La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/03/1994 | FRANCE | N°147787

France | France, Conseil d'État, 10/ 7 ssr, 25 mars 1994, 147787


Vu l'ordonnance en date du 22 mars 1993, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 mai 1993, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a renvoyé au Conseil d'Etat la demande présentée par M. X... ;
Vu la requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 26 février 1993, présentée par M. Malick X..., demeurant B.P. 4230 à Dakar (Sénégal) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 10 novembre 1992 par laquelle le consul général de France à Dakar a refus

de procéder à sa réimmatriculation consulaire ;
2°) de décider qu'il se...

Vu l'ordonnance en date du 22 mars 1993, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 11 mai 1993, par laquelle le président du tribunal administratif de Paris a renvoyé au Conseil d'Etat la demande présentée par M. X... ;
Vu la requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Paris le 26 février 1993, présentée par M. Malick X..., demeurant B.P. 4230 à Dakar (Sénégal) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision en date du 10 novembre 1992 par laquelle le consul général de France à Dakar a refusé de procéder à sa réimmatriculation consulaire ;
2°) de décider qu'il sera sursis à l'exécution de cette décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la nationalité française ;
Vu la loi du 11 juillet 1979 ;
Vu le décret n° 61-464 du 8 mai 1961 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Stahl, Auditeur,
- les conclusions de M. Scanvic, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision attaquée :
Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : "Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui ... refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir" ; qu'il résulte des dispositions du décret du 8 mai 1961 relatif à l'immatriculation consulaire que les français visés à l'article 1er de ce décret ont, lorsqu'ils en ont fait la demande et dès lors qu'ils n'entrent dans aucun des cas d'exclusion énumérés à cet article, le droit d'obtenir leur immatriculation ; qu'il suit de là que la décision par laquelle l'immatriculation consulaire est refusée doit être motivée en application des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ; qu'en l'espèce, la décision en date du 10 novembre 1992 par laquelle le Consul général de France à Dakar a refusé de procéder à la réimmatriculation consulaire de M. X... satisfait à l'exigence de motivation posée par la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant, en second lieu que, pour refuser de procéder à la réimmatriculation consulaire de M. X..., le Consul s'est fondé sur le motif que le requérant avait perdu la qualité de français ; qu'à l'appui de sa requête, M. X... soutient qu'il n'a pas perdu la nationalité française à la suite de l'accession du Sénégal à l'indépendance ;
Considérant que la question de savoir si M. X..., qui est originaire du Sénégal a, du fait de l'accession de ce pays à l'indépendance, perdu la nationalité française alors même qu'à la date de cette indépendance il servait dans une unité de l'armée française en Algérie ou s'il a conservé la nationalité française présente à juger une difficulté sérieuse ; que la solution du litige pendant devant le Conseil d'Etat dépend de la solution qui sera donnée à cette question qu'il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire de trancher ; qu'il y a lieu pour le Conseil d'Etat de surseoir à statuer sur les conclusions de la requête de M. X... tendant à l'annulation de la décision de refus de réimmatriculation, jusqu'à ce que la juridiction compétente se soit prononcée sur cette question préjudicielle ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution de la décision attaquée :
Considérant que, par la décision attaquée, le Consul général de France à Dakar a refusé de procéder à la réimmatriculation de M. X..., qui avait auparavant été immatriculé dans ce consulat à compter du 25 mai 1986 ; que ce refus a pour effet de modifier la situation de l'intéressé, ce qui le rend recevable à demander qu'il soit sursis à l'exécution de cette décision ;
Considérant que le préjudice qui résulte de l'exécution de la décision attaquée est de nature à justifier l'octroi du sursis ; que le moyen tiré de ce que M. X... aurait conservé la nationalité française paraît pouvoir être de nature, en l'état de l'instruction, à justifier l'annulation de la décision attaquée ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, d'ordonner le sursis à exécution de la décision en date du 10 novembre 1982 ;
Article 1er : Il est sursis à statuer sur la requête de M. X... dirigée contre la décision du 10 novembre 1982 du Consul général de France à Dakar, jusqu'à ce que l'autorité judiciaire se soit prononcée sur le point de savoir si le requérant a perdu ou non la nationalité française. M. X... devra justifier, dans le délai de quatre mois à compter de la notification de la présente décision, de sa diligence à saisir de la question dont s'agit la juridiction compétente.
Article 2 : Jusqu'à ce qu'il ait été statué sur la requête de M. X... contre la décision du 10 novembre 1982 du Consul général de France à Dakar, il sera sursis à l'exécution de cette décision.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. Malick X... et au ministre des affaires étrangères.


