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03/10/1994 | FRANCE | N°141251;141262;141269

France | France, Conseil d'État, 1 / 4 ssr, 03 octobre 1994, 141251, 141262 et 141269


Vu 1°), sous le n° 141251, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 septembre 1992 et 12 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français, dont le siège est ... ; le syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du 11 juillet 1992 par lequel le ministre de l'économie et des finances, le ministre des affaires sociales et de l'intégration et le ministre de la santé et de l'action humanitaire ont fixé les

prix et tarifs d'honoraires des médecins ;
Vu 2°), sous le n° 14126...

Vu 1°), sous le n° 141251, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 septembre 1992 et 12 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par le syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français, dont le siège est ... ; le syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du 11 juillet 1992 par lequel le ministre de l'économie et des finances, le ministre des affaires sociales et de l'intégration et le ministre de la santé et de l'action humanitaire ont fixé les prix et tarifs d'honoraires des médecins ;
Vu 2°), sous le n° 141262, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 septembre 1992 et 12 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés par l'union nationale des médecins spécialistes confédérés, dont le siège est ... ; l'union nationale des médecins spécialistes confédérés demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du 11 juillet 1992 par lequel le ministre de l'économie et des finances, le ministre des affaires sociales et de l'intégration et le ministre de la santé et de l'action humanitaire ont fixé les prix et tarifs d'honoraires des médecins ;
Vu 3°), sous le n° 141269, la requête et le mémoire complémentaire enregistrés les 14 septembre 1992 et 8 janvier 1993 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la fédération française des médecins généralistes MG-France, dont le siège est ... ; la fédération française des médecins généralistes MG-France demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêté du 11 juillet 1992 par lequel le ministre de l'économie et des finances, le ministre des affaires sociales et de l'intégration et le ministre de la santé et de l'action humanitaire ont fixé les prix et tarifs d'honoraires des médecins ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Debat, Auditeur,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de la fédération française des médecins généralistes DE France,
- les conclusions de Mme Maugüe, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que les requêtes présentées par le syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français, l'union nationale des médecins spécialistes confédérés et la fédération française des médecins généralistes MG-France sont dirigées contre le même arrêté ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant que l'arrêté attaqué a eu pour objet de combler le vide juridique né de l'annulation par le Conseil d'Etat, le 10 juillet 1992, de l'arrêté du 27 mars 1990 approuvant la convention nationale signée le 9 mars 1990 entre les caisses de sécurité sociale et la fédération des médecins de France ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence : "L'ordonnance n° 45-1483 du 30 juin 1945 est abrogée. Les prix des biens produits et services relevant antérieurement de ladite ordonnance sont librement déterminés par le jeu de la concurrence. Toutefois, dans les secteurs ou les zones où la concurrence par les prix est limitée en raison soit de situations de monopole ou de difficultés durables d'approvisionnement, soit des dispositions législatives ou réglementaires, un décret en Conseil d'Etat peut réglementer les prix après consultation du Conseil de la concurrence" ; que l'article L.162-38 du code de la sécurité sociale issu de la loi du 30 juillet 1987 portant diverses mesures d'ordre social dispose que : "Sans préjudice des dispositions du présent code relatives aux conventions conclues entre les organismes d'assurance maladie et les professions de santé, les ministres chargés de l'économie, de la santé et de la sécurité sociale peuvent fixer par arrêté les prix et les marges des produits et les prix des prestations de service pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale. Cette fixation tient compte de l'évolution des charges, des revenus et du volume d'activité des praticiens ou entreprises concernées. Les dispositions du titre VI de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence sont applicables aux infractions prévues par ces arrêtés" ; qu'ainsi, pour la fixation des prix des prestations de service des médecins qui sont pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, l'article L.162-38 du code de la sécurité sociale s'est substitué aux dispositions précitées de l'article 1er de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que les dispositions de l'article L.162-38 introduites par la loi du 30 juillet 1987 instituent un régime nouveau de fixation des prix des prestations de service des médecins ; que, par suite, l'arrêté attaqué, qui se borne à faire application de ces dispositions, n'institue donc pas un régime nouveau au sens de l'article 6 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 qui aurait obligé le gouvernement à consulter le Conseil de la concurrence ;

