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05/11/1993 | FRANCE | N°100132

France | France, Conseil d'État, 6 / 2 ssr, 05 novembre 1993, 100132


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 juillet 1988 et 18 novembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société anonyme SOCOCHARE, dont le siège est rue du Petit Versailles à Château-Renault (37110) ; la société anonyme SOCOCHARE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 13 mai 1988 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 13 juin 1986 par lequel l'inspecteur du travail de la deuxième section de l'Indre-et-Loire lui a r

efusé l'autorisation de licencier Mlle X... ;
2°) d'annuler ladite dé...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 18 juillet 1988 et 18 novembre 1988 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par la société anonyme SOCOCHARE, dont le siège est rue du Petit Versailles à Château-Renault (37110) ; la société anonyme SOCOCHARE demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 13 mai 1988 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande dirigée contre la décision en date du 13 juin 1986 par lequel l'inspecteur du travail de la deuxième section de l'Indre-et-Loire lui a refusé l'autorisation de licencier Mlle X... ;
2°) d'annuler ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. de la Verpillière, Maître des requêtes,
- les observations de la SCP Gatineau, avocat de la S.A. SOCOCHARE et de la SCP Masse-Dessen, Georges, Thouvenin, avocat de Mlle Barbara X...,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 425-1 du code du travail, le licenciement d'un délégué du personnel "ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ; qu'en vertu du cinquième alinéa du même article, "la même procédure s'applique lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de délégué du personnel a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de sa candidature avant que le candidat n'ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement prévu à l'article L. 122-14" ; que selon le huitième alinéa, "afin de faciliter la mise en place de l'institution des délégués, les salariés qui ont demandé à l'employeur d'organiser les élections de délégués du personnel ou d'accepter d'organiser ces élections, bénéficient de la procédure prévue aux alinéas ci-dessus pendant une durée de six mois qui court à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation a, la première, demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections" ; que le neuvième alinéa dispose que "la procédure prévue à l'alinéa précédent ne peut s'appliquer qu'à un seul salarié par organisation syndicale ainsi qu'au premier salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a demandé l'organisation des élections" ;
Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des huitième et neuvième alinéas de l'article L. 425-1 que le délai de protection accordé au salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a le premier demandé à l'employeur d'organiser les élections de délégués du personnel ne court qu'à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation a, la première, demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections, et non à compter de la demande effectuée par le salarié concerné ; que si, en l'espèce, Mlle X... a écrit le 20 mai 1986 à son employeur pour lui demander d'organiser des élections, la lettre par laquelle une organisation syndicale a présenté une demande similaire n'a été envoyée à l'employeur que le 20 juin 1986, soit postérieurement à la décision du 13 juin par laquelle l'inspecteur du travail a refusé à la société anonyme SOCOCHARE l'autorisation de licencier Mlle X... ; qu'il suit de là qu'à la date de cette décision, la salariée ne bénéficiait pas de la protection prévue au huitième alinéa de l'article L. 425-1 ;

Considérant, en deuxième lieu, que si, dans sa lettre du 20 mai 1986, Mlle X... faisait part à son employeur de son intention de se porter candidate aux élections dont elle demandait l'organisation, une telle démarche ne pouvait lui ouvrir droit au bénéfice de la protection prévue par le cinquième alinéa de l'article L. 425-1 dès lors que d'une part elle ne valait pas notification de candidature par un syndicat, et que d'autre part elle ne pouvait établir l'imminence de la présentation de la candidature de l'intéressée par un syndicat, en l'absence d'éléments connus de l'employeur et tendant à faire présager que cette candidature serait présentée par une des organisations syndicales représentatives qui sont seules habilitées à établir des listes de candidature pour le premier tour de scrutin en vertu de l'article L. 423-14 du code du travail ; que dès lors les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 425-1 ne lui étaient pas applicables ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'inspecteur du travail ne tenait de l'article L. 425-1 ni d'aucune autre disposition législative, le pouvoir de se prononcer sur la demande d'autorisation de licenciement dont la société anonyme SOCOCHARE avait cru devoir le saisir ; que la décision en date du 13 juin 1986 par laquelle il a refusé cette autorisation est par suite entachée d'incompétence et doit être annulée, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Orléans en date du 13 mai 1988, ensemble la décision de l'inspecteur du travail de la deuxième section de l'Indre-et-Loire endate du 13 juin 1986, sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme SOCOCHARE, à Mlle X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 6 / 2 ssr
Numéro d'arrêt : 100132
Date de la décision : 05/11/1993
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - BENEFICE DE LA PROTECTION - DELEGUES DU PERSONNEL - Candidats à l'élection des délégués du personnel (alinéas 5 - 8 et 9 de l'article L - 425-1 du code du travail) - Conditions de mise en oeuvre de la protection - (1) Point de départ du délai de protection - Demande d'organisation d'élections adressée par une organisation syndicale - (2) Effets d'une lettre par laquelle un employé annonce son intention de se porter candidat à des élections dont il demande l'organisation - antérieurement à l'envoi d'une lettre par une organisation syndicale demandant ou acceptant qu'il soit procédé à des élections - Absence de protection.

66-07-01-01-02(1) Il résulte des dispositions combinées des huitième et neuvième alinéas de l'article L.425-1 du code du travail que le délai de protection accordé au salarié, non mandaté par une organisation syndicale, qui a le premier demandé à l'employeur d'organiser les élections de délégués du personnel ne court qu'à compter de l'envoi à l'employeur de la lettre recommandée par laquelle une organisation a, la première, demandé ou accepté qu'il soit procédé à des élections, et non à compter de la demande effectuée par le salarié concerné.

66-07-01-01-02(2) La lettre par laquelle un employé annonce à son employeur son intention de se porter candidat à des élections dont il demande l'organisation ne lui ouvre pas droit au bénéfice de la protection prévue par le cinquième alinéa de l'article L.425-1 du code du travail dès lors que d'une part elle ne valait pas notification de candidature par un syndicat, et que d'autre part elle ne pouvait établir l'imminence de la présentation de la candidature de l'intéressé par un syndicat, en l'absence d'éléments connus de l'entreprise et tendant à faire présager que cette candidature serait présentée par une des organisations syndicales représentatives, qui sont seules habilitées à établir les listes de candidatures pour le premier tour de scrutin.


Références :

Code du travail L425-1, L423-14


Publications
Proposition de citation : CE, 05 nov. 1993, n° 100132
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Combarnous
Rapporteur ?: M. de la Verpillière
Rapporteur public ?: M. Sanson

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1993:100132.19931105
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