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27/05/1994 | FRANCE | N°119918

France | France, Conseil d'État, 2 ss, 27 mai 1994, 119918


Vu l'ordonnance, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 18 septembre 1990, par laquelle le président du tribunal administratif de Strasbourg a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à ce tribunal par M. Radu Y... ;
Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Strasbourg le 14 août 1990, présentée par M. Y..., demeurant chez Me X..., ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 2 août 1990

par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a dit qu'il n...

Vu l'ordonnance, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 18 septembre 1990, par laquelle le président du tribunal administratif de Strasbourg a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la demande présentée à ce tribunal par M. Radu Y... ;
Vu la demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Strasbourg le 14 août 1990, présentée par M. Y..., demeurant chez Me X..., ... ; M. Y... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement du 2 août 1990 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 août 1989 par lequel le préfet de la Moselle a ordonné sa reconduite à la frontière ;
2°) annule pour excès de pouvoir cet arrêté ; . . . . . . . . . . . . . .
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Chemla, Auditeur,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Y..., ressortissant de nationalité roumaine, entré irrégulièrement en France, a été interpellé le 30 août 1989 et a sollicité le bénéfice du statut de réfugié politique ; qu'il a fait l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière du préfet de la Moselle en date du 30 août 1989 ; que, sur le fondement de cet arrêté, il a été assigné à résidence par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Metz en date du 31 août 1989 ; qu'ainsi, si, par un nouvel arrêté du 5 septembre 1989, le préfet de la Moselle a abrogé son arrêté du 30 août 1989, ce dernier avait reçu un commencement d'exécution ; que la requête de M. Y... tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 août 1989 prononçant sa reconduite à la frontière n'était donc pas devenue sans objet ; que, dès lors, le jugement du 2 août 1990, par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a dit qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur cette requête, doit être annulé ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. Y... devant le tribunal administratif de Strasbourg ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il résulte de l'article 31-2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 que les Etats parties ne peuvent appliquer aux déplacements des étrangers en situation irrégulière que les restrictions nécessaires "en attendant que le statut de ces réfugiés dans le pays d'accueil ait été régularisé ou qu'ils aient réussi à se faire admettre dans un autre pays" ; qu'en vertu de la loi du 25 juillet 1952 portant création de l'office français de protection des réfugiés et apatrides, il appartient à cet office de statuer, sous le contrle de la commission des recours des réfugiés, sur les demandes tendant à ce que soit reconnue à un étranger la qualité de réfugié au sens de l'article 1er de la convention du 28 juillet 1951 précitée ;

Considérant que ces dispositions impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit en principe autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande ; qu'en l'absence de dispositions législatives et réglementaires déterminant les modalités d'application de ce principe, il appartient à l'autorité administrative de prendre les mesures nécessaires à sa mise en oeuvre ; que dans l'exercice de ce pouvoir, cette autorité doit également tenir compte des autres intérêts généraux dont elle a la charge en vue d'éviter un usage abusif des droits ainsi reconnus aux personnes qui demandent le bénéfice de la convention de Genève ; que, par suite, les personnes qui sollicitent la qualité de réfugié doivent recevoir des documents leur permettant, après avoir saisi l'office français de protection des réfugiés et apatrides de séjourner régulièrement en France jusqu'à ce qu'il ait été statué sur leur demande par l'office et, le cas échéant, par la commission des recours des réfugiés, sauf dans le cas où cette demande a manifestement pour seul objet de faire échec à une mesure d'éloignement susceptible d'être prise à l'encontre d'un étranger déjà entré sur le territoire national et se trouvant en situation irrégulière ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la demande de M.IOAN tendant à obtenir le statut de réfugié, que le préfet de la Moselle a d'ailleurs transmise à l'office français de protection des apatrides le jour même où il signait la décision de reconduite à la frontière de l'intéressé, ait eu manifestement pour seul objet de faire échec, dans un but dilatoire, à cette décision ; que, par suite, M. Y... est fondé à soutenir qu'il devait être autorisé à séjourner jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande et que la décision attaquée du préfet de la Moselle est dès lors entachée d'excès de pouvoir ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourgen date du 2 août 1990, ensemble l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 30 août 1989 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Radu Y... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 2 ss
Numéro d'arrêt : 119918
Date de la décision : 27/05/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

26-05-02-02 DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETRANGERS, REFUGIES, APATRIDES - REFUGIES ET APATRIDES - QUALITE DE REFUGIE OU D'APATRIDE


Références :

Loi 52-893 du 25 juillet 1952


Publications
Proposition de citation : CE, 27 mai. 1994, n° 119918
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Chemla
Rapporteur public ?: Abraham

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:119918.19940527
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