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06/07/1994 | FRANCE | N°110494

France | France, Conseil d'État, 10/ 7 ssr, 06 juillet 1994, 110494


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 septembre 1989 et 19 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes, sis ... des Loges à Metz (57000) , dûment représenté par sa présidente en exercice, Mme Louise X... ; le comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 1989 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendan

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Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 septembre 1989 et 19 octobre 1989 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes, sis ... des Loges à Metz (57000) , dûment représenté par sa présidente en exercice, Mme Louise X... ; le comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 17 juillet 1989 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 15 mai 1987 par laquelle le commissaire de la République de la Moselle a refusé de reconnaître l'utilité publique de sa mission ;
2°) d'annuler la décision du 15 mai 1987 du commissaire de la République de la Moselle ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts, notamment son article 238 bis ;
Vu le code civil local ;
Vu le décret n° 85-1304 du 9 décembre 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Simon-Michel, Auditeur,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de la procédure :
Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n° 85-1304 du 9 décembre 1985 pris pour l'application de l'article 238 bis du code général des impôts instituant une procédure de reconnaissance de mission d'utilité publique des associations inscrites dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin : "La reconnaissance est prononcée par arrêté du préfet du département dans lequel l'association a son siège, après avis du tribunal administratif de Strasbourg" ; que la circonstance que le tribunal administratif de Strasbourg ait été amené à émettre un avis, qui d'ailleurs ne lie pas l'administration, sur une demande de reconnaissance formée en application de la disposition précitée ne fait pas obstacle par elle-même à ce que ledit tribunal se prononce, dans le cadre d'une procédure contentieuse, sur la légalité de la décision prise par le préfet au vu de cet avis ; qu'il suit de là que le comité requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué est intervenu à la suite d'une procédure irrégulière ;
Sur la légalité de la décision attaquée :
Considérant qu'aux termes du 4° de l'article 238 bis du code général des impôts applicable à la date de la décision attaquée : "La condition relative à la reconnaissance d'utilité publique est réputée remplie par les associations régies par la loi locale maintenue en vigueur dans les départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, lorsque la mission de ces associations est reconnue d'utilité publique. Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de cette reconnaissance et les modalités de la procédure déconcentrée permettant de l'accorder" ; que si le décret du 9 décembre 1985 a précisé que la mission d'utilité publique ainsi prévue ne pouvait être reconnue qu'aux associations sans but lucratif de ces trois départements, régulièrement inscrites au registre des associations, dont la gestion est désintéressée, dont les statuts interdisent tout partage de l'actif entre leurs membres et dont l'objet est à caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, familial ou culturel, il n'a pas eu pour effet de donner compétence liée au préfet pour accorder la reconnaissance d'utilité publique aux associations remplissant les conditions précitées en le privant du pouvoir d'apprécier le caractère d'utilité publique de la mission de ces associations ;

Considérant que, pour refuser de reconnaître l'utilité publique de la mission du comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes, le préfet s'est fondé sur le caractère prépondérant des fonds publics dans le financement de cette association ; qu'un tel critère peut légalement constituer un élément d'appréciation de l'utilité publique de la mission de l'association qui sollicite le bénéfice des dispositions susrappelées du code général des impôts ; qu'il résulte des pièces du dossier que si plus de 80 % des ressources du comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes proviennent de fonds publics, une partie importante d'entre elles est constituée par les prix de journées consentis aux établissements de caractère sanitaire et social qu'il gère ; qu'eu égard à l'objet de cette association et au caractère particulier des fonds publics ainsi perçus, qui ne sont pas des subventions de fonctionnement mais la contrepartie de services rendus par les établissements gérés par elle, le préfet a, en l'espèce, fait une inexacte application des dispositions précitées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 15 mai 1987 par laquelle le préfet, commissaire de la République de la Moselle, a refusé de reconnaître l'utilité publique de sa mission ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Strasbourg en date du 17 juillet 1989 et la décision du commissaire de la République de la Moselle en date du 15 mai 1987 sont annulés.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au comité mosellan de sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et des adultes et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : 10/ 7 ssr
Numéro d'arrêt : 110494
Date de la décision : 06/07/1994
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - MOTIFS - POUVOIRS ET OBLIGATIONS DE L'ADMINISTRATION - COMPETENCE LIEE - Absence - Régime des associations en Alsace-Moselle - Associations reconnues d'utilité publique - Reconnaissance du caractère d'utilité publique - Association remplissant les conditions fixées par le décret n° 85-1304 du 9 décembre 1985 - Pouvoirs du préfet.

