Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 19 septembre 1990 et 16 novembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Gérard X..., aumônier militaire, demeurant Etat-Major de la 15ème Division d'Infanterie, Caserne de la Visitation à Limoges (Haute-Vienne) ; M. X... demande au Conseil d'Etat :
1) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 28 juin 1990 rejetant ses demandes aux fins d'annulation des décisions des 27 novembre 1989, 2 décembre 1989 et 22 janvier 1990 lui enjoignant de rejoindre l'Etat-Major de la 15ème Division d'Infanterie de Limoges ;
2) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions précitées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi du 8 juillet 1880, notamment son article 3 ;
Vu la loi du 9 décembre 1905, notamment ses articles 1er et 43 ;
Vu la loi n° 72-662 du 13 juillet 1972, notamment son article 53 ;
Vu le décret n° 64-498 du 1er juin 1964 modifié par le décret n° 78-140 du 2 février 1978 ;
Vu le décret n° 74-338 du 22 avril 1974, notamment son article 8 ;
Vu le décret n° 77-162 du 18 février 1977, notamment son article 3 ;
Vu l'arrêté du ministre des armées du 8 juin 1964 pris pour l'application du décret n° 64-498 du 1er juin 1964 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Genevois, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Odent, avocat de M. X...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. X..., aumônier militaire du culte protestant, qui avait été affecté en Polynésie française en vertu d'un ordre de mutation du 11 juillet 1988 a, à la suite d'une demande en date du 2 novembre 1989 du directeur de l'aumônerie protestante aux armées, été muté d'office en métropole par décision du 27 novembre 1989 ; que par décision du 22 janvier 1990, l'autorité militaire a ordonné à l'intéressé de rejoindre son lieu d'affectation à Limoges pour le 31 janvier 1990, faisant par là-même obstacle à ce qu'il réside en Polynésie française au titre d'un congé de fin de campagne ;
Sur la proposition de mutation :
Considérant que la proposition de mutation faite par le directeur de l'aumônerie protestante aux armées ne constitue pas une mesure susceptible d'être discutée devant la juridiction administrative ;
Sur la légalité de la décision du 27 novembre 1989 :
Considérant que M. X... se trouvait placé, compte tenu de son ministère religieux, dans une situation telle que la demande de mutation en métropole formulée par l'autorité religieuse dont il dépendait en raison des conditions dans lesquelles il exerçait son ministère en Polynésie faisait obstacle au maintien de l'intéressé dans ce territoire en qualité d'aumônier militaire du culte protestant ; qu'ainsi le commandant supérieur des forces armées de la Polynésie française était tenu, comme il l'a fait, de mettre fin aux fonctions de M. X... auprès des forces armées en Polynésie ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que la décision du 27 novembre 1989 prononçant la mutation de M. X... méconnaîtrait les droits de la défense et prononcerait une sanction disciplinaire qui serait disproportionnée, sont inopérants ;
Sur le congé de fin de campagne :
Considérant que l'article 8-4 ajouté au décret du 1er juin 1964 par le décret du 2 février 1978 dispose que "le régime des congés prévus pour les officiers de réserve servant en situation d'activité est applicable aux aumôniers militaires" ; qu'en vertu de l'article 3 du décret du 18 février 1977, les officiers de réserve "peuvent obtenir" les congés prévus à l'article 53 de la loi du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires ; qu'au nombre de ces congés figure le congé de fin de campagne avec solde "d'une durée maximum de six mois" ; qu'il est spécifié à l'article 8 du décret du 22 avril 1974 que les congés de fin de campagne peuvent être suspendus "en cas de nécessité de service", le bénéfice de la fraction restante du congé étant toutefois maintenu ;
Considérant que ces dispositions confèrent à l'autorité militaire le droit de refuser le bénéfice d'un congé de fin de campagne ou de le suspendre en fonction des nécessités du service ; que, dès lors, une mutation d'office décidée dans l'intérêt du service peut légalement avoir pour effet de différer l'octroi d'un tel congé ou d'en affecter le déroulement ; qu'il suit de là que la décision du 22 janvier 1990 ordonnant à M. X... de rejoindre son affectation en métropole pour le 31 janvier 1990, sans accomplissement préalable de l'intégralité de son congé de fin de campagne, n'est pas, par elle-même, entachée d'excès de pouvoir ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes ;
Article 1er : La requête susvisée de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. X... et au ministre d'Etat, ministre de la défense.