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09/11/1994 | FRANCE | N°137419

France | France, Conseil d'État, 8 / 9 ssr, 09 novembre 1994, 137419


Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 mai 1992 et 15 septembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP", dont le siège est ... ; la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt en date du 19 février 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé le jugement en date du 2 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de titres de perception émis à son

encontre par l'Institut français de recherche pour l'exploitation d...

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire enregistrés les 13 mai 1992 et 15 septembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP", dont le siège est ... ; la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" demande que le Conseil d'Etat :
1°) annule l'arrêt en date du 19 février 1992 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes, après avoir annulé le jugement en date du 2 décembre 1988 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de titres de perception émis à son encontre par l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (IFREMER) les 10 décembre 1985 et 9 février 1987 pour avoir paiement de la taxe parafiscale sur les semi-conserves due à cet établissement au titre tant de périodes antérieures au 1er janvier 1985 que de périodes postérieures à cette date et à la décharge desdites taxes, a rejeté sa demande en décharge de ces taxes ;
2°) lui accorde décharge des taxes contestées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le décret du 29 décembre 1962 ;
Vu l'ordonnance du 27 décembre 1958 et les lois des 31 décembre 1970 et 29 décembre 1971 ;
Vu le décret du 20 décembre 1972 ;
Vu la loi du 16 juillet 1984 ;
Vu la loi du 10 juillet 1991 ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M. Chabanol, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Delvolvé, avocat de la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" et de la SCP de Chaisemartin, Courjon, avocat de l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER) ;
- les conclusions de M. Arrighi de Casanova, Commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne l'ensemble des taxes réclamées par l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER) à la société requérante :
Sur le moyen tiré de l'illégalité externe de l'arrêté paru le 9 juillet 1982 sur le fondement duquel ont été établies les taxes litigieuses :
Considérant que l'arrêté susmentionné avait pour objet de définir, en application du décret du 10 février 1955, les traitements des animaux marins en vue de leur conservation, et non de compléter, en application de l'article 23 du décret du 20 décembre 1960, les dispositions de l'article 22 du même décret fixant les conditions d'hygiène que doivent respecter les opérations de traitement du poisson ; qu'en jugeant que la procédure imposée par l'article 23 dudit décret n'était pas applicable à l'élaboration de l'arrêté publié le 9 juillet 1982, la cour administrative d'appel n'a donc pas commis d'erreur de droit ; qu'elle a par ailleurs jugé à bon droit que le défaut de date dudit arrêté, d'ailleurs corrigé par un rectificatif paru au Journal Officiel de la République française lui donnant la date du 25 juin 1982, était sans influence sur sa légalité ;
Sur le moyen tiré de ce que la société requérante ne serait pas assujettie aux taxes litigieuses :
Considérant que les taxes en cause sont assises, entre autres, selon l'article 2 des décrets des 20 décembre 1972 et 31 décembre 1984, sur le montant des achats de poissons et autres animaux marins destinés à la transformation en semi-conserves "au sens du décret du 10 février 1955" ; qu'aux termes de l'article 2 de ce dernier décret : " ... sont considérées comme semi-conserves ... les denrées alimentaires ... périssables, conditionnées en récipients étanches aux liquides et ayant subi, en vue d'assurer une conservation ... un traitement autorisé par arrêté" ; que, par l'arrêté susmentionné du 25 juin 1982 relatif aux traitements autorisés pour la préparation des semi-conserves, le fumage a été défini comme "l'opération qui consiste à exposer des animaux marins ou parties d'animaux marins à la fumée obtenue par combustion lente de produits ligneux de façon à abaisser leur teneur en eau et à y introduire divers composants de la fumée" ; que la société requérante a été assujettie aux taxes contestées par application de ces dispositions ;

