Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 11 juillet 1991 et le 6 novembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour le MINISTRE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS et FRANCE TELECOM, ayant son siège ..., représenté par son président en exercice ; le MINISTRE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS et FRANCE TELECOM demandent au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 23 avril 1991 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté le recours du ministre des postes et télécommunications tendant, d'une part, à l'annulation du jugement du 20 janvier 1988 par lequel le tribunal administratif de Besançon a relaxé l'entreprise Haefeli des fins de la poursuite engagée contre elle pour contravention de grande voirie, d'autre part, à la condamnation de cette entreprise à lui payer une somme de 64 339,63 F augmentée des intérêts de droit ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des postes et télécommunications ;
Vu la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Seban, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat du MINISTRE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS et de FRANCE TELECOM et de la SCP Coutard, Mayer, avocat de l'entreprise Haefeli,
- les conclusions de M. Sanson, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions du pourvoi :
Considérant que l'article L. 69-1 ajouté au code des postes et télécommunications par l'article 1er de la loi du 28 juin 1978 institue dans ses premier, deuxième et quatrième alinéas une contravention de grande voirie à l'encontre de quiconque détériore ou dégrade une installation du réseau souterrain des télécommunications ou en compromet le fonctionnement ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 69-1 : "Lorsque, sur demande du maître de l'ouvrage ou du maître d'oeuvre d'opérations de travaux publics ou privés, l'administration n'a pas donné connaissance à l'entreprise, avant l'ouverture du chantier, de l'emplacement des réseaux souterrains existant dans l'emprise des travaux projetés, l'infraction prévue au présent article ne peut être retenue. Les conditions dans lesquelles s'effectuera la communication de ces informations seront déterminées par décret en Conseil d'Etat" ; que sur ce fondement, le décret du 28 décembre 1978 a ajouté au code précité un article R. 44-1 qui précise que les demandes de renseignements concernant l'emplacement des ouvrages souterrains sont présentées par le maître de l'ouvrage ou le maître d'oeuvre au directeur des services régionaux des télécommunications et qu'elles doivent comporter notamment la mention de l'adresse ou du siège social du ou des entrepreneurs chargés de l'exécution des travaux ; que l'article R. 44-2 ajouté au code précité par le décret du 28 décembre 1978 dispose dans son premier alinéa que : "L'administration des postes et télécommunications adresse, par lettre recommandée ou par télex, sa réponse aux entrepreneurs mentionnés à l'article précédent avant l'ouverture du chantier" ;
Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que lorsqu'elle est interrogée par le maître de l'ouvrage ou le maître d'oeuvre sur l'emplacement de réseaux souterrains dans l'emprise de travaux projetés, il incombe à l'administration des postes et télécommunications d'adresser sa réponse directement à l'entrepreneur et que cette réponse doit parvenir à ce dernier par lettre recommandée ou par télex ; que ces formalités revêtent un caractère substantiel ;
Considérant que pour confirmer le jugement relaxant l'entreprise Haefeli de l'infraction instituée par l'article L. 69-1 du code précité, à la suite de la détérioration par cette entreprise de deux câbles souterrains de télécommunication, la cour administrative d'appel de Nancy a relevé qu'en réponse à une demande de renseignements du maître d'oeuvre adressée en temps utile à l'administration des postes et télécommunications, celle-ci n'a pas fait parvenir d'information directement à l'entrepreneur selon l'une ou l'autre des modalités prévues par l'article R. 44-2 du code des postes et télécommunications ; qu'en déduisant de ces constatations que l'infraction constatée ne pouvait être retenue, les juges du fond, loin de méconnaître les prescriptions du code des postes et télécommunications, en ont légalement fait application ; que l'arrêt attaqué est suffisamment motivé et n'est entaché d'aucune dénaturation des pièces du dossier ;
Considérant, dès lors, que le MINISTRE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS et FRANCE TELECOM ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils défèrent au juge de cassation ;
Sur les conclusions de l'entreprise Haefeli tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu, par application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991, de condamner solidairement l'Etat et FRANCE TELECOM à payer à l'entreprise Haefeli la somme de 8 000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le pourvoi du MINISTRE DES POSTES ET TELECOMMUNICATIONS et de FRANCE TELECOM est rejeté.
Article 2 : L'Etat et FRANCE TELECOM sont condamnés solidairement à payer à l'entreprise Haefeli la somme de 8 000 F en application de l'article 75-I de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'industrie, des postes et télécommunications et du commerce extérieur, à FRANCE TELECOM et à l'entreprise Haefeli.