Sens de l'arrêt : Sursis à statuer sursis à exécution
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir sursis à exécution

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - FORME ET PROCEDURE - QUESTIONS GENERALES - MOTIVATION - MOTIVATION OBLIGATOIRE - MOTIVATION OBLIGATOIRE EN VERTU DES ARTICLES 1 ET 2 DE LA LOI DU 11 JUILLET 1979 - DECISION REFUSANT UN AVANTAGE DONT L'ATTRIBUTION CONSTITUE UN DROIT - Existence - Refus d'immatriculation consulaire (décret n° 61-464 du 8 mai 1961).

01-03-01-02-01-01-04, 26-01-04(1) Le refus d'immatriculation (ou de réimmatriculation) consulaire doit être motivé en application de la loi du 11 juillet 1979.

COMPETENCE - REPARTITION DES COMPETENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPETENCE DETERMINEE PAR UN CRITERE JURISPRUDENTIEL - AUTORITE JUDICIAIRE GARDIENNE DE LA LIBERTE INDIVIDUELLE - DE LA PROPRIETE PRIVEE ET DE L'ETAT DES PERSONNES - ETAT DES PERSONNES - Nationalité - Détermination de la nationalité - Nationalité d'une personne demandant son immatriculation consulaire - Difficulté sérieuse justifiant une question préjudicielle à la juridiction judiciaire.

17-03-02-08-03, 26-01-01-03 Présente à juger une difficulté sérieuse et rend nécessaire une question préjudicielle à la juridiction judiciaire la question de savoir si un individu originaire du Sénégal a, du fait de l'accession de ce pays à l'indépendance, perdu la nationalité française, alors qu'à la date de cette indépendance il servait dans une unité de l'armée française en Algérie, ou s'il a conservé la nationalité française.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETAT DES PERSONNES - NATIONALITE - PROBLEMES DE COMPETENCE JURIDICTIONNELLE - Difficulté sérieuse touchant à la nationalité d'une personne - Existence - Personne originaire du Sénégal servant dans une unité de l'armée française en Algérie au moment de l'accession à l'indépendance du Sénégal.

54-03-03-01-01 La décision par laquelle un consul refuse de procéder à la réimmatriculation d'un individu, qui avait auparavant été immatriculé dans ce consulat, a pour effet de modifier la situation de l'intéressé, ce qui le rend recevable à demander qu'il soit sursis à l'exécution de cette décision.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETAT DES PERSONNES - AUTRES QUESTIONS RELATIVES A L'ETAT DES PERSONNES - Immatriculation consulaire des Français à l'étranger - Décision de refus - (1) Motivation obligatoire - (2) Préjudice de nature à justifier l'octroi du sursis - (3) Moyen tiré de ce que l'intéressé aurait conservé la nationalité française - Moyen sérieux.

26-01-04(2), 54-03-03-02-02-02 Le préjudice qui résulte de l'exécution d'un refus opposé par un consul à une demande de réimmatriculation est de nature à justifier l'octroi du sursis.

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - SURSIS A EXECUTION - RECEVABILITE - DECISIONS SUSCEPTIBLES DE FAIRE L'OBJET D'UN SURSIS - Existence - Décisions exécutoires ou qui modifient la situation de droit ou de fait de l'intéressé - Refus de réimmatriculation consulaire.

26-01-04(3), 54-03-03-02-01 Présente un caractère sérieux de nature à justifier l'annulation d'un refus de réimmatriculation consulaire le moyen tiré de ce que l'intéressé aurait conservé la nationalité française. Sursis à exécution ordonné.

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - SURSIS A EXECUTION - CONDITIONS D'OCTROI DU SURSIS - MOYENS SERIEUX - Existence - Demande de sursis à exécution d'un refus de réimmatriculation consulaire - Moyen tiré de ce que l'intéressé a conservé la nationalité française.

PROCEDURE - PROCEDURES D'URGENCE - SURSIS A EXECUTION - CONDITIONS D'OCTROI DU SURSIS - CARACTERES DU PREJUDICE - PREJUDICE JUSTIFIANT LE SURSIS - Divers - Refus de réimmatriculation consulaire.


Références :

Décret 61-464 du 08 mai 1961 art. 1
Loi 79-587 du 11 juillet 1979 art. 1


Publications
Proposition de citation: CE, 25 mar. 1994, n° 147787
Publié au recueil Lebon
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Stahl
Rapporteur public ?: M. Scanvic

Origine de la décision
Formation : 10/ 7 ssr
Date de la décision : 25/03/1994
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 147787
Numéro NOR : CETATEXT000007835454 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1994-03-25;147787 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award