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13/10/1993 | FRANCE | N°132126

France | France, Conseil d'État, 7 /10 ssr, 13 octobre 1993, 132126


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 décembre 1991 et 2 avril 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 4 juillet 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 1990 par lequel le maire de Villiers-sur-Marne a accordé, à Mme Colette Y..., un permis de construire pour la surélévation d'un pavillon à usage d'habitation et l'aménagement

d'un garage en local commercial ;
2°) annule l'arrêté du 12 mars 19...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 2 décembre 1991 et 2 avril 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Jean-Pierre Y..., demeurant ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 4 juillet 1991 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 mars 1990 par lequel le maire de Villiers-sur-Marne a accordé, à Mme Colette Y..., un permis de construire pour la surélévation d'un pavillon à usage d'habitation et l'aménagement d'un garage en local commercial ;
2°) annule l'arrêté du 12 mars 1990 précité ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu le code de la construction et de l'habitation ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de Lesquen, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Delaporte, Briard, avocat de M. Jean-Pierre Y... et de la S.C.P. Lemaitre, Monod, avocat de Mmes Annie et Colette Y...,
- les conclusions de M. Lasvignes, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Y..., qui se prétend copropriétaire de la parcelle E 1706 constituant avec la parcelle E 454 le terrain d'assiette des constructions sur lesquelles doivent être effectués les aménagements autorisés par le permis de construire délivré à Mme Colette Y..., par le maire de Villiers-sur-Marne le 12 mars 1990, produit devant le Conseil d'Etat un acte notarié, en date du 2 décembre 1983, dont il résulte que la parcelle E 1706, qui figure à l'actif de la communauté de biens des époux Y..., est incluse dans la succession de son père dont il serait héritier avec sa mère et sa soeur ; qu'il justifie ainsi d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire ; que, par suite, M. Y... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 4 juillet 1991, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande comme irrecevable et à demander pour ce motif l'annulation de ce jugement ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article R.421-1-1 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.421-1-1 du code de l'urbanisme : "La demande de permis est présentée par le propriétaire du terrain ou son mandataire ..." ; qu'il ressort des pièces du dossier soumis au maire de Villiers-sur-Marne lorsqu'il a pris la décision attaquée et notamment du certificat établi le 22 février 1990, par Me X..., notaire, que Mme Colette Y... devait être regardée comme le propriétaire apparent de la parcelle cadastrée E 1706 faisant l'objet de la demande de permis de construire ;
Sur le moyen tiré de la violation de l'article R.421-2 du code de l'urbanisme :

Considérant qu'aux termes de l'article R.421-2 du code de l'urbanisme : "Le dossier joint à la demande de permis de construire est constitué par le plan de situation du terrain, le plan masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions ..." ; que les moyens tirés de l'absence du plan de situation et de l'indication de la couleur des matériaux et des menuiseries extérieures manquent en fait ; que si le plan masse n'est pas coté en trois dimensions, les conditions posées par les dispositions susrappelées du code de l'urbanisme n'ont pas été méconnues dès lors que le dossier comprend les plans des façades sur lesquels ont été reportées les hauteurs des deux bâtiments ; que les dispositions du même article R.421-2 du code aux termes desquelles "Lorsque la demande concerne la construction de bâtiments ou d'ouvrages devant être desservis par des équipements publics, le plan de masse visé à l'alinéa précédent indique le tracé de ces équipements et les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages y seront raccordés", ne peuvent concerner des travaux de modification d'une construction existante située sur un terrain déjà raccordé aux équipements publics ;
Sur la violation des articles R.111-2 et R.111-4 du code de l'urbanisme :
Considérant qu'aux termes de l'article R.111-2 : "Le permis de construire peut être refusé ou n'être accordé que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions par leur situation ... sont de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique" ; qu'en application de l'article R.111-4 : "Le permis peut être refusé sur des terrains qui ne seraient pas desservis par des voies publiques ou privées dans des conditions répondant à l'importance ou à la destination de l'immeuble" ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le maire de Villiers-sur-Marne ait commis une erreur manifeste d'appréciation en autorisant la surélévation d'un pavillon et la transformation d'un garage en salon de beauté sur un terrain sis rue Jean-Jaurès, cette voie présentant une largeur moyenne de 15 m, suffisante pour la desserte d'un établissement de soins de beauté de dimension modeste ;
Sur la violation de l'article R.123-22 du code de la construction et de l'habitation :

Considérant qu'il résulte de l'article R.123-14 du code de la construction et de l'habitation que les autres dispositions de ce code relatives à la protection contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public, à l'exception de celles des articles R.123-45 et R.123-48 à R.123-50 auxquels il fait référence expressément, ne sont pas applicables aux établissements dans lesquels l'effectif du public n'atteint pas le chiffre fixé par le règlement de sécurité ; qu'en particulier, le permis de construire un de ces établissements n'a pas à être précédé de la consultation de la commission de sécurité compétente prévue à l'article R.123-22 du code de la construction et de l'habitation ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le salon de beauté pour lequel Mme Colette Y... a sollicité un permis de construire est appelé à recevoir un public dont l'effectif n'atteint pas le chiffre fixé par le règlement de sécurité pour ce type d'établissement ; qu'ainsi la commission de sécurité n'avait pas à être consultée préalablement à la délivrance du permis de construire ;
Sur les violations du règlement du plan d'occupation des sols de Villiers-sur-Marne :
En ce qui concerne l'article UE 3 :
Considérant que selon cet article : "A l'intérieur d'une propriété, toute construction ... devra disposer d'un accès d'au moins 3,5 m de large" ; que le pavillon situé sur la parcelle E 454 dispose d'un accès de 4 m ; qu'ainsi le moyen tiré de la violation de l'article UE 3 ne peut être accueilli ;
En ce qui concerne l'article UE 5 :

