Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 25 janvier 1991 et 13 février 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour l'UNION HOSPITALIERE PRIVEE, dont le siège est ... et pour la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE, dont le siège est ... ; l'UNION HOSPITALIERE PRIVEE et la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE demandent l'annulation pour excès de pouvoir de la circulaire du directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 26 novembre 1990, adressée aux directeurs des caisses régionales et primaires d'assurance maladie et des caisses générales de sécurité sociale ainsi qu'aux médecins conseils régionaux et au médecin chef de la Réunion, en tant que par cette circulaire le directeur a demandé que ne soient pas payés les forfaits de salle d'opération et les honoraires correspondant au traitement d'assurés sociaux dans les services privés d'hospitalisation de jour non autorisés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu la loi n° 70-1318 portant réforme hospitalière, modifiée notamment par la loi du 29 décembre 1979 ;
Vu l'arrêté interministériel du 29 juin 1978 fixant le modèle de convention type de l'hospitalisation privée prévue aux articles 1er et 4 du décret n° 73-183 du 22 février 1973 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Roul, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de l'UNION HOSPITALIERE PRIVEE et de la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE et de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés ;
- les conclusions de M. Le Chatelier, Commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions tendant à l'annulation de la circulaire du directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 26 novembre 1990 :
Considérant qu'aux termes de l'article 31 de la loi du 31 décembre 1970 portant réforme hospitalière dans sa rédaction en vigueur à la date de la circulaire attaquée, issue de la loi du 29 décembre 1979 : "Sont soumises à autorisation : 1°) la création et l'extension de tout établissement sanitaire privé comportant des moyens d'hospitalisation ... 3°) La création ou l'extension : ... de tout centre ou service privé d'hospitalisation de jour ou d'hospitalisation de nuit, et de tout centre ou service privé d'hospitalisation à domicile répondant à la définition qui en est donnée par décret ...", et qu'aux termes de l'article 32° de la même loi : "L'autorisation prévue à l'article 31 ci-dessus ... vaut ... autorisation de dispenser des soins remboursables aux assurés sociaux par application de l'article L. 272 du code de la sécurité sociale" ;
En ce qui concerne la soumission à autorisation de la création et de l'extension des établissements, centres et services privés d'hospitalisation de jour :
Considérant, d'une part, que l'intervention d'un décret n'est prévue par les dispositions précitées du 3°) de l'article 31 de la loi du 31 décembre 1970 qu'en ce qui concerne la définition de l'hospitalisation à domicile, et, d'autre part, que l'absence de décret définissant l'hospitalisation de jour ne rend pas impossible l'application de ces dispositions ; qu'il résulte, dès lors, desdites dispositions que la création et l'extension d'établissements, de centres ou de services privés d'hospitalisation de jour sont soumises à autorisation, même en l'absence d'un décret définissant cette modalité d'hospitalisation ; qu'ainsi, en se bornant à rappeler cette obligation par la circulaire attaquée en date du 26 novembre 1990, le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés n'a pas ajouté une règle nouvelle aux dispositions en vigueur ;
Considérant qu'en indiquant, par cette circulaire, que les actes programmés nécessitant une surveillance de plusieurs heures en milieu spécialisé devaient être considérés comme effectués dans des unités d'hospitalisation de jour soumises à l'autorisation prévue par les dispositions précitées de l'article 31 de la loi du 31 décembre 1970, le directeur de la caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés s'est borné à faire connaître l'interprétation que les dispositions de cette loi lui paraissaient devoir comporter, et n'a pris aucune décision de caractère réglementaire ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que L'UNION HOSPITALIERE PRIVEE et la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE ne sont pas recevables à demander l'annulation des dispositions susmentionnées de la circulaire du directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 26 novembre 1990 ;
En ce qui concerne le délai accordé pour régulariser les situations irrégulières :
