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21/10/1994 | FRANCE | N°119220

France | France, Conseil d'État, 10/ 7 ssr, 21 octobre 1994, 119220


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 août 1990 et 13 décembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X..., demeurant 65, résidence Le Moulin, Boulevard de l'Europe à Maubeuge (59600) ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision en date du 28 mai 1990 par laquelle le ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au versement d'une indemnité de changement de résidence de Bordeaux à Maubeuge et non de Paris à Maubeuge ;
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 4 790,16 F a

insi que les intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1990 ;
Vu les a...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 août 1990 et 13 décembre 1990 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour Mme X..., demeurant 65, résidence Le Moulin, Boulevard de l'Europe à Maubeuge (59600) ; Mme X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule la décision en date du 28 mai 1990 par laquelle le ministre de la justice a rejeté sa demande tendant au versement d'une indemnité de changement de résidence de Bordeaux à Maubeuge et non de Paris à Maubeuge ;
2°) condamne l'Etat à lui verser la somme de 4 790,16 F ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1990 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret n° 66-619 du 10 août 1966 modifié ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Pêcheur, Maître des Requêtes,- les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani, Thiriez, avocat de Mme X...,
- les conclusions de Mme Denis-Linton, Commissaire du gouvernement ;

Considérant, d'une part, que Mme X..., attaché des services extérieurs du ministère de la défense, en résidence administrative à Paris, a été nommée auditeur de justice le 6 janvier 1987 après avoir été admise au concours d'accès à l'école nationale de la magistrature ; qu'elle a été détachée de son corps d'origine auprès de cette école pour y effectuer sa scolarité et doit donc être regardée comme ayant eu, durant cette période, sa résidence administrative à Bordeaux, où est situé le siège de cet établissement ;
Considérant, d'autre part, qu'à l'issue de sa scolarité, Mme X... a été nommée, par décret en date du 14 décembre 1988, juge au tribunal de grande instance d'Avesne-sur-Helpe, chargé du service du tribunal d'instance de Maubeuge ; que si, aux termes du dernier alinéa de l'article 19 du décret susvisé du 10 août 1966, en vigueur à la date des faits : "Les agents n'ont droit à aucun remboursement ou indemnisation dans tous les autres cas et, notamment, dans celui de première nomination dans la fonction publique, d'affectation provisoire ... de mise ... en service détaché dans un emploi ne conduisant pas à pension ...", il résulte des dispositions de l'article 19 1°a) du même texte que "l'agent a droit à la prise en charge de ses frais de changement de résidence lorsque le changement de résidence est rendu nécessaire ... par une nomination dans un autre corps de même catégorie ou de catégorie supérieure" ; que la requérante, qui avait la qualité de fonctionnaire avant son entrée à l'école nationale de la magistrature et appartenait à un corps de la catégorie A, a été nommée, à l'issue de sa scolarité, dans le corps des magistrats, lequel est expressément assimilé à un corps de catégorie A par l'article 19 susmentionné ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme X... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par la décision du 28 mai 1988, le ministre de la justice a refusé de lui allouer une indemnité correspondant à un changement de résidence de Bordeaux à Maubeuge et a limité l'indemnité à un changement de résidence de Paris à Maubeuge ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans les circonstances de l'affaire, il sera fait une exacte appréciation du préjudice subi par Mme X... en condamnant l'Etat à lui verser une indemnité de 4 790,16 F ;
Sur les intérêts :
Considérant que Mme X... a droit aux intérêts de la somme de 4 790,16 F à compter du 27 mars 1990, date de la réception par le ministre de sa demande ;
Sur les intérêts des intérêts :
Considérant que la capitalisation des intérêts a été demandée les 18 décembre 1991, 22 décembre 1992 et 7 janvier 1994 ; qu'à ces dates, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à ces demandes ;
Article 1er : La décision du ministre de la justice en date du 28 mai 1990 est annulée.
Article 2 : L'Etat est condamné à verser à Mme X... la somme de 4 790,16 F avec intérêts au taux légal à compter du 27 mars 1990. Les intérêts échus les 18 décembre 1991, 22 décembre 1992 et 7 janvier 1994 seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux mêmes intérêts.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme X... et au ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 10/ 7 ssr
Numéro d'arrêt : 119220
Date de la décision : 21/10/1994
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - REMUNERATION - INDEMNITES ET AVANTAGES DIVERS - FRAIS DE CHANGEMENT DE RESIDENCE - Décret n° 66-619 du 10 août 1966 - Changement de résidence rendu nécessaire par une nomination dans un autre corps - Fonctionnaire de catégorie A nommé dans le corps des magistrats.

36-08-03-006, 37-04-02-01 Si en vertu de l'article 19 du décret du 10 août 1966 modifié, les agents n'ont droit à aucune indemnisation dans le cas d'une première nomination, d'une affectation provisoire, ou d'une mise en service détaché dans un emploi ne conduisant pas à pension, les dispositions de l'article 19 1° a) du même décret prévoient que l'agent a droit à la prise en charge de ses frais de changement de résidence lorsque le changement de résidence est rendu nécessaire par une nomination dans un autre corps de même catégorie ou de catégorie supérieure. Attaché des services extérieurs de la défense en résidence administrative à Paris, nommé auditeur de justice après avoir été admis au concours d'entrée à l'école nationale de la magistrature, puis nommé dans le corps des magistrats avec une affectation à Maubeuge. Ce fonctionnaire, détaché de son corps d'origine auprès de l'Ecole nationale de la magistrature pour y accomplir sa scolarité, doit être regardé comme ayant eu, durant cette période de scolarité, sa résidence administrative à Bordeaux, siège de l'école. Il a dès lors droit à une indemnité correspondant à un changement de résidence de Bordeaux à Maubeuge.

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - MAGISTRATS ET AUXILIAIRES DE LA JUSTICE - MAGISTRATS DE L'ORDRE JUDICIAIRE - STATUT - DROITS - OBLIGATIONS ET GARANTIES - Rémunération et retenues sur traitement - Frais de changement de résidence - Prise en charge en cas de nomination dans un autre corps de même catégorie ou de catégorie supérieure - Application à un fonctionnaire de catégorie A nommé dans le corps des magistrats.


Références :

Code civil 1154
Décret du 14 décembre 1988
Décret 66-619 du 10 août 1966 art. 19


Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 1994, n° 119220
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : Mme Bauchet
Rapporteur ?: M. Pêcheur
Rapporteur public ?: Mme Denis-Linton

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:119220.19941021
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