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13/05/1994 | FRANCE | N°150047

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 13 mai 1994, 150047


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétaire de la section du Contentieux du Conseil d'Etat les 19 juillet 1993 et 24 août 1993, présentés pour M. A... Levais, domicilié Bourg à Vernois (15160) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 25 mai 1993 par laquelle le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a refusé de l'autoriser à intenter une action en justice à ses frais et risques en vue de se constituer partie civile pour le compte de la commune de Vernols dans le cadre de l'information ouverte devant la c

our d'appel de Riom pour ingérence et faux en écriture publique e...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés au secrétaire de la section du Contentieux du Conseil d'Etat les 19 juillet 1993 et 24 août 1993, présentés pour M. A... Levais, domicilié Bourg à Vernois (15160) ; M. Y... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision en date du 25 mai 1993 par laquelle le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a refusé de l'autoriser à intenter une action en justice à ses frais et risques en vue de se constituer partie civile pour le compte de la commune de Vernols dans le cadre de l'information ouverte devant la cour d'appel de Riom pour ingérence et faux en écriture publique et usage de faux contre M. Z..., maire et Mme X..., adjoint au maire de Vernols et l'a condamné, d'une part à payer à la commune de Vernols une somme de 5.000 F au titre des frais irrépétibles, d'autre part à une amende de 3.000 F pour recours abusif ;
2°) de condamner la commune de Vernols à lui verser la somme de 12.000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code pénal ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le décret du 28 novembre 1983 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Débat, Auditeur,
- les observations de Me Blanc, avocat de M. A... Levais et de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la commune de Vernois,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du tribunal administratif de Clermont-Ferrand refusant à M. Y... l'autorisation de plaider au nom de la commune de Vernols :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande par laquelle M. Y... a demandé à être autorisé, en application de l'article L.316-5 du code des communes, à se constituer partie civile au nom de la commune de Vernols, à l'occasion de la plainte déposée notamment pour ingérence à l'encontre du maire de cette commune et de l'un de ses adjoints, a été enregistrée au greffe du tribunal administratif de Clermont-Ferrand le 16 février 1993 ; que la décision du tribunal administratif rejetant sa demande a été rendue le 25 mai 1993 et notifiée à M. Y... le 18 juin 1993 ; que la requête de M. Y... contre cette décision a été enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 19 juillet 1993 ;
Considérant, en premier lieu, qu'en vertu des dispositions du premier alinéa de l'article R. 316-1 du code des communes, le tribunal administratif saisi par le contribuable d'un mémoire détaillé tendant à obtenir l'autorisation d'engager une action en justice au nom de la commune dans les conditions prévues par l'article L.316-6 du même code, doit en délivrer récépissé ; que, par ailleurs, en vertu des dispositions du troisième alinéa de l'article 316-1, le tribunal administratif dispose d'un délai de deux mois pour prendre sa décision, le contribuable étant pour sa part tenu, à peine de déchéance, par les dispositions des articles R. 316-2 et R. 316-3 de former un pourvoi devant le Conseil d'Etat "dans le mois qui suit, soit l'expiration du délai imparti au tribunal administratif pour statuer, soit la notification de l'arrêté portant refus ..." ; que la requête de M. Y... n'a été enregistrée au secrétariat du Conseil d'Etat que le 19 juillet 1993 soit après l'expiration du délai d'un mois suivant la décision de rejet implicite résultant du silence gardé pendant plus de deux mois par le tribunal sur sa demande ; que, toutefois, dès lors que le récépissé du mémoire détaillé qu'il lui avait adressé le 16 février 1993, qui lui avait été délivré par le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ne mentionnait pas les délais prévus par les dispositions réglementaires susrappelées, la requête de M. Y..., enregistrée dans le délai d'un mois suivant la notification de la décision expresse du tribunal administratif du 25 mai 1993, confirmative de la décision implicite refusant l'autorisation, qui