à sa reconduite à destination de son pays d'origine ; que M. X... n'est, par suite, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que les stipulations des articles 2 et 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 2-2 du protocole n° 4 à ladite convention auraient été méconnues ;
Considérant qu'il suit de là que le PREFET DE LA SEINE-MARITIME est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'article 1er du jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen, a annulé la décision prescrivant que M. X... sera reconduit en Turquie ;
Article 1er : L'article 1er du jugement susvisé du conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Rouen en date du 20 juin 1992 est annulé.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. X... devant le tribunal administratif de Rouen, dirigées contre la décision prescrivant sa reconduite à destination de la Turquie sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions du recours incident de M. X... tendant à l'annulation de l'article 2 du jugement attaqué et de l'arrêté du 18 juin 1992 ordonnant sa reconduite à la frontière sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE LA SEINE-MARITIME, à M. X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 139665
Date de la décision : 08/10/1993
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - INSTRUCTION - Caractère contradictoire de la procédure - Obligation à respecter malgré la brièveté du délai imparti au tribunal administratif pour statuer.

335-03-03-04, 54-04-03-03 En dépit de la brièveté du délai de quarante-huit heures imparti pour statuer, le tribunal administratif doit communiquer au préfet un mémoire complémentaire qui comporte des moyens non énoncés dans la requête initiale et sur lesquels le président du tribunal administratif ou son délégué se fonde pour annuler l'arrêté de reconduite à la frontière.

PROCEDURE - INSTRUCTION - CARACTERE CONTRADICTOIRE DE LA PROCEDURE - PROCEDURES PARTICULIERES ET JURIDICTIONS SPECIALISEES - Reconduite à la frontière - Obligation de respecter le caractère contradictoire de la procédure - malgré la brièveté du délai imparti au tribunal administratif pour statuer.


Références :

Convention européenne du 04 novembre 1950 sauvegarde des droits de l'homme art. 2, art. 3
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22
protocole n° 4 art. 2-2


Publications
Proposition de citation : CE, 08 oct. 1993, n° 139665
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:139665.19931008
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