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03/06/1994 | FRANCE | N°138978

France | France, Conseil d'État, 5 / 3 ssr, 03 juin 1994, 138978


Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 juillet 1992 présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE L'ACTION HUMANITAIRE ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement en date du 7 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 5 mars 1990 rejetant la demande de M. Jaques X..., directeur du laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro à Brive et du laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro à Brive, tendant au bénéfice du cumul de son activité principale avec celle relevant de la

procréation médicalement assistée en tant qu'elle concerne le tr...

Vu le recours, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 7 juillet 1992 présenté par le MINISTRE DE LA SANTE ET DE L'ACTION HUMANITAIRE ; le ministre demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler le jugement en date du 7 mai 1992 par lequel le tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision du 5 mars 1990 rejetant la demande de M. Jaques X..., directeur du laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro à Brive et du laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro à Brive, tendant au bénéfice du cumul de son activité principale avec celle relevant de la procréation médicalement assistée en tant qu'elle concerne le traitement des ovocytes humains en vue de la fécondation, de la conservation des gamètes humains, de la fécondation in vitro et de la conservation des oeufs humains fécondés en vue d'implantation ;
2° de rejeter la demande susanalysée présentée par M. Jacques X... ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 88-327 du 8 avril 1988 ;
Vu le décret n° 88-328 du 8 avril 1988 ;Vu le code de la santé publique, de la famille et de l'aide sociale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Hoss, Conseiller d'Etat,
- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M. Jacques X...,
- les conclusions de M. Daël, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que, pour annuler la décision du MINISTRE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE en date du 5 mars 1990, en tant qu'elle refuse à M. X..., directeur du laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro à Brive, l'autorisation de cumuler une activité de traitement des ovocytes humains en vue de la fécondation, de conservation des gamètes humains, de fécondation in vitro et de conservation des oeufs humains fécondés en vue d'implantation, avec son activité principale, le tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur l'illégalité dont serait entaché le décret n° 88-327 du 8 avril 1988 relatif aux opérations de procréation médicalement assistée, en tant qu'il crée pour le ministre l'obligation de recueillir, préalablement à la délivrance de l'autorisation, l'avis conforme de la commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction ;
Considérant que l'institution d'un organisme consultatif devant être consulté préalablement à l'intervention d'une autorisation administrative relève de la compétence du pouvoir réglementaire ; que les auteurs du décret précité du 28 avril 1988 n'ont pas excédé leur compétence en ajoutant la consultation de la commission dont ils prévoyaient la création aux autres consultations prévues par la loi du 31 décembre 1970 ; que les dispositions des articles 3 et 5 du même décret, si elles confient à la commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction le soin d'apprécier le caractère suffisant de certains titres ou de l'expérience possédés par les personnes qui sollicitent l'autorisation prévue par l'article 2 du même décret, ne méconnaissent ni ne limitent en rien le pouvoir du ministre chargé de la santé d'apprécier que sont remplies toutes les conditions auxquelles est subordonnée cette autorisation ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif de Limoges s'est fondé sur le motif susanalysé pour annuler la décision du ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale en date du 5 mars 1990 ;
Considérant toutefois qu'il appartient au Conseil d'Etat, saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X... et le laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro devant le tribunal administratif de Limoges ;
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 45 de la loi du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière : "Les conditions d'implantation, les modalités de fonctionnement et de financement de certains services ou organismes hospitaliers de haute technicité dont les activités de soins et de diagnostic se situent dans des domaines de pointe d'un coût élevé sont fixées par voie réglementaire" ; que les activités de procréation médicalement assistée, compte tenu des caractéristiques qu'elles présentent, doivent être regardées comme des activités de "haute technicité" au sens des dispositions précitées de l'article 45 ; que, par suite, le gouvernement a pu légalement se fonder sur les dispositions précitées pour réglementer, par le décret n° 88-327 du 8 avril 1988, l'installation des activités en cause dans les établissements d'hospitalisation publics et privés et soumettre, non seulement la création, mais aussi le maintien des activités de cette nature, aux procédures d'autorisation définies aux articles 34 et 48 de la loi du 31 décembre 1970 ; que le décret précité ayant pour base légale une disposition législative habilitant le gouvernement à instituer le régime d'autorisation préalable susanalysé, le moyen tiré de ce que les auteurs de ce décret auraient, en prenant une telle mesure, empiété sur la compétence du législateur en portant atteinte à la liberté du commerce et de l'industrie et au libre exercice des activités professionnelles ne saurait être accueilli ;

