Vu la requête, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat le 29 juillet 1992, présentée par le PREFET DE POLICE DE PARIS ; le PREFET DE POLICE DE PARIS demande au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 22 mai 1992 par lequel le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 22 avril 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Mayuba X... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les observations de Me Ryziger, avocat de Mme Jabbi Y... ;
- les conclusions de M. du Marais, Commissaire du gouvernement ;
Considérant, d'une part, que si Mme X... fait valoir qu'elle est mère d'un enfant né en France le 17 septembre 1990 et qu'elle séjourne sur le territoire avec son époux, ressortissant gambien titulaire d'une carte de séjour temporaire, il résulte des pièces du dossier que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour de Mme X... en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, l'arrêté du PREFET DE POLICE DE PARIS en date du 22 avril 1992 n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été pris ledit arrêté ; qu'ainsi, cet arrêté n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Considérant, d'autre part, que si Mme X... se trouvait en état de grossesse à la date de la décision attaquée, il ne résulte pas des pièces du dossier que l'intéressée ait été hors d'état de supporter un voyage sans danger pour sa santé ; que le préfet a donc pu, sans commettre d'erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de cette mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée, décider que Mme X... serait reconduite à la frontière ;
Considérant qu'il suit de là que le PREFET DE POLICE DE PARIS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le tribunal administratif de Paris s'est fondé sur une atteinte disproportionnée au droit de Mme X... au respect de sa vie familiale pour annuler son arrêté en date du 22 avril 1992 ;
Considérant toutefois qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme X... devant le tribunal administratif de Paris ;
Considérant que Mme X... a fait état de ce qu'elle-même et son mari ont souscrit le 6 décembre 1990 une déclaration tendant à l'acquisition de la nationalité française présentée pour leur enfant mineur né en France le 17 septembre 1990 en application de l'article 52 du code de la nationalité ; que, selon les dispositions de l'article 104 du même code, cette déclaration doit être, à peine de nullité, enregistrée par le ministre chargé des naturalisations qui, si les conditions légales ne sont pas remplies, refuse cet enregistrement par une décision qui doit intervenir six mois au plus après la date de la déclaration ; qu'il résulte de l'instruction que le ministre des affaires sociales et de la solidarité a refusé d'enregistrer la déclaration susvisée par une décision du 24 octobre 1991 qui, étant ainsi intervenue au-delà du délai de six mois, n'a pu faire obstacle à ce que la déclaration susmentionnée soit considérée comme enregistrée ; qu'ainsi, à la date à laquelle a été pris l'arrêté attaqué, Mme X... faisait partie des personnes visées à l'article 25-5° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée qui interdisent de reconduire à la frontière l'étranger qui est mère d'un enfant français résidant en France ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DE POLICE DE PARIS n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le conseiller délégué par le président du tribunal administratif de Paris ait annulé son arrêté du 22 avril 1992 ordonnant que Mme X... soit reconduite à la frontière ;
Article 1er : La requête du PREFET DE POLICE DE PARIS est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au PREFET DE POLICE DE PARIS, à Mme Mayuba X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.