Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 21 mai et 23 septembre 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. et Mme Y..., demeurant ... Combles ; M. et Mme Y... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 19 mars 1991 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté leur demande dirigée contre l'arrêté du 18 septembre 1987, par lequel le préfet de la Somme a autorisé M. Didier X... à exploiter 2 hectares 68 ares 80 centiares de terres qu'ils mettaient précédemment en valeur ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code rural ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mlle Laigneau, Auditeur,
- les observations de la SCP Rouvière, Boutet, avocat de M. et Mme Y...,
- les conclusions de M. Frydman, Commissaire du gouvernement ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'en vertu du 5° de l'article 188-5 du code rural, dans sa rédaction résultant de la loi du 4 juillet 1980 modifiée : "La commission départementale des structures agricoles, compétente pour examiner les demandes d'autorisation de cumul d'exploitations, est tenue, à leur demande, de communiquer aux demandeurs, au propriétaire ou au preneur, au moins huit jours à l'avance, les pièces du dossier et d'entendre leurs observations ;
Considérant que si ces dispositions, qui garantissent aux personnes intéressées le caractère contradictoire de la procédure devant la commission départementale, n'imposent ni l'audition desdites personnes, ni la communication systématique à celles-ci des pièces du dossier soumis à l'avis de la commission, elles impliquent nécessairement que ces personnes soient informées du dépôt d'une demande d'autorisation de cumul ; que lorsque le préfet, saisi d'un recours gracieux à l'encontre d'une décision de refus d'autorisation d'exploiter, soumet la demande à un nouvel examen de la commission départementale, celle-ci est tenue de respecter la procédure prévue par les dispositions susmentionnées du 5° de l'article 188-5 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'après avoir refusé à M. X..., par un arrêté du 11 août 1987, l'autorisation d'exploiter 2 hectares 68 ares 80 centiares de terres précédemment mises en valeur par M. et Mme Y..., le préfet de la Somme, après que l'intéressé eut formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision, a délivré l'autorisation sollicitée par un arrêté du 18 septembre 1987 pris après avis favorable de la commission départementale des structures agricoles ; que les preneurs en place n'ont pas été informés du nouvel examen de la demande de M. X... auquel la commission départementale devait procéder le 7 septembre 1987 ; qu'ainsi les requérants, qui n'ont pas été mis à même de bénéficier des dispositions précitées de l'article 188-5 du code rural, sont fondés à soutenir que l'arrêté du 18 septembre 1987 a été pris au terme d'une procédure irrégulière et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a refusé d'en prononcer l'annulation ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 19 mars 1991 et l'arrêté du 18 septembre 1987 du préfet de la Somme sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme Y..., à M. X... et au ministre de l'agriculture et de la pêche.