Considérant qu'alors même que l'article 5 dudit arrêté réserve la qualification de "fumés" aux produits qui ont été soumis au fumage pendant un temps suffisant pour acquérir le goût de fumée, la définition qu'il donne de l'opération de fumage ne contient pas de condition relative au temps d'exposition à la fumée ou au goût acquis par le produit ; que la circonstance que tant les usages de la profession que d'autres dispositions législatives réserveraient l'appellation de "semi-conserves" à des produits fumés pendant une durée minimum n'établit pas à elle seule que, en qualifiant de semi-conserves en vue de l'application des dispositions relatives aux taxes en cause les produits ayant subi une opération de fumage, quelle qu'en ait été la durée, l'arrêté dont s'agit procéderait d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'en s'abstenant dès lors de tenir compte, pour déterminer si le saumon traité par la requérante constituait une semiconserve, de la durée de son exposition à la fumée et du goût qu'il avait, la cour administrative d'appel a fait une exacte application des dispositions susmentionnées de l'arrêté du 25 juin 1982 ;
Considérant qu'en jugeant que l'opération de fumage ainsi réalisée avait pour objet d'assurer la conservation du saumon qui y était exposé, et en relevant que ce produit était conditionné en récipients étanches aux liquides, la cour s'est livrée à une appréciation des faits insusceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
En ce qui concerne la régularité du titre de perception :
Considérant que si la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" a, devant le tribunal administratif, fait état d'un vice de procédure, un tel moyen a été soulevé à l'appui de la demande tendant à l'annulation des demandes de paiement adressées par le percepteur de Fécamp ; qu'en revanche les conclusions de sa demande tendant à ce que soit prononcée la décharge des taxes litigieuses, dont seul le rejet, ainsi qu'il a été dit, fait l'objet du présent pourvoi, n'étaient soutenues que par des moyens tenant au bien-fondé desdites taxes, à l'exclusion de tout moyen mettant en cause la légalité externe des actes ayant conduit à leur établissement ; que, par suite, en jugeant que la requérante, en soulevant le moyen tiré de ce que les états exécutoires concernant les taxes attaquées n'étaient pas motivés, présentait au juge d'appel une demande nouvelle, et donc irrecevable, la cour administrative d'appel n'a ni fondé sa décision sur des faits matériellement inexacts, ni commis une erreur de droit ;
Considérant, en second lieu, que la cour a répondu au moyen tiré de l'exagération des montants qui ont été réclamés à la requérante ;
En ce qui concerne la taxe réclamée au titre de la période antérieure au 1er janvier 1985 :

Considérant, en premier lieu, que la taxe dont s'agit a été instituée parl'ordonnance n° 58-1357 du 27 décembre 1958, qui a valeur législative, modifiée par des lois des 31 décembre 1970 et 29 décembre 1971 ; que ces textes ont rendu applicable à la taxe dont s'agit le régime des taxes parafiscales, et ont par là-même autorisé d'une part le pouvoir réglementaire à en déterminer les modalités d'application, d'autre part les ministres chargés des finances et de la pêche à en fixer le taux par arrêté, dans la limite du maximum énoncé par la loi ; que, par suite, le moyen tiré de ce que ladite taxe ne pouvait légalement procéder d'actes réglementaires ou être instituée sous la forme d'une taxe parafiscale au profit d'un établissement public administratif, ne peut qu'être écarté ;
Considérant, en second lieu, que si la loi susvisée du 16 juillet 1984 a abrogé, à compter du 1er janvier 1985, les dispositions de l'ordonnance susmentionnée instituant la taxe en cause, et autorisé l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer à la percevoir, jusqu'à cette date, aux lieu et place de l'institut scientifique et technique des pêches maritimes auquel il succédait, ce texte n'a pas eu pour effet d'interdire à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer de poursuivre, après le 1er janvier 1985, le recouvrement des taxes dont le fait générateur était antérieur à cette date ;
Sur les conclusions tendant à l'application du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991 :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" à payer à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer la somme qu'il réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Article 1er : La requête de la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" est rejetée.
Article 2 : La SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP" est condamnée à payer une somme de 5 000 F à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer au titre du I de l'article 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la SOCIETE "LES PECHERIES DE FECAMP", à l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer et au ministre de l'agriculture et de la pêche.


Synthèse
Formation : 8 / 9 ssr
Numéro d'arrêt : 137419
Date de la décision : 09/11/1994
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-08-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES - PARAFISCALITE ET REDEVANCES - TAXES PARAFISCALES.


Références :

Arrêté du 25 juin 1982 art. 2, art. 5
Décret 55-241 du 10 février 1955
Décret 60-1524 du 20 décembre 1960 art. 23, art. 22
Décret 72-1161 du 20 décembre 1972
Décret 84-1296 du 31 décembre 1984 art. 2
Loi 70-1283 du 31 décembre 1970
Loi 71-1061 du 29 décembre 1971
Loi 84-608 du 16 juillet 1984
Loi 91-647 du 10 juillet 1991 art. 75
Ordonnance 58-1357 du 27 décembre 1958


Publications
Proposition de citation : CE, 09 nov. 1994, n° 137419
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Chabanol
Rapporteur public ?: M. Arrighi de Casanova

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:137419.19941109
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