lui avait alors été indiqué, ne peut être regardée comme tardive ; qu'elle est dès lors recevable ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 316-5 du code des communes : "Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d'exercer, tant en demande qu'en défense, à ses frais et risques, avec l'autorisation du tribunal administratif, les actions qu'il croit appartenir à la commune, et que celle-ci, préalablement appelée à en délibérer, a refusé ou négligé d'exercer" ; qu'il appartient au tribunal administratif statuant comme autorité administrative, et au Conseil d'Etat saisi d'un recours de pleine juridiction dirigé contre la décision du tribunal administratif, lorsqu'ils examinent une demande présentée par un contribuable sur le fondement de ces dispositions, de vérifier, sans se substituer au juge de l'action, et au vu des éléments qui leur sont fournis que l'action envisagée présente un intérêt suffisant pour la commune et qu'elle a une chance de succès ;
Considérant que la commune de Vernols a cédé à son maire une surface d'environ 30 m2 de terrain située en face de son habitation ; que M. Y... se borne à soutenir que le prix de la cession serait anormalement bas, sans apporter aucun élément précis et chiffré à l'appui de ses allégations ; que dans ces conditions, il ne ressort pas de l'instruction que l'action envisagée par M. Y... à l'encontre du maire, fondée sur le caractère prétendument délictueux des faits susrappelés, présenterait un intérêt suffisant pour la commune, qui serait de nature à justifier l'octroi de l'autorisation demandée ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision par laquelle le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a refusé de l'autoriser à engager cette action ; que les conclusions de sa requête dirigées contre la décision du tribunal administratif lui refusant l'autorisation de plaider qu'il avait sollicitée, doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions dirigées contre la décision du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en tant qu'elle condamne M. Y... à payer des frais irrépétibles et une amende pour recours abusif :
Considérant que lorsqu'il statue en application des dispositions des articles R. 316-1 à R. 316-4 du code des communes, le tribunal administratif statue comme autorité administrative et non comme autorité juridictionnelle ; que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand ne pouvait dès lors faire application des dispositions des articles L.8-1 et R.88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et condamner M. Y... à payer à la commune de Vernols des frais irrépétibles et à verser une amende pour recours abusif ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... est fondé à demander l'annulation de la décision du tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 25 mai 1993 en tant qu'elle l'a condamné à payer la somme de 5.000 F à la commune de Vernols au titre des frais irrépétibles et à payer une amende de 3.000 F pour recours abusif ;
Sur les conclusions de la commune de Vernols et de M. Y... tendant à l'application des dispositions de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 :
Considérant que, lorsqu'il est saisi d'un pourvoi introduit à l'encontre d'une décision d'un tribunal administratif prise en application des dispositions susvisées du code des communes, le Conseil d'Etat statue en tant qu'autorité juridictionnelle ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions susvisées de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de condamner M. Y... à payer à la commune de Vernols la somme qu'elle demande au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Considérant que les dispositions susvisées de l'article 75-I de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que la commune de Vernols qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. Y... la somme qu'il demande au titre des sommes exposées par lui et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : La décision du tribunal administratif de Clermont-Fernand en date du 25 mai 1993 est annulée en tant qu'elle concerne M. Y... à payer une amende pour recours abusif et des frais irrépétibles.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Y... est rejeté.
Article 3 : M. Y... versera à la commune de Vernols une somme de 10.000 F en application de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... Levais, à la commune de Vernols et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Sens de l'arrêt : Annulation partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