Considérant qu'aux termes de cet article : "Un terrain ne peut recevoir aucune construction s'il ne satisfait aux conditions suivantes : Avoir une surface minimale de 200 m2 et une façade d'au moins 8 m" ; que la superficie des parcelles servant d'assiette aux bâtiments est de 498 m2 et la longueur de la façade sur voie de 9,45 m ; qu'ainsi le moyen tiré par M. Jean-Pierre Y... de la violation desdites prescriptions n'est pas fondé ;
En ce qui concerne l'article UE 6 :
Considérant qu'aux termes de cet article : "Toute construction devra : être édifiée à au moins 4 m de l'alignement actuel ... Des dispositions différentes pourront être autorisées, notamment ... pour permettre l'amélioration des constructions existantes" ; que les travaux qui font l'objet du permis de construire délivré le 12 mars 1990, destinés à permettre la transformation d'un garage en salon de beauté, comportent notamment un ravalement de la façade de l'immeuble, la modification de ses ouvertures et la réalisation d'une nouvelle toiture qui doivent être regardés en l'espèce comme constituant une amélioration de la construction existante ; que, par suite, le maire de Villiers-sur-Marne a pu autoriser ces aménagements, réalisés sur un bâtiment construit à l'alignement, sans méconnaître les dispositions précitées relatives à l'implantation des constructions par rapport aux voies ;
En ce qui concerne l'article UE 7 :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article UE 7-I-1) : "Dans une bande de 20 m comptée à partir de la marge de reculement imposée (article UE 6), les constructions sont autorisées sur les limites séparatives ou en retrait" ; qu'il n'est pas contesté que le salon de beauté dont l'aménagement est autorisé est édifié, comme il l'a été dit ci-dessus à l'alignement, c'est-à-dire dans la bande des 20 m, et en limite séparative ; que M. Y... ne saurait invoquer une prétendue violation des règles édictées au II du même article UE 7 qui ne concerne que la construction de bâtiments annexes au-delà de la bande des 20 m ;
En ce qui concerne l'article UE 9 :

Considérant que selon cet article : "L'emprise au sol des constructions (annexes comprises) ne pourra excéder 30 % ; qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la superficie des parcelles est de 498 m2 ; que, dès lors, le permis litigieux, accordé pour un projet comportant une emprise au sol de 129 m2 n'a pas méconnu les dispositions qui précèdent ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-I de la loi susvisée du 10 juillet 1991 et de condamner M. Y... à payer la somme de 10 000 F à la commune de Villiers-sur-Marne et celle de 15 000 F à Mmes Colette et Annie Y... ;
Article 1er : Le jugement en date du 4 juillet 1991 du tribunal administratif de Paris est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Villiers-sur-Marne et de Mmes Colette et Annie Y... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Y..., à Mmes Colette et Annie Y..., au maire de Villiers-sur-Marne et au ministre de l'équipement, des transports et du tourisme.


Synthèse
Formation : 7 /10 ssr
Numéro d'arrêt : 132126
Date de la décision : 13/10/1993
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

COMPETENCE - COMPETENCES CONCURRENTES DES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - CONTENTIEUX DE L'INTERPRETATION - CAS OU UNE QUESTION PREJUDICIELLE NE S'IMPOSE PAS - Question préjudicielle du juge administratif au juge judiciaire - Autre - Qualité de copropriétaire - par laquelle le requérant justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation d'un permis de construire.

17-04-01-02, 54-01-04-02-01, 68-07-01-02 Justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour demander l'annulation du permis de construire celui qui se prétend copropriétaire d'une parcelle constituant en partie le terrain d'assiette des constructions sur lesquelles doivent être effectués les aménagements autorisés par le permis de construire délivré à sa mère, et qui produit un acte notarié dont il résulte que cette parcelle est incluse dans la succession de son père dont il serait héritier avec sa mère et sa soeur. Requérant recevable, sans qu'il y ait à poser de question préjudicielle aux juridictions judiciaires (sol. impl.).

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - INTERET POUR AGIR - EXISTENCE D'UN INTERET - INTERET LIE A UNE QUALITE PARTICULIERE - Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Copropriétaire apparent de la parcelle constituant le terrain d'assiette des constructions faisant l'objet du permis.

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - INTERET A AGIR - Existence - Copropriétaire apparent d'une parcelle constituant le terrain d'assiette des constructions faisant l'objet du permis.


Références :

Code de l'urbanisme R421-1-1, R421-2, R111-2, R111-4
Code de la construction et de l'habitation R123-22, R123-14, R123-45, R123-48 à R123-50
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation : CE, 13 oct. 1993, n° 132126
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. de Lesquen
Rapporteur public ?: M. Lasvignes

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:132126.19931013
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