Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat les 26 décembre 1989 et 20 avril 1990, présentés pour la commune de Fauillet (Lot-et-Garonne), représentée par son maire en exercice ; la commune de Fauillet demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 octobre 1989 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du 2 mai 1988 du préfet du Lot-et-Garonne, portant modification des limites territoriales de la commune requérante et de la commune de Tonneins et fixant les conditions patrimoniales et financières de cette modification ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes et notamment ses articles R.112-19 et R.112-20 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Gervasoni, Auditeur,
- les observations de la S.C.P. Waquet, Farge, Hazan, avocat de la commune de Fauillet,
- les conclusions de M. Toutée, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article R.112-19 du code des communes : "Les modifications aux limites territoriales des communes et le transfert de chefs-lieux sont décidées après enquête dans les communes intéressées sur le projet lui-même et sur ses conditions. Le commissaire de la République prescrit cette enquête lorsqu'il a été saisi d'une demande à cet effet soit par le conseil municipal de l'une des communes, soit par le tiers des électeurs inscrits de la commune ou de la portion de territoire en question. Il peut aussi l'ordonner d'office (...)" ;
Considérant que par une délibération de son conseil municipal en date du 23 octobre 1987, la commune de Tonneins a demandé au préfet du Lot-et-Garonne de prescrire l'enquête prévue par l'article R.112-19 précité, aux fins que soit prononcé le rattachement à son territoire des zones industrielles de Suriray et de Guillaume-Mon-Amy, sises sur le territoire de la commune voisine de Fauillet à laquelle elle avait été associée du 1er janvier 1973 au 15 septembre 1987 ; que l'enquête ayant eu lieu du 16 novembre 1987 au 7 décembre 1987 dans les deux communes, le commissaire-enquêteur a émis un avis favorable au rattachement à Tonneins des deux zones insdustrielles susmentionnées ;
Considérant, en premier lieu, que la circonstance que le maire de Tonneins ait remis au commissaire-enquêteur une urne contenant un grand nombre de pétitions recueillies auprès d'habitants de la commune favorables au projet n'a pas été de nature à entacher l'enquête d'irrégularité ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le commissaire-enquêteur ait manqué d'impartialité ou se soit fondé, pour émettre son avis, sur des informations inexactes ;
Considérant, en deuxième lieu, que si le projet soumis à l'enquête prévoyait le rattachement à Tonneins des deux zones industrielles situées sur le territoire de Fauillet, alors que le préfet a prononcé le rattachement à Tonneins d'une seule de ces deux zones, cette modification du projet initial n'est pas, dans les circonstances de l'espèce et eu égard notamment à la superficie respective des terrains concernés, de nature à entacher d'illégalité l'acte attaqué ;
Considérant, en troisième lieu, que si l'article R.112-28 du code des communes dispose que : "Les actes qui prononcent les fusions ou les distractions de communes en déterminent toutes les conditions autres que celles qui sont mentionnées aux articles R.112-25 à R.112-27", ces dispositions n'obligent pas le préfet, compétent pour prononcer la modification des limites territoriales des communes, à en fixer toutes les modalités dans un seul arrêté ; qu'il suit de là qu'en renvoyant, par l'article 7 de l'arrêté attaqué, le règlement de certaines des conditions financières et patrimoniales résultant du rattachement à Tonneins de la zone de Suriray à une convention entre les deux communes entérinée par arrêté préfectoral, le préfet n'a pas méconnu sa compétence ni violé l'article R.112-28 précité ;
Considérant enfin qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté attaqué soit fondé sur des faits matériellement inexacts ; que, compte tenu des conditions dans lesquelles les deux zones industrielles avaient été créées sur le territoire de la commune de Fauillet à l'époque où elle était fusionnée avec la commune de Tonneins et eu égard à la nécessité de favoriser le développement économique de Tonneins et de limiter l'endettement de Fauillet, il ne résulte pas de l'instruction que le préfet du Lot-et-Garonne ait commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant le rattachement à la commune de Tonneins de la zone industrielle de Suriray ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Fauillet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 2 mai 1988 du préfet du Lot-et-Garonne ;
Article 1er : La requête de la commune de Fauillet est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Fauillet, à la commune de Tonneins et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.