01-05-01-03, 06-075(1), 10-02-03(1) Le décret du 9 décembre 1985 a précisé que la mission d'utilité publique prévue par le 4° de l'article 238 bis du code général des impôts ne pouvait être reconnue qu'aux associations sans but lucratif des trois départements d'Alsace-Moselle régulièrement inscrites au registre de ces associations, dont la gestion est désintéressée, dont les statuts interdisent tout partage de l'actif entre leurs membres et dont l'objet est à caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, familial ou culturel. Ces dispositions n'ont pas eu pour effet de donner compétence liée au préfet pour accorder la reconnaissance d'utilité publique à toutes les associations remplissant les conditions fixées par le décret. Il appartient donc au préfet d'apprécier le caractère d'utilité publique de la mission de chaque association.

ALSACE-LORRAINE - REGIME DES ASSOCIATIONS - Associations reconnues d'utilité publique (décret n° 85-1304 du 9 décembre 1985) - Reconnaissance du caractère d'utilité publique - (1) Association remplissant les conditions fixées par le décret - Pouvoirs du préfet - Compétence liée - Absence - (2) Critères - Refus fondé sur le caractère prépondérant des fonds publics dans le financement de l'association - a) Critère légal - b) Notion de financement sur fonds publics - Absence en l'espèce - Prix de journée représentant la contrepartie de services rendus.

06-075(2), 10-02-03(2) Le caractère prépondérant des fonds publics dans le financement d'une association peut légalement justifier le refus de reconnaître l'utilité publique de la mission de cette association, dans le cadre du 4° de l'article 238 bis du code général des impôts. Pour l'application de cette règle, n'entrent toutefois pas en compte, en raison de leur caractère particulier, les prix de journées consentis aux établissements à caractère sanitaire et social gérés par l'association requérante, qui ne sont pas des subventions de fonctionnement mais la contrepartie de services rendus par ces établissements. En l'espèce, illégalité du refus opposé par le préfet de reconnaître l'utilité publique de la mission d'une association dont une partie importante des ressources est constituée de tels prix de journées.

ASSOCIATIONS ET FONDATIONS - REGIME JURIDIQUE DES DIFFERENTES ASSOCIATIONS - ASSOCIATIONS RECONNUES D'UTILITE PUBLIQUE - Reconnaissance du caractère d'utilité publique - Alsace-Moselle - (1) Association remplissant les conditions fixées par le décret n° 85-1304 du 9 décembre 1985 - Pouvoirs du préfet - Compétence liée - Absence - (2) Critère permettant d'apprécier l'utilité publique de la mission de l'association - Critère légal - Caractère prépondérant des fonds publics dans le financement de l'association - Notion - Prix de journées versés aux établissements sociaux gérés par l'association.

54-06-01 En vertu de l'article 2 du décret du 9 décembre 1985, la reconnaissance de la mission d'utilité publique des associations inscrites en Alsace-Moselle est prononcée par arrêté du préfet pris après avis du tribunal administratif de Strasbourg. La circonstance que le tribunal administratif de Strasbourg ait été amené à émettre un avis, qui d'ailleurs ne lie pas l'administration, sur une demande de reconnaissance formée en application de cette disposition ne fait pas obstacle à ce que ce tribunal se prononce, dans le cadre d'une procédure contentieuse, sur la légalité de l'arrêté préfectoral. Régularité de la procédure.

PROCEDURE - JUGEMENTS - REGLES GENERALES DE PROCEDURE - Principe d'impartialité - Jugement par un tribunal administratif de la légalité d'un arrêté préfectoral pris après avis de ce tribunal - Régularité - Régime des associations en Alsace-Moselle (décret n° 85-1304 du 9 décembre 1985).


Références :

CGI 238 bis
Décret 85-1304 du 09 décembre 1985 art. 2


Publications
Proposition de citation : CE, 06 jui. 1994, n° 110494
Publié au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. Vught
Rapporteur ?: M. Simon-Michel
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:110494.19940706
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