Vu, 1°) sous le n° 143702 la requête enregistrée le 21 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND (Loire) ; le MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 6 octobre 1992 en tant qu'il a annulé son arrêté en date du 1er juin 1991 ordonnant d'urgence la mise en internement de Mlle M.C. F. au centre hospitalier de Saint-Etienne ;
- rejette la demande présentée par Mlle M.C. F. devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu, 2°) sous le n° 143949 le recours du MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE enregistré le 30 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, ; le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE demande que le Conseil d'Etat :
- annule le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 6 octobre 1992, en tant qu'il a annulé les deux arrêtés du préfet de la Loire en date des 4 juin et 12 juin 1991, le premier ordonnant l'hospitalisation d'office de Mlle M.C. F. au centre hospitalier de Saint-Etienne, le second décidant le transfert de l'intéressée au centre hospitalier du Vinatier à Lyon ;
- rejette la demande présentée par Mlle M.C. F. devant le tribunal administratif de Lyon ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Faure, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M. Bonichot, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête n° 143702 du MAIRE DE SAINT-CHAMON et le recours n°143949 du MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE sont dirigés contre un même jugement du tribunal administratif de Lyon ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Sur les interventions de M. et Mme F. :
Considérant que M. et Mme F., père et mère de l'intéressée, ont intérêt au maintien du jugement attaqué ; qu'ainsi leur intervention est recevable ;
Sur la requête du MAIRE DE SAINT-CHAMOND :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 343 du code de la santé publique : "En cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique, le maire et, à Paris, les commissaires de police arrêtent, à l'égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes, toutes les mesures provisoires nécessaires, à charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au préfet qui statue sans délai et prononce, s'il y a lieu, un arrêté d'hospitalisation d'office dans les formes prévues à l'article L. 342. Faute de décision préfectorale, ces mesures provisoires sont caduques au terme d'une durée de quarante-huit heures" ;
Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : "... doivent être motivées les décisions qui restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police" ; et que, selon l'article 3 de la même loi, la motivation ainsi exigée "doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ; que l'arrêté du MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND du 1er juin 1991 ordonnant d'urgence le placement en observation de Mlle M.C. F. au centre hospitalier de Saint-Etienne mentionne que l'intéressée est présumée atteinte d'aliénation mentale en se référant à un certificat médical qui décrit avec précision l'état mental de Mlle M.C. F. au moment des faits et conclut à la nécessité d'une hospitalisation d'office ; qu'il satisfait ainsi aux exigences des dispositions précités de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND en date du 1er juin 1991 le tribunal administratif s'est fondé sur le fait que cette décision n'était pas suffisamment motivée ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle M.C. F. devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant que la circonstance que l'arrêté du MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND n'aurait été notifié ni à Mlle M.C. F. ni à sa famille est sans influence sur sa légalité ;
Considérant que cet arrêté n'a pas pour objet d'ordonner le placement d'office de Mlle M.C. F. au centre hospitalier de Saint-Etienne mais de prendre à son égard des mesures provisoires en application des dispositions de l'article L. 343 du code de la santé publique ; que ces mesures relevaient bien de la compétence du MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND ;
Considérant, enfin, que l'autorité judiciaire est seule compétente pour apprécier la nécessité d'une mesure d'internement d'office prononcée sur le fondement de l'article L. 343 du code de la santé publique ; que, par suite, le bien fondé de la mesure prise le 1er juin 1991 par le MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND à l'égard de Mlle M.C. F. ne peut être utilement discuté à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre cet arrêté ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 1er juin 1991 ;
Sur le recours du ministre :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 342 du code de la santé publique : "A Paris, le préfet de police et, dans les départements, les préfets prononcent par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'hospitalisation d'office dans un établissement mentionné à l'article L. 331 des personnes dont les troubles mentaux compromettent l'ordre public ou la sûreté des personnes. Le certificat médical circonstancié ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement accueillant le malade. Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire" ;
Considérant que l'arrêté du préfet de la Loire du 4 juin 1991 ordonnant l'hospitalisation d'office de Mlle M.C. F. au centre hospitalier de Saint-Etienne mentionne que l'intéressée a un comportement agressif et violent la rendant dangereuse pour elle-même et pour les autres, en se référant à un certificat médical qui décrit avec précision l'état mental de Mlle M.C. F. au moment des faits ; que cette motivation satisfait ainsi aux exigences des dispositions précitées du code de la santé publique ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort, d'une part, que le tribunal administratif s'est fondé, pour annuler l'arrêté préfectoral du 4 juin 1991, sur ce que cette décision n'était pas suffisamment motivée, d'autre part, a estimé qu'il y avait lieu d'annuler, par voie de conséquence, l'arrêté du préfet de la Loire du 12 juin 1991 prononçant le transfert de Mlle M.C. F. au centre hospitalier du Vinatier à Lyon ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mlle M.C. F. devant le tribunal administratif de Lyon ;
Considérant que si le tribunal administratif est compétent pour connaître de la régularité d'une décision administrative ordonnant l'hospitalisation d'office dans un établissement psychiatrique, il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire d'apprécier la nécessité de cette mesure ; que, par suite, le bien fondé de la mesure prise par le préfet de la Loire le 4 juin 1991 à l'égard de Mlle M.C. F. ne saurait être contesté devant la juridiction administrative ;
Considérant qu'en vertu de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : "... doivent être motivées les décisions qui restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police" ; et que, selon l'article 3 de la même loi, la motivation ainsi exigée "doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision" ; que l'arrêté du préfet de la Loire du 12 juin 1991 prononçant le transfert de Mlle M.C. F. du centre hospitalier de Saint-Etienne à celui du Vinatier à Lyon mentionne notamment que le praticien qui a examiné l'intéressée le 7 juin 1991 estime que celle-ci doit être transférée dans son établissement de secteur le centre hospitalier spécialisé du Vinatier, en se référant au certificat médical établi par ce praticien ; qu'il satisfait ainsi aux exigences des dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE D'ETAT, MINISTRE DE L'INTERIEUR ET DE LA SECURITE PUBLIQUE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé les arrêtés des 4 juin et 12 juin 1991 ;
Article 1er : Les interventions de M. et Mme F. sont admises.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 6 octobre 1992 est annulé en tant qu'il a annulé l'arrêté du MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND en date du 1er juin 1991 et les arrêtés du préfet de la Loire en date des 4 juin et 12 juin 1991 ;
Article 3 : la demande présentée par Mlle M.C. F. devant le tribunal administratif de Lyon, tendant à l'annulation des trois arrêtés mentionnés à l'article précédent est rejetée.
Article 4 : la présente décision sera notifiée à Mlle M.C. F., à M. et Mme F., au MAIRE DE LA COMMUNE DE SAINT-CHAMOND et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.