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16/11/1994 | FRANCE | N°143307

France | France, Conseil d'État, President de la section du contentieux, 16 novembre 1994, 143307


Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU RHONE ; le PREFET DU RHONE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 novembre 1992 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté en date du 14 octobre 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Claudine X...
Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Mafo Y... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièce

s du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme e...

Vu la requête, enregistrée le 8 décembre 1992 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentée par le PREFET DU RHONE ; le PREFET DU RHONE demande au président de la section du Contentieux du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement du 7 novembre 1992 par lequel le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté en date du 14 octobre 1992 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Claudine X...
Y... ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Mafo Y... devant ledit tribunal ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée, notamment par la loi du 2 août 1989, la loi du 10 janvier 1990 et la loi du 26 février 1992 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu en audience publique :
- les conclusions de M. Vigouroux, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que Mme Mafo Y..., à qui la qualité de réfugié a été refusée par une décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 10 décembre 1991 confirmée par la commission des recours des réfugiés le 25 mai 1992, s'est vue notifier, le 21 août 1992, la décision du même jour du PREFET DU RHONE refusant de lui délivrer un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; que si, le 18 septembre 1992, Mme Mafo Y... a présenté une nouvelle demande de reconnaissance de la qualité de réfugié, cette demande à l'appui de laquelle l'intéressée n'a établi aucun fait nouveau relatif aux risques de persécutions qu'elle encourrait de la part des autorités de son pays et qui a, d'ailleurs, été rejetée le 9 février 1994 par l'office français de protection des réfugiés et apatrides, doit être regardée comme ayant eu pour seul objet de faire échec, dans un but dilatoire, à la mesure d'éloignement susceptible d'être prise à son encontre ; qu'elle n'est, dès lors, pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté en date du 14 octobre 1992 par lequel le PREFET DU RHONE a ordonné sa reconduite à la frontière ; qu'il suit de là que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que le vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur cette nouvelle demande pour annuler son arrêté du 14 octobre 1992 ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient au juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme Mafo Y... ;
Considérant qu'aux termes de l'article 22 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'intervention de l'arrêté attaqué : "I- Le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police de Paris, peuvent, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière ... 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour temporaire a été refusé s'est maintenu sur le territoire au-delà d'un mois à compter de la date de notification du refus" ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que Mme Mafo Y..., qui avait demandé au préfet la régularisation de sa situation, s'est maintenue sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le 21août 1992, de la décision du même jour par laquelle le PREFET DU RHONE lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invitée à quitter le territoire ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient l'intéressée, elle pouvait faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière en application des dispositions précitées de l'article 22-I-3° de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
Considérant que si Mme Mafo Y... fait valoir qu'elle séjourne en France avec son époux et ses deux enfants en bas âge, un arrêté de reconduite à la frontière a été pris le même jour à l'encontre de son époux ; qu'ainsi, et en l'absence de toute circonstance mettant les intéressés dans l'impossibilité d'emmener leurs enfants avec eux, la mesure prise à l'égard deMme X...
Y... ne porte pas atteinte au droit de celle-ci au respect de sa vie familiale ;

Considérant que Mme Mafo Y... ne justifie pas que son état de santé s'opposait à la date de la décision attaquée à sa reconduite à la frontière ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le PREFET DU RHONE ait commis une erreur manifeste dans son appréciation des conséquences de la mesure prise sur la situation personnelle de Mme Mafo Y... ;
Considérant que si l'arrêté du 14 octobre 1992 n'indique pas le pays à destination duquel Mme Mafo Y... sera reconduite, il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'acte de notification à l'intéressée dudit arrêté, que le PREFET DU RHONE a décidé de reconduire Mme Mafo Y... vers son pays d'origine ; que ledit préfet n'a pas méconnu sa compétence en fixant le pays à destination duquel Mme Mafo Y... sera reconduite ;
Considérant que la demande de Mme Mafo Y... tendant à ce que lui soit reconnue la qualité de réfugié a été, comme il a été dit ci-dessus, rejetée par l'office français de protection des réfugiés et apatrides et par la commission de recours des réfugiés ; que si Mme Mafo Y... fait état de la situation qui prévaut dans son pays d'origine et fait valoir qu'elle courrait des risques si elle devait retourner en Angola, elle ne fournit à l'appui de ses allégations aucune justification et n'établit aucune circonstance particulière de nature à faire légalement obstacle à sa reconduite à destination de son pays d'origine ; qu'ainsi, l'intéressée ne peut, en tout état de cause, soutenir que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales auraient été méconnues ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;
Article 1er : Le jugement susvisé du vice-président délégué par le président du tribunal administratif de Lyon en date du 7 novembre 1992 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par Mme Mafo Y... devant le tribunal administratif de Lyon est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au PREFET DU RHONE, à Mme Mafo Y... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.


Synthèse
Formation : President de la section du contentieux
Numéro d'arrêt : 143307
Date de la décision : 16/11/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - ETRANGERS - REFUGIES - APATRIDES - ETRANGERS - QUESTIONS COMMUNES - RECONDUITE A LA FRONTIERE.

POLICE ADMINISTRATIVE - POLICES SPECIALES - POLICE DES ETRANGERS - RECONDUITE A LA FRONTIERE.


Références :

Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 22


Publications
Proposition de citation : CE, 16 nov. 1994, n° 143307
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Président : M. de Longevialle
Rapporteur public ?: M. Vigouroux

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:1994:143307.19941116
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