COMMUNE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - EXERCICE PAR UN CONTRIBUABLE DES ACTIONS APPARTENANT A LA COMMUNE - ARTICLES L - 316-5 A L - 316-8 DU CODE DES COMMUNES ET R - 316-1 A R - 316-4 DU MEME CODE DANS LEUR REDACTION ISSUE DU DECRET N° 92-180 DU 26 FEVRIER 1992 - SAISINE DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF - Pouvoirs du tribunal administratif - Octroi des frais irrépétibles et condamnation à une amende pour recours abusif - Absence.

16-08-005-02-03 Le tribunal administratif saisi, en application des articles L.316-5 et suivants du code des communes de la demande d'un contribuable tendant à exercer une action appartenant à la commune, statue comme autorité administrative et non comme autorité juridictionnelle. Il ne peut pas faire application des dispositions des articles L.8-1 et R.88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et condamner une partie à payer à l'autre des frais irrépétibles ou à verser une amende pour recours abusif.

COMMUNE - REGLES DE PROCEDURE CONTENTIEUSE SPECIALES - EXERCICE PAR UN CONTRIBUABLE DES ACTIONS APPARTENANT A LA COMMUNE - ARTICLES L - 316-5 A L - 316-8 DU CODE DES COMMUNES ET R - 316-1 A R - 316-4 DU MEME CODE DANS LEUR REDACTION ISSUE DU DECRET N° 92-180 DU 26 FEVRIER 1992 - RECOURS DEVANT LE CONSEIL D'ETAT - Délai de recours d'un mois (article R - 316-3 du code des communes - Mention obligatoire du délai à l'intéressé.

16-08-005-02-04 Lorsque le silence gardé pendant deux mois par le tribunal administratif vaut décision de rejet, le contribuable dispose d'un délai d'un mois pour se pourvoir devant le Conseil d'Etat, à moins que l'omission, dans le récépissé de la demande déposée au tribunal administratif de l'indication des délais prévus par les articles R.316-2 et R.316-3 du code des communes, n'empêche ces délais de courir.

PROCEDURE - INTRODUCTION DE L'INSTANCE - DELAIS - POINT DE DEPART DES DELAIS - AUTRES CIRCONSTANCES DETERMINANT LE POINT DE DEPART DES DELAIS - DECISIONS IMPLICITES DE REJET - Opposabilité des délais de recours contentieux - Nécessité qu'il ait été accusé réception de la demande et que les délais et voies de recours aient été mentionnés (article 5 du décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983) - Application - Existence - Exercice par un contribuable des actions appartenant à la commune.

54-01-07-02-03-02 Lorsque le silence gardé pendant deux mois par le tribunal administratif, saisi en application des articles L.316-5 et suivants du code des communes d'une demande d'un contribuable d'exercer une action appartenant à la commune, vaut décision de rejet, le contribuable dispose d'un délai d'un mois pour se pourvoir devant le Conseil d'Etat, à moins que l'omission, dans le récépissé de la demande déposée au tribunal administratif de l'indication des délais prévus par les articles R.316-2 et R.316-3 du code des communes, n'empêche ces délais de courir.

PROCEDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DEPENS - REMBOURSEMENT DES FRAIS NON COMPRIS DANS LES DEPENS - Champ d'application - Exclusion - Exercice par un contribuable des actions appartenant à la commune - Article L - 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel inapplicable devant le tribunal administratif statuant sur la demande d'autorisation de plaider.

54-06-05-11 Le tribunal administratif saisi, en application des articles L.316-5 et suivants du code des communes d'une demande d'un contribuable d'exercer une action appartenant à la commune, statue comme autorité administrative et non comme autorité juridictionnelle. Il ne peut pas faire application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et condamner une partie à payer à l'autre des frais irrépétibles.

PROCEDURE - JUGEMENTS - AMENDE POUR RECOURS ABUSIF - Champ d'application - Faculté d'y condamner une partie - Exercice par un contribuable des actions appartenant à la commune - Absence devant le tribunal administratif.

54-06-055 Le tribunal administratif saisi, en application des articles L.316-5 et suivants du code des communes d'une demande d'un contribuable d'exercer une action appartenant à la commune, statue comme autorité administrative et non comme autorité juridictionnelle. Il ne peut pas faire application de l'article R.88 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et condamner une partie à verser une amende pour recours abusif.


Références :

Code des communes L316-5, R316-1, L316-6, R316-2, R316-3, R316-4
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1, R88
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75


Publications
Proposition de citation: CE, 13 mai. 1994, n° 150047
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Debat
Rapporteur public ?: M. Le Chatelier
Avocat(s) : Me Blanc, SCP Célice, Blancpain, Avocat

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 13/05/1994
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 150047
Numéro NOR : CETATEXT000007834757 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1994-05-13;150047 ?
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