Considérant que l'article L.162-8 du code de la sécurité sociale dispose : "Pour les médecins non régis par la ou les conventions nationales, ou, à défaut de convention nationale, les tarifs servant de base au remboursement des honoraires sont fixés par arrêté interministériel" ; que ces dispositions ne peuvent faire obstacle à ce qu'en l'absence de convention, les ministres compétents ne fixent, en application de l'article L.162-38 du code de la sécurité sociale précité, les prix des prestations de service des médecins prises en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale ; que la circonstance que les ministres intéressés n'aient pas, conjointement à la prise de l'arrêté attaqué, fixé les tarifs de remboursement des honoraires des médecins par arrêté pris en application de l'article L.162-8 précité est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;
Considérant que l'article R.162-52 du code de la sécurité sociale dispose : "Les tarifs fixés en application des articles L.162-6, L.162-8, L.162-9, L.162-11, L.162-12 et L.162-32 sont établis d'après une nomenclature des actes professionnels fixée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, du ministre chargé de la santé et du ministre chargé de l'agriculture. Cet arrêté détermine les modalités d'application de la nomenclature générale dans les rapports entre les praticiens et auxiliaires médicaux, d'une part, les organismes de sécurité sociale et les assurés, d'autre part" ; qu'il ressort du texte même de l'arrêté attaqué que celui-ci n'a pas pour objet et n'a pas eu pour effet de modifier la nomenclature générale des actes professionnels et que la consultation de la commission de la nomenclature n'avait donc, en tout état de cause, pas lieu d'être ; que, par ailleurs, aucune disposition ne fait obstacle à ce que les ministres intéressés fassent référence à la valeur des lettres-clés définie par la nomenclature pour fixer les prix des prestations de service des médecins ;
Considérant que l'article 16 de la loi n° 93-8 du 4 janvier 1993 dispose que : "tous les actes pris en application de la convention nationale des médecins conclue le 9 mars 1990 sont validés, jusqu'à l'approbation d'une nouvelle convention et au plus tard jusqu'au 30 juin 1993" ; qu'en conséquence, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les auteurs de l'arrêté attaqué auraient méconnu le principe d'égalité en ne soumettant pas aux règles qu'ils édictent les praticiens qui, antérieurement au 10 juillet 1992, étaient titulaires d'un droit à dépassement permanent, avaient opté pour la pratique d'honoraires différents des tarifs conventionnels ou n'étaient pas régis par la convention nationale du 9 mars 1990 et qui se trouvaient ainsi dans une situation de droit et de fait différente de celle des autres praticiens ;
Considérant que les auteurs de l'arrêté attaqué n'ont pas, non plus, porté atteinte au principe d'égalité en ne soumettant pas aux règles tarifaires qu'ils édictent, les médecins titulaires de certains titres ou les praticiens de certains établissements hospitaliers, qui s'installeraient, pour la première fois, postérieurement au 10 juillet 1992, et qui sont également dans des situations différentes de celles de certains praticiens ;

Considérant enfin que l'arrêté attaqué ne porte pas davantage atteinte à ce principe en ne prévoyant pas un droit au dépassement d'honoraires en cas de circonstances exceptionnelles ;
Considérant que si l'article L.162-38 précité du code de la sécurité sociale prescrit que les prix des prestations de service des médecins fixés par arrêté interministériel devront "tenir compte de l'évolution des charges, des revenus et du volume d'activité" des praticiens concernés, il ne ressort pas des pièces du dossier que, pour fixer les prix desdites prestations de service, les ministres n'ont pas pris en compte l'ensemble de ces éléments et aient entaché leur décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; que le moyen tiré de ce que les caisses de sécurité sociale auraient interrompu la prise en charge des cotisations sociales et familiales des praticiens manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français, l'union nationale des médecins spécialistes confédérés et la fédération française des médecins généralistes MG-France ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêté interministériel du 11 juillet 1992 ;
Article 1er : Les requêtes du syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français, de l'union nationale des médecins spécialistes confédérés et de la fédération française des médecins généralistes MG-France sont rejetées.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat national des anesthésiologistes-réanimateurs français, à l'union nationale des médecins spécialistes confédérés, à la fédération française des médecins généralistes MG-France, au ministre d'Etat, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville et au ministre de l'économie.


Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDITE DES ACTES ADMINISTRATIFS - VIOLATION DIRECTE DE LA REGLE DE DROIT - PRINCIPES GENERAUX DU DROIT - EGALITE DEVANT LA LOI - Absence de violation - Situation de droit et de fait différente - Validation législative - Arrêté fixant les tarifs et honoraires des médecins après l'annulation par le Conseil d'Etat de l'arrêté approuvant la convention nationale des médecins.

01-04-03-01, 01-11, 62-02-01-01-01 L'article 16 de la loi du 4 janvier 1993 dispose que sont validés tous les actes pris en application de la convention nationale des médecins signée le 9 mars 1990 entre les caisses de sécurité sociale et la fédération des médecins de France, dont l'arrêté d'approbation a été annulé par décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux le 10 juillet 1992. En conséquence, les praticiens qui, antérieurement au 10 juillet 1992, étaient titulaires d'un droit à dépassement permanent, avaient opté pour la pratique d'honoraires différents des tarifs conventionnels ou n'étaient pas régis par la convention nationale du 9 mars 1990 se trouvaient ainsi dans une situation de droit et de fait différente de celle des autres praticiens. Absence de méconnaissance du principe d'égalité.

ACTES LEGISLATIFS ET ADMINISTRATIFS - VALIDATION LEGISLATIVE - Effets - Création d'une situation de droit et de fait différente - Principe d'égalité devant la loi - Absence de violation - Arrêté fixant les tarifs et honoraires des médecins.

SECURITE SOCIALE - RELATIONS AVEC LES PROFESSIONS ET LES ETABLISSEMENTS SANITAIRES - RELATIONS AVEC LES PROFESSIONS DE SANTE - MEDECINS - CONVENTION NATIONALE DES MEDECINS - Annulation de l'arrêté approuvant une convention nationale - Effets - Validation législative - Conséquences - Création d'une situation de droit et de fait différente - Absence de violation du principe d'égalité devant la loi.


Références :

Arrêté interministériel du 11 juillet 1992 décision attaquée confirmation
Code de la sécurité sociale L162-38, L162-8, R162-52
Loi 87-588 du 30 juillet 1987
Loi 93-8 du 04 janvier 1993 art. 16
Ordonnance 86-1243 du 01 décembre 1986 art. 1, art. 6


Publications
Proposition de citation: CE, 03 oct. 1994, n° 141251;141262;141269
Publié au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Debat
Rapporteur public ?: Mme Maugüé
Avocat(s) : Me Delvolvé, Avocat

Origine de la décision
Formation : 1 / 4 ssr
Date de la décision : 03/10/1994
Date de l'import : 06/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 141251;141262;141269
Numéro NOR : CETATEXT000007837458 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;1994-10-03;141251 ?
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