Vu la requête, enregistrée le 2 novembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le préfet des Yvelines, qui demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 14 octobre 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 12 octobre 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de Mlle Hamima X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle X... devant le tribunal administratif de Versailles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-l127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ; Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'administration que Mlle X... est entrée en France avec sa famille, à l'âge de 5 ans, en 1962 ; qu'elle a résidé en France de 1962 à 1986 et, après deux séjours en Algérie, a rejoint en France sa famille en 1988 puis en 1989 ; que, dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à l'absence de toute attache conservée par la requérante dans son pays d'origine et à la circonstance que ses parents et ses frères et soeurs résident régulièrement sur le territoire ou ont la nationalité française, l'arrêté en date du 12 octobre 1992 par lequel le préfet des Yvelines a ordonné la reconduite de Mlle X... à la frontière porte au droit de celle-ci au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'il a ainsi méconnu les stipulations de l'article 8 susmentionné de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet des Yvelines n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué du tribunal administratif de Versailles a annulé son arrêté en date du 12 octobre 1992 ;
Article 1er : La requête du préfet des Yvelines est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au préfet des Yvelines, à Mlle X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.