Vu la requête, enregistrée le 19 août 1991 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. X..., demeurant ... ; M. X... demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule le jugement en date du 18 juin 1991 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'intérieur pendant plus de quatre mois sur son recours gracieux dirigé contre l'arrêté du 20 décembre 1989 par lequel le ministre de l'intérieur l'a assigné à résidence dans le département de la Lozère ;
2°) annule ladite décision ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Vu l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de Mme Chemla, Auditeur,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. Djaber X...,
- les conclusions de M. Abraham, Commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : "L'étranger qui fait l'objet d'un arrêté d'expulsion ou qui doit être reconduit à la frontière et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine ni se rendre dans aucun autre pays peut, par dérogation à l'article 35 bis, être astreint par arrêté du ministre de l'intérieur à résider dans les lieux qui lui sont fixés, dans lesquels il doit se présenter périodiquement aux services de police et de gendarmerie" ;
Considérant que, par deux arrêtés en date du 20 décembre 1989, le ministre de l'intérieur a, d'une part, prononcé l'expulsion de M. X... du territoire français et l'a, d'autre part, astreint à résider dans le département de la Lozère ; que la circonstance que la notification de l'arrêté d'expulsion ait été postérieure à celle de l'arrêté d'assignation à résidence est sans influence sur la légalité de ce dernier ;
Considérant qu'il n'est pas contesté que M. X..., qui avait la qualité de réfugié politique, ne pouvait pas regagner son pays d'origine ni se rendre dans un autre pays à la date de la décision attaquée ; que c'est en considération de cette circonstance que le ministre de l'intérieur, en application des dispositions précitées de l'article 28 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, l'a assigné à résidence afin de lui permettre d'effectuer toutes démarches utiles en vue de son admission dans un pays d'accueil de son choix ; que dès lors l'arrêté attaqué n'a pas été pris en violation de l'article 28 susvisé, et n'est entaché d'aucun détournement de procédure ;
Considérant que c'est à bon droit que le tribunal administratif a considéré qu'à la date de la demande dont il était saisi, l'arrêté d'expulsion était devenu définitif, faute d'avoir été attaqué dans les délais du recours contentieux ; que par suite, l'illégalité de cet arrêté, qui constitue une décision individuelle, ne pouvait plus être invoquée par M. X... au soutien de sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté l'assignant à résidence ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que si la compagne de M. X... a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion pour des faits de même nature que ceux qui ont été retenus à l'encontre de l'intéressé et a été astreinte à résider dans le département des Deux-Sèvres, la mesure attaquée, nécessaire à la défense de l'ordre public, n'a pas porté, eu égard notamment à la gravité des actes commis par le requérant, une atteinte excessive à la vie familiale de M. X... ; que, dans ces conditions, elle n'a pas été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours gracieux tendant à l'abrogation de l'arrêté du 20 décembre 1989 l'assignant à résidence en Lozère ;
Article 1er : La requête de M. X... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Djaber X... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.