Considérant qu'en accordant aux établissements, par la circulaire attaquée, un délai de six mois pour régulariser les situations irrégulières par le dépôt des demandes d'autorisation exigées par les dispositions précitées de l'article 31 de la loi du 31 décembre 1970, pour la création et l'extension des établissements, centres et services privés d'hospitalisation de jour, le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés a ajouté une règle nouvelle, de caractère réglementaire, aux dispositions en vigueur ; que le directeur ne tenant d'aucun texte le pouvoir d'édicter une telle règle, cette disposition est entachée d'incompétence ; que les requérantes sont dès lors recevables et fondées à en demander l'annulation ;
En ce qui concerne les conséquences du défaut d'autorisation sur le paiement des forfaits de salle d'opération et des honoraires :
Considérant qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 162-21 et L. 162-22 du code de la sécurité sociale et de celles de l'article 32 de la loi du 31 décembre 1970 que le complément afférent aux frais de salle d'opération des services de chirurgie, indépendant de la durée de l'hospitalisation, compris, en vertu de l'article R. 162-32 du même code, dans les tarifs de responsabilité des caisses de sécurité sociale prévus à l'article R. 126-26 dudit code, ne peut être payé que pour les soins donnés aux assurés sociaux dans les établissements, centres et services privés d'hospitalisation qui ont fait l'objet de l'autorisation instituée par les dispositions précitées de l'article 31 de ladite loi ; que les dispositions du 2°) de l'article 11-I de la convention type de l'hospitalisation privée fixée par un arrêté interministériel du 29 juin 1978, pris sur le fondement de l'article 4 du décret du 22 février 1973 ultérieurement codifié à l'article R. 162-29 du code de la sécurité sociale, n'ont pas eu pour objet et n'auraient d'ailleurs pu avoir légalement pour effet de déroger à cette règle, d'ailleurs rappelée par l'article 2 de ladite convention type ; que, dès lors, en rappelant, par sa circulaire du 26 novembre 1990, que le complément afférent à ces frais, dit "forfait de salle d'opération" ne devait pas être payé pour les soins dispensés par les services privés d'hospitalisation de jour non autorisés, le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés n'a pas édicté une règle nouvelle ;
Considérant qu'il résulte de la combinaison des articles L. 162-21 du code de la sécurité sociale et 32 de la loi du 31 décembre 1970 que les assurés sociaux ne sont pas couverts de leurs frais de traitement dans les établissements, centres et services privés d'hospitalisation qui n'ont pas fait l'objet de l'autorisation instituée par les dispositions précitées de l'article 31 de ladite loi, lesquels hais de traitement incluent les honoraires visés par l'article R. 162-34 du même code ; que, dès lors, en rappelant, par sa circulaire du 26 novembre 1990, que cette règle était applicable aux honoraires correspondant au traitement d'assurés sociaux dans des services d'hospitalisation de jour non autorisés, le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés n'a pas davantage édicté de disposition nouvelle ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas recevables à demander l'annulation des dispositions susmentionnées de la circulaire du 26 novembre 1990 par lesquelles le directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés a demandé que ne soient pas payés les forfaits de salle d'opération et les honoraires correspondant au traitement d'assurés sociaux dans des services privés d'hospitalisation de jour non autorisés ;
Sur les conclusions des requérantes et de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés tendant à l'application des dispositions de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article 75-1 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ; qu'il n'y a dès lors lieu de condamner ni l'UNION HOSPITALIERE PRIVEE et la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE, ni la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés à payer à la partie adverse les sommes demandées au titre des sommes exposées et non comprises dans les dépens ;
Article 1er : la circulaire du directeur de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés en date du 26 novembre 1990 est annulée en tant qu'elle accorde un délai de six mois pour déposer les demandes d'autorisation de création et d'extension des établissements, centres et services privés d'hospitalisation de jour.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de l'UNION HOSPITALIERE PRIVEE et de la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE ainsi que les conclusions de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés tendant à l'application des dispositions de l'article 75-1 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetés.
Article 3 : la présente décision sera notifiée à l'UNION HOSPITALIERE PRIVEE, à la FEDERATION INTERSYNDICALE DES ETABLISSEMENTS D'HOSPITALISATION PRIVEE, à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés et au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville.