Vu la requête, enregistrée le 9 décembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par M. Henri X..., demeurant Résidence Les Orchidées 19, rue Léon Dierx à Saint-Denis-de-la-Réunion ; M. X... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 21 novembre 1991 par laquelle le secrétaire général du Conseil d'Etat lui a refusé le bénéfice de la première fraction de l'indemnité d'éloignement à la suite de sa nomination en qualité de président du tribunal administratif de Saint-Denis-de-la-Réunion ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Simon-Michel, Auditeur,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret du 22 décembre 1953 : "Les fonctionnaires de l'Etat qui recevront une affectation dans l'un des départements de la Guadeloupe, de la Guyane française, de la Martinique ou de la Réunion, à la suite de leur entrée dans l'administration, d'une promotion ou d'une mutation et dont le précédent domicile était distant de plus de 3 000 km du lieu d'exercice de leurs nouvelles fonctions percevront, s'ils accomplissent une durée minimum de services de quatre années consécutives, une indemnité dénommée indemnité d'éloignement des départements d'outre-mer" ; qu'aux termes de l'article 7 du même décret : "Dans le cas où le même fonctionnaire de l'Etat serait amené à bénéficier de l'indemnité d'éloignement, successivement dans les conditions fixées par les articles 2, 3 ou 6 ci-dessus, il ne pourra, en toute hypothèse, percevoir plus de trois des versements fractionnés prévus pour le paiement de ladite indemnité" ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions précitées que si un fonctionnaire peut, au cours de sa carrière, être appelé à percevoir plusieurs fois l'indemnité d'éloignement, c'est à la condition que les séjours administratifs qui y donnent droit n'aient pas un caractère immédiatement successif, c'est-à-dire qu'ils soient séparés par une période durant laquelle ledit fonctionnaire a, soit été affecté en un lieu qui, compte tenu de son domicile, n'était pas de nature à lui ouvrir droit à ladite indemnité, soit reçu une affectation en un autre lieu, à la condition qu'il n'ait pas perçu d'indemnité d'éloignement au titre de ce séjour ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X... a conservé le centre de ses intérêts en Martinique dont il est originaire ; qu'il a perçu une première indemnité d'éloignement au titre de son séjour en qualité de conseiller au tribunal administratif de SaintDenis-de-la-Réunion à compter du 14 mars 1985 ; qu'il a ensuite été détaché pour servir au ministère de l'éducation nationale à Paris à compter du 1er août 1988 avant d'être nommé en qualité de vice-président du tribunal administratif de Marseille le 1er août 1990 ; qu'il a été nommé le 2 octobre 1991 en qualité de président du tribunal administratif de Saint-Denis-de-la-Réunion ; que, compte tenu de la circonstance qu'il n'a perçu aucune indemnité d'éloignement durant son séjour passé en France métropolitaine de 1988 à 1991, M. X... était en droit de prétendre, ainsi qu'il l'a sollicité, au bénéfice de la première fraction d'une nouvelle indemnité d'éloignement au titre de l'article 2 du décret du 22 décembre 1953, sans qu'y fassent obstacle les dispositions de l'article 7 dudit décret ; que, par suite, M. X... est fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision par laquelle le secrétaire général du Conseil d'Etat lui a refusé le bénéfice de la première fraction de cette nouvelle indemnité d'éloignement ;
Article 1er : La décision du secrétaire général du Conseil d'Etat en date du 21 novembre 1991 est annulée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.