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03/06/1994 | FRANCE | N°117333

France | France, Conseil d'État, 1 ss, 03 juin 1994, 117333


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 23 mai 1990 et 24 septembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE MATEI dont le siège est ... ; la SOCIETE MATEI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 28 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 6 janvier 1988 par laquelle l'inspecteur du travail des Côtes-du-Nord l'avait autorisée à licencier pour motif économique M. X..., salarié protégé ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... de

vant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du trava...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 23 mai 1990 et 24 septembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE MATEI dont le siège est ... ; la SOCIETE MATEI demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement en date du 28 mars 1990 par lequel le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision du 6 janvier 1988 par laquelle l'inspecteur du travail des Côtes-du-Nord l'avait autorisée à licencier pour motif économique M. X..., salarié protégé ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. X... devant ce tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :- le rapport de M. Debat, Auditeur,
- les observations de la SCP Célice, Blancpain, avocat de la SOCIETE COMMERCIALE DE MATERIELS ELECTRIQUES ET INDUSTRIELS (MATEI) et de la SCP Le Bret, Laugier, avocat de M. X...,
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article l. 436-1 du code du travail : "Tout licenciement envisagé par l'employeur d'un membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise (...) est obligatoirement soumis au comité d'entreprise qui donne un avis sur le projet de licenciement. Le licenciement ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement" ; qu'en vertu de ces dispositions, les salariés légalement investis d'un mandat de membre titulaire ou suppléant du comité d'entreprise bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est demandé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ; qu'en outre pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'à la suite de la suppression de son emploi de directeur de l'agence de Saint Brieuc, au sein de la SOCIETE MATEI, M. X..., membre du comité d'entreprise, a accepté, à titre de reclassement, à compter du 1er février 1988, l'emploi de directeur de l'agence de Lorient, dans la société C.G.E. Distribution qui appartenait au même groupe que la SOCIETE MATEI ; que la seule circonstance que le nouveau contrat de M. X... a été résilié au cours de la période d'essai sans que son employeur lui en indique les raisons n'est pas par elle-même de nature à démontrer l'absence de sérieux de l'offre de reclassement qui lui avait été faite par la SOCIETE MATEI ni par suite l'illégalité de la décision en date du 6 janvier 1988 par laquelle l'inspecteur du travail des Côtes-du-Nord avait autorisé son licenciement ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce que la résiliation du nouveau contrat de M. X... démontrait l'absence de sérieux du reclassement pour annuler la décision du 6 janvier 1988 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... devant le tribunal administratif de Rennes ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que l'emploi proposé à M. X..., qu'il a d'ailleurs accepté, au sein de la société C.G.E. Distribution équivalait quant aux qualifications exigées et à la rémunération à celui qu'occupait l'intéressé au sein de la SOCIETE MATEI ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions dont était assortie cette nouvelle embauche, à savoir l'absence de reprise d'ancienneté et l'exigence d'une période d'essai, quiauraient été moins favorables que celles des emplois de reclassement offerts à d'autres salariés de l'entreprise, aient caractérisé de la part de la SOCIETE MATEI une attitude discriminatoire qui aurait été motivée par le mandat représentatif de M. X... ; qu'enfin il ne résulte d'aucune pièce du dossier que l'offre de reclassement faite à M. X... aurait été fictive et par suite dépourvue de sérieux ; que la SOCIETE MATEI, qui n'était pas tenue de rechercher d'autres emplois au sein du groupe, doit dès lors être regardée comme ayant satisfait aux obligations qui lui incombaient pour assurer le reclassement de l'intéressé ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE MATEI est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a annulé la décision de l'inspecteur du travail des Côtes du Nord du 6 janvier 1988 ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rennes en date du 28 mars 1990 est annulé.
Article 2 : La demande de M. X... présentée devant le tribunaladministratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE MATEI, à M. X... et au ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle.


Synthèse
Formation : 1 ss
Numéro d'arrêt : 117333
Date de la décision : 03/06/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

66-07-01-04-03-01 TRAVAIL ET EMPLOI - LICENCIEMENTS - AUTORISATION ADMINISTRATIVE - SALARIES PROTEGES - CONDITIONS DE FOND DE L'AUTORISATION OU DU REFUS D'AUTORISATION - LICENCIEMENT POUR MOTIF ECONOMIQUE - OBLIGATION DE RECLASSEMENT


Publications
Proposition de citation : CE, 03 jui. 1994, n° 117333
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Debat
Rapporteur public ?: Le Chatelier

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:117333.19940603
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