Considérant qu'aux termes de l'article 7 du décret n° 88-327 du 8 avril 1988 : "Les établissements relevant de la loi du 31 décembre 1970 dans lesquels sont pratiquées à la date d'entrée en vigueur du présent décret les activités définies à l'article 1er, devront, pour poursuivre celles-ci, demander, dans le délai de trois mois suivant la publication de ce décret, l'autorisation mentionnée à l'article 2" ; que ces dispositions rendent applicables, pour l'avenir, aux activités de procréation médicalement assistée préexistantes, activités qui ne faisaient jusqu'alors l'objet d'aucune réglementation spécifique et qui, comme toutes les activités relevant du code de la santé publique sont soumises, à compter de leur entrée en vigueur, aux mesures réglementaires légalement prises par son application, la réglementation édictée par le décret précité ; que ces dispositions ne comportent aucun effet rétroactif et ne portent pas atteinte à des droits acquis ;
Considérant que les auteurs du décret n° 88-327 du 8 avril 1988 n'ont pas entaché leur décision d'erreur manifeste d'appréciation en déterminant la composition de la commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction, composition qui présente toutes les garanties requises pour l'exercice des attributions dévolues à la commission ; qu'il résulte en outre de l'instruction que les modalités de réunion et de fonctionnement de la commission n'ont pas méconnu les conditions nécessaires à l'indépendance de ses avis ; que, notamment, les membres de la commission exerçant dans des laboratoires qui avaient demandé l'autorisation n'ont pas participé aux délibérations portant sur leur propre établissement ; que la circonstance que M. X... n'ai pas été invité à présenter ses observations devant la commission n'entache pas la légalité de la procédure suivie ;

Considérant qu'en vertu de l'article 1er du décret du 7 août 1975, la formation du Conseil supérieur des hôpitaux compétente pour examiner le projet de décret relatif aux actes de procréation médicalement assistée était la première section de ce Conseil et que c'est dans cette formation que le Conseil s'est réuni pour exprimer l'avis demandé ; que, dès lors, l'irrégularité affectant la composition de la seconde section du Conseil supérieur des hôpitaux est sans influence sur la validité de la consultation ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de la lecture du compte-rendu de la réunion au cours de laquelle a été examiné le cas de M. X..., compterendu dont l'intéressé a eu d'ailleurs connaissance, que la commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction a procédé à un examen détaillé de chaque cas ; que la décisiondu ministre, qui reprend à son compte l'appréciation exercée par la commission sur l'expérience acquise par M. X... dans le domaine concerné, est suffisamment motivée au regard des exigences de l'article 31 de la loi du 31 décembre 1970 ;
Considérant que, contrairement à ce que soutient le requérant, la dérogation sollicitée par lui n'a pas été accordée aux seuls laboratoires liés aux cliniques titulaires d'une autorisation d'exercer des actes de procréation médicalement assistée ;
Considérant que, pour refuser à M. X... l'autorisation qu'il sollicitait, le ministre dans la décision attaquée, reprend à son compte l'avis de la commission nationale de médecine et de biologie de la reproduction selon lequel l'expérience de l'intéressé à la date d'examen de son dossier n'était pas jugée suffisante pour le traitement des ovocytes, la conservation des gamètes, la fécondation in vitro et la conservation des embryons ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en motivant ainsi sa décision, le ministre ait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE LA SOLIDARITE, DE LA SANTE ET DE LA PROTECTION SOCIALE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a annulé sa décision en date du 5 mars 1990 rejetant la demande de M. X... tendant au bénéfice du cumul de son activité principale avec celle relevant de la procréation médicalement assistée en tant qu'elle concerne le traitement des ovocytes humains en vue de la fécondation, de la conservation des gamètes humains, de la fécondation in vitro et de la conservation des oeufs humains fécondés en vue d'implantation ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges endate du 7 mai 1992 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. X... et le laboratoire d'analyses médicales Leymarie-Labro devant le tribunal administratif de Limoges est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville età M. X....


Type d'affaire : Administrative

Analyses

SANTE PUBLIQUE - PROTECTION SANITAIRE DE LA FAMILLE ET DE L'ENFANCE - PROTECTION MATERNELLE ET INFANTILE - PROCREATION MEDICALEMENT ASSISTEE.

SANTE PUBLIQUE - AUTRES ETABLISSEMENTS A CARACTERE SANITAIRE - LABORATOIRES D'ANALYSES DE BIOLOGIE MEDICALE.


Références :

Décret 75-755 du 07 août 1975 art. 1
Décret 88-327 du 08 avril 1988 art. 7, art. 3, art. 5, art. 2
Loi 70-1318 du 31 décembre 1970 art. 45, art. 34, art. 48, art. 31


Publications
Proposition de citation: CE, 03 jui. 1994, n° 138978
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Hoss
Rapporteur public ?: Daël

Origine de la décision
Formation : 5 / 3 ssr
Date de la décision : 03/06/1994
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 138978
Numéro NOR : CETATEXT000007869678 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1994-06-03